HomeOmbre et lumièreLA NOUVELLE DU VENDREDI : Deux femmes pour un cœur

LA NOUVELLE DU VENDREDI : Deux femmes pour un cœur


Le silence d’une nuit de la savane caresse  le souffle d’un quartier du royaume. Un homme, pris entre les filets de l’insomnie cherche vainement le sommeil, baume  cicatrisante pour le repos de l’âme. Il se lève de sa natte. Dans la cour, il prend une calebasse d’eau et s’installe devant sa porte. Silencieusement, pour ne pas réveiller les deux femmes de son cœur,  il médite.

Un langage  intérieur aux heures profondes  de la nuit

Imaginons une femme qui porte en elle le fruit fragile de ses entrailles. Pendant des mois, elle souffre le martyr. Elle supporte le poids de son corps. La douleur de l’enfantement arrive et la libère. Elle retrouve le sourire en tenant le bébé dans ses bras. C’est un petit garçon qui lui redonne ses forces.

Elle lui tend par tendresse le sein. Par elle, l’enfant se nourrira pendant des jours, des mois, des années.

Cette femme se battra pour soigner, pour éduquer, pour faire de ce bébé un homme. Un espoir.

Imaginons le bonheur de cette mère des années plus tard, recevant l’amour, la considération maternelle. Sa récompense. L’homme montre une tendresse sans limite pour celle qui l’a couvée. Cette femme a un trône de choix dans le jardin de son cœur. Un rêve partagé par toutes les mamans.

Le temps passe. La nature nous impose sa volonté.

Un matin, sous la lumière du jour, le regard de l’homme rencontre celui d’une autre femme. Son cœur s’emballe, l’émotion emporte son souffle. Un lien magique se noue. La mère gardera sa couronne, elle sera  éternellement présente mais elle doit s’éclipser au profit de l’étrangère. Telle est la volonté du ciel.

L’homme à présent doit aimer cette autre d’un sentiment nouveau, différent. Deux amours originaux pour un seul cœur.

 

Une obligation morale.

Imaginons la mère qui doit s’armer de patience, de sagesse pour se ranger. Etre à la fois présente et invisible. Vigilante et non envahissante. Proche et lointaine. Il faut un raisonnement solide pour que cette mère qui voit son trône menacé, obtempère. Il faut qu’elle accepte la logique. Pour sauvegarder sa place, elle doit faire des concessions.

Imaginons le bonheur d’une jeune fille, son chemin croisant celui qu’elle espérait, le prince qu’elle attendait depuis des lunes. Le sourire du conquérant uniquement pour elle. Sa joie est immense. Elle loue l’éternel pour son rêve réalisé.

Pour partager le bonheur, la vie de son homme elle se doit de composer avec une autre. Une autre qui était là avant elle. Qui n’occupe pas la même fonction, mais habite dans le même espace. Une autre, celle qui a donné vie à son trésor. Elle ne doit jamais oublier cela.

Ce n’est pas une rivale. Elle est loin d’être une ennemie. Elle est rarement une vraie alliée. L’amoureuse doit composer avec sa présence.

La jeune fille se doit de puiser dans la profondeur de son éducation pour aimer le fils, lui donner le sourire. Accepter et gérer la présence de la mère.

Telle est la logique de la morale au Mogho.

 

Visitons maintenant le champ de la vérité. Le palais de notre monde moderne. De notre société où l’individualisme et l’égoïsme s’installent royalement. La relation parfois houleuse entre épouse et belle-mère est vieille comme la grande savane de Dunia. Elle ne s’est pas améliorée.

Pour la vieille femme, c’est une étrangère. Une intruse.

Pour la jeune femme, c’est une emmerdeuse. Une envahissante.

La solution pour une cohabitation pacifique est lointaine.

 

Quand les deux femmes d’un seul cœur se déchirent, se mettent en pièces, c’est un véritable calvaire pour l’homme. L’époux et le fils. Soutenir l’une, c’est s’attirer la foudre de l’autre. Ecouter la mère, c’est tuer l’amour de son épouse. Ecouter la femme, c’est assassiner l’amour maternel.

Au nom de la victime, au nom de la morale, au nom de cette vie éphémère, invitons les deux élues à  faire des concessions, à la tolérance. A accepter la logique.

 

Tout seul aux heures profondes de l’ombre, un homme réfléchit…

 

                                                              Ousseni Nikiema, langage de sourds

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