PREMIERE FEMME A LA TETE DE LA NAMIBIE : La fille du pasteur pourra-t-elle intercéder en faveur de ses compatriotes ?
L’histoire des femmes cheffes d’Etat en Afrique, a ouvert une nouvelle page avec l’élection annoncée, le 3 décembre 2024, par la Commission électorale, de Netumbo Nandi-Ndaitwah (NNN), à la tête de la Namibie. L’actuelle vice-présidente du pays, âgée de 72 ans, aurait remporté la présidentielle dès le premier tour, par le score de 57,31% face au leader du principal parti d’opposition, les Patriotes indépendants pour le changement (IPC), Panduleni Itula, qui arrive deuxième avec seulement 25, 50%. Même si ces résultats sont, pour l’instant, provisoires et restent donc à être confirmés, l’on peut se féliciter de cette victoire de NNN dans un pays d’Afrique, réputé pour être arriéré sur la problématique de l’égalité des sexes, surtout que ce triomphe intervient au lendemain de la défaite de Kamala Harris, une femme qui, dans la démocratie la plus avancée au monde, n’a pas fait le poids face à Donald Trump, en raison du conservatisme de l’électorat américain. Et si donc le genre n’a pas fait obstacle à l’ascension de Netumbo Nandi-Ndaitwah sur la marche la plus élevée de son pays, c’est parce qu’elle a véritablement le profil de l’emploi et qu’elle a utilisé à son profit, toutes les cartes qu’elle détenait. ?En effet, NNN a d’abord tiré profit de son statut de candidate du parti au pouvoir. Elle a, de ce fait, sans doute, bénéficié, non seulement de l’appui de l’appareil d’Etat aux mains de son parti depuis l’indépendance du pays, mais aussi du bilan de son prédécesseur, Hage Geingob empêché par la limitation constitutionnelle des mandats, d’être candidat à sa propre succession. Face à une opposition qui n’avait que des promesses comme projet de société, les Namibiens ont opté pour le réalisme. Mais au-delà de cet important avantage comparatif dont elle a su tirer profit face à son challenger, la vice-présidente a, durant toute la campagne, mis en avant son âge et son expérience comme gages de sagesse et de stabilité.
Le premier gage de la stabilité du pays qu’elle a promise à son peuple
Sans doute a-t-elle aussi profité de son statut de fille de pasteur dans un pays majoritairement chrétien et attaché à des valeurs conservatrices. Mais bien plus que tous ces atouts, elle a surtout bénéficié de son histoire, pour avoir été une figure de la lutte pour l’indépendance de son pays face au régime de l’apartheid de l’Afrique du Sud. Elle a, en effet, fait ses armes au sein de l’organisation de jeunesse du parti communiste soviétique, l’Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO), qui a porté l’étendard de la guerre d’indépendance de 1966 à 1990, date de l’indépendance du pays. C’est donc dire que l’histoire a fait la légitimité de cette femme qui a la stature d’homme au regard de tous les combats qu’elle a menés et remportés. Comme facteur de cette victoire de NNN, l’on peut aussi mentionner son projet de société bâti autour de deux thèmes principaux qui, en réalité, ne tiennent qu’en un seul : la création d’emplois dans un pays frappé fortement par le chômage et cela, grâce à l’attrait d’investisseurs étrangers qui pourraient exploiter sa principale richesse minière qu’est l’uranium. Cela dit, la victoire d’une femme à la présidentielle en Namibie, n’est pas sans rappeler les conditions dans lesquelles elle a été élue. L’on parle d’un véritable cafouillage électoral qui n’a pas permis à de nombreux Namibiens de jouir de leur droit de vote. Et cela, naturellement, pourrait poser un problème de crédibilité du scrutin et donc de légitimité de la nouvelle élue.
Le pays est, en effet, très riche en uranium, en diamant, en or et argent
En tout cas, c’est le premier défi que la fille du pasteur devra travailler à relever : doter son pays d’un système électoral fiable. C’est le premier gage de la stabilité du pays qu’elle a promise à son peuple. Et cela ne devrait pas être la mer à boire dans la mesure où la Namibie, largement désertique, est très faiblement peuplée. Le second défi que NNN devra relever, c’est de pouvoir ramener les inégalités sociales à des proportions acceptables dans le pays. La Namibie, selon la Banque mondiale, est le deuxième pays le plus inégalitaire de la planète. En effet, la répartition inégale des richesses entre la minorité blanche et la majorité noire, est des plus criardes. De nombreux aspects de la vie économique portent le sceau de ces inégalités : répartition des terres agricoles, accès à la santé, revenus, patrimoines, etc. Enfin, NNN devra apporter, dans la même veine, une réponse au chômage qui est endémique en Namibie avec un taux supérieur à 20%. La conséquence du fort taux de chômage, est la pauvreté qui demeure très élevée dans le pays avec comme conséquence, la prévalence d’une forte criminalité qui peut saper tous les efforts de développement du pays. Cela dit, si les défis à relever sont nombreux pour la première femme présidente en Namibie, le pays dispose d’énormes ressources qu’elle peut mettre à profit pour les surmonter. Le pays est, en effet, très riche en uranium, en diamant, en or et argent. Il dispose aussi d’énormes ressources agricoles, pastorales, halieutiques et touristiques. Il suffit donc à NNN de faire montre d’imagination pour tirer son pays qui a l’avantage de jouir d’une bonne stabilité politique, du cercle vicieux de la pauvreté et le lancer sur le chemin d’un développement équitable et partagé, brisant ainsi les chaînes persistantes de l’apartheid.
« Le Pays »