HomeA la uneMASCARADE ELECTORALE AU CONGO BRAZZAVILLE : C’est le contraire qui aurait étonné  

MASCARADE ELECTORALE AU CONGO BRAZZAVILLE : C’est le contraire qui aurait étonné  


 

Le 30 juillet 2017, les congolais étaient appelés à voter pour le second tour des législatives. C’était l’occasion, pour le Parti congolais du travail (PCT), de conforter son emprise sur la future Assemblée nationale. Et comme il fallait s’y attendre dans ce pays qui constitue l’un des temples de la dictature en Afrique, en lieu et place d’un scrutin démocratique, libre et transparent, c’est une véritable mascarade électorale qu’il a été donné de voir. En effet, non seulement dans leur majorité les Congolais ont snobé l’appel aux urnes, mais aussi l’élection a été entachée de nombreuses irrégularités dont des fraudes et des scènes de violences impliquant des militaires. Il a été, en effet, rapporté, entre autres, que dans certains quartiers de la capitale comme à Ouenzé et Poto-Poto, des militaires ont pris d’assaut des bureaux de vote pour y voter sans pièce d’identité et que des électeurs ont été tabassés. Des coups de feu ont même été entendus.

Les élections constituent une véritable croix pour bien des chefs d’Etat africains

Et voilà qui vient rappeler les images  des démocraties gondwanaises telles qu’on l’a vu il y a de cela quelques années au Togo, une autre place forte de la dictature sur le continent, où la soldatesque s’était invitée avec fracas  dans les bureaux de vote et avait poussé loin le ridicule en transportant des urnes  dans son repli. Mais, « faut-il s’étonner de cette confiture à la  congolaise », pourrait-on se demander ? Sans ambages, la réponse est non. On pourrait même dire que c’est le contraire qui aurait étonné. Et pour cause. D’abord les élections opaques au Congo Brazzaville de Denis Sassou Nguesso, sont une tradition et comme le dit l’adage, « le chien ne change jamais sa manière de s’asseoir ». Le dictateur a beaucoup appris du passé. Si fait que depuis sa défaite en 1992 face à Pascal Lissouba, l’homme a pris conscience du mépris que lui portent les Congolais. Et depuis son retour au pouvoir, il s’est mis à l’abri de toute surprise en piégeant son peuple dans un immense rets dont la trame est faite de fraudes et de violences électorales. La dernière illustration de ce scénario a été l’élection présidentielle passée. Ensuite, cette  mascarade électorale était aussi des plus prévisibles, parce que le peuple congolais  semble s’être résigné, laissant le champ libre au dictateur. Peut-être les Congolais ont-ils compris qu’il est inutilement suicidaire de défier un tyran qui n’avait pas hésité à mettre à feu et à sang le pays au cours de la guerre civile  ou à déployer un arsenal de guerre contre son opposition dans le département du Pool. Cela dit, le premier enseignement que l’on peut tirer de cette journée électorale est que ce scrutin vient renforcer le sentiment que les élections constituent une véritable croix pour bien des chefs d’Etat africains qui se seraient bien passés de ces formalités. Sans doute auraient-ils préféré nommer directement les parlementaires pour ne pas courir le risque de voir leur pouvoir remis en cause. Et cela confirme bien l’opinion selon laquelle la démocratie n’est véritablement pas une aspiration réelle de nos présidents qui ont été contraints de s’y engager dans la décennie 90 après le discours de la Baule.

Les oppositions africaines doivent mieux s’organiser

Dans le cas d’espèce, issu de la meute de loups qui, par le miracle du discours de François Mitterrand, se sont mués en agneaux, Denis Sassou Nguesso n’a jamais mis sous le boisseau son rêve de s’éterniser au pouvoir.  Les Congolais qui ont payé le prix fort de cette fausse mue, doivent se le tenir pour dit : « Le chat a beau faire le pèlerinage de la Mecque, sa mosquée ne saurait être le lieu de la prière de la souris ».  L’autre leçon et pas la moindre à tirer de ce deuxième tour des législatives au Congo Brazzaville, est l’impérieuse nécessité pour l’opposition congolaise et, au-delà, des oppositions africaines en lutte contre des dictatures, d’être plus imaginatives.  La rengaine du manque de moyens souvent serinée pour expliquer les défaites aux élections ne saurait éternellement prospérer, puisqu’il existe des cas d’école comme le Sénégal ou la Gambie où Macky Sall et Adama Barrow ont respectivement réussi la prouesse de terrasser les tenants du pouvoir. Les oppositions africaines doivent donc réussir le pari de mieux s’organiser avant de partir à l’assaut des citadelles des princes régnants.  Pour clore ce chapitre des législatives au Congo Brazzaville, il faut aussi et surtout dénoncer le silence coupable de la communauté internationale. Aussi faut-il regretter l’aphonie en particulier de l’Union africaine (UA) qui s’est dotée d’une charte de la bonne gouvernance. Même s’il est de notoriété publique que l’organisation continentale est le syndicat des chefs d’Etat, il est difficilement compréhensible que par respect des règles et principes qu’elle s’est librement fixée, elle ne puisse même pas lever le petit doigt.

 

« Le Pays »  


No Comments

Leave A Comment