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MONTEE EN FLECHE DES CAS DE CORONAVIRUS EN GUINEE


Le 22 mars dernier, malgré la clameur de son peuple et les multiples alertes de la communauté internationale, Alpha Condé tenait, contre vents et marées, son référendum constitutionnel contesté, censé lui ouvrir la voie d’une possible candidature à sa propre succession. Couplé aux législatives, ce scrutin s’est tenu au moment où le coronavirus poussait ses premiers vagissements sur le continent noir et l’heure était à l’interdiction des regroupements et à la prise de mesures restrictives pour éviter la propagation du virus. Malgré la détection des premiers cas dans son pays, et la mise en garde des autorités sanitaires qui, faisant état de la dangerosité du coronavirus, estimaient que « ce serait prendre trop de risques que d’aller à ces élections » en pleine pandémie, le président guinéen n’a pas résisté à la tentation d’utiliser « la clé du bonheur » que constituait pour lui le référendum constitutionnel, pour sauter le verrou limitatif des mandats présidentiels, qui l’empêchait de prétendre à un troisième mandat.

L’expérience de la France aurait dû servir de leçon à la Guinée pour éviter d’exposer les populations au virus mortel

Résultat : un mois et demi après le vote, de deux cas officiels, le pays compte aujourd’hui plus de 1 800 cas déclarés dont 7 décès. Une montée en flèche dont il y a des raisons de croire qu’elle a été largement favorisée par la tenue des scrutins décriés, d’autant que l’expérience de la France qui venait à peine de sortir du premier tour des municipales et qui a dû se résoudre à en reporter le second, aurait dû servir de leçon à la Guinée pour éviter d’exposer les populations au virus mortel. Mais que nenni ! L’occasion était peut-être trop belle pour le Professeur, avec le boycott de l’opposition et le retrait de certains observateurs internationaux du processus, de se remettre en selle, sans coup férir, dans la course à sa propre succession. Ce qui fut fait. C’est dire si le Covid-19 peut dire merci à Alpha Condé La question est maintenant de savoir si le président guinéen avait réellement pris toute la mesure du péril auquel il exposait son peuple. Rien n’est moins sûr. Car, comment peut-on y croire, quand on pense, par exemple, à la drôle de méthode qu’il recommandait, de se mettre du « mentholatum » dans les narines et « ensuite boire souvent de l’eau chaude » pour lutter contre le coronavirus ? Une telle sortie est d’autant plus malheureuse et indigne d’un chef d’Etat, qu’elle contribue à propager de fausses idées qui peuvent être tout aussi contreproductives dans la lutte contre la maladie. Mais avec cela, Alpha Condé a, au moins, de quoi disputer la palme d’or du ridicule au président américain, Donald Trump, qui, lui, suggérait l’injection de désinfectants aux patients atteints du Covid-19 pour anéantir le virus mortel.  Cela dit, une fois sa forfaiture consommée, Alpha Condé semble maintenant rattrapé par la réalité d’un virus dont tout porte à croire qu’il a largement minimisé la dangerosité. C’est à se demander si le chef de l’Etat guinéen n’a pas pris conscience de la gravité de la situation, quand certains de ses proches comme le secrétaire général du gouvernement ou encore le président de la Commission électorale, ont péri à cause du Covid-19.

Ce qui arrive aujourd’hui à la Guinée, est la rançon de l’entêtement d’un président sénile qui refuse obstinément de faire valoir ses droits à la retraite

La question est maintenant de savoir si la Guinée est suffisamment armée pour faire face à la pandémie. Rien n’est sûr. D’autant qu’avec la multiplication des cas, la situation peut devenir rapidement incontrôlable au regard de la faiblesse bien connue du système sanitaire dans la plupart des pays subsahariens. Et ce n’est pas en se défaussant sur ses collaborateurs encore moins sur ses compatriotes qui vivent aujourd’hui une véritable crise de confiance avec l’autorité, que Condé parviendra à dégager sa responsabilité dans la grave crise sanitaire que traverse son pays. Car, il est bien placé pour savoir qu’en tenant au forceps son référendum malgré la menace de la pandémie, ce qui était une façon de forcer les gens à sortir de chez eux, il aurait autant de mal à les faire ensuite rester chez eux en invoquant un impératif de lutte contre le coronavirus. C’est pourquoi l’on est porté à croire que ce qui arrive aujourd’hui à la Guinée, est la rançon de l’entêtement d’un président sénile arrivé au bout de ses mandats constitutionnels mais qui refuse obstinément de faire valoir ses droits à la retraite, malgré la clameur de son peuple.   A présent, si le président Condé a suffisamment prouvé que ses intérêts passent largement avant ceux du peuple guinéen, il appartient à ses compatriotes de faire malgré tout preuve de sagesse et de discipline dans l’observation des mesures-barrières pour ne pas exposer davantage leur propre vie à la maladie. D’autant que, si Alpha Condé n’a pas hésité à marcher sur les cadavres de certains d’entre eux pour se remettre sur orbite, ce ne sont pas quelques vies en moins arrachées par un virus exotique, qui pourraient l’émouvoir outre mesure. Pauvre Guinée !
 
« Le Pays »


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