HomeFocusPRESIDENTIELLE TUNISIENNE :Va-t-on assister à un retour du bourguibisme ?

PRESIDENTIELLE TUNISIENNE :Va-t-on assister à un retour du bourguibisme ?


Après pratiquement quatre ans de transition, la Tunisie se remet progressivement sur les rails de la démocratie. En effet, hier 23 novembre 2014, les Tunisiens étaient appelés aux urnes pour élire leur président, celui-là qui présidera aux destinées du pays à l’issue du printemps arabe qui a emporté le satrape Ben Ali. Vingt-sept candidats sont en lice pour cette présidentielle ouverte et pluraliste, avec deux grands favoris : Béji Caïd Essebsi, 87 ans, dont le parti historique Nidaa Tounès a remporté les législatives de fin octobre, et le chef de l’Etat sortant, Moncef Marzouki, qui bénéficie de la prime au sortant pour avoir dirigé la transition jusqu’à son terme. La surprise vient du tout-puissant parti islamiste, Ennahda, qui a décidé de se retirer de la course à la présidentielle, alors même qu’il avait remporté le scrutin de 2011. Cela est d’autant plus surprenant qu’Ennahda a été aux devants de la révolution arabe qui a permis de renverser le régime de Ben Ali et qui, par dessus tout, est fortement représenté à l’Assemblée nationale. Peut-être les islamistes tunisiens comme les Frères musulmans d’Egypte sont-ils victimes de leurs propres turpitudes ; eux qui, selon toute vraisemblance, ont été à l’origine de la flambée de violence qui a secoué la Tunisie, avec en sus des assassinats politiques bien ciblés. C’est ceci donc qui pourrait expliquer cela. Car, conscient   que le peuple ne ratera pas l’occasion de le sanctionner dans les urnes, Ennahda a préféré renoncer à la course à la magistrature suprême, le temps de travailler à redorer son blason auprès des Tunisiens pour qui,  le parti islamiste excelle mieux dans la contestation que dans la gestion du pouvoir d’Etat.

Ce qui importe le plus, c’est l’intérêt supérieur du peuple tunisien

Cela dit, si avec la présidentielle de dimanche dernier, la page Ben Ali est en train d’être définitivement tournée, il en va autrement pour l’ancien président Habib Bourguiba qui, aux yeux des Tunisiens, incarne la modernité, l’ouverture et la laïcité. En effet, on a l’impression que la nostalgie du Bourguibisme, réinventé par Essebsi, habite toujours les Tunisiens. Cela se ressent beaucoup plus chez la femme tunisienne qui, sans relâche, se bat contre toute forme d’esclavage ou de servitude. Disons-le clairement, la femme tunisienne a toujours répondu présente à tous les combats. Elle n’a jamais voulu se laisser conter fleurette. C’est, du reste, grâce à son engagement que l’islamisme n’a pas pu s’implanter en Tunisie, notamment   en Egypte et en Libye voisines, pour ne citer que ces deux exemples-là. Reste donc à souhaiter que les résultats qui sortiront de cette élection soient acceptés par tous,  pour que le pays sorte définitivement de cette phase de transition qui n’a que trop duré. C’est bien là tout le défi. Car une chose est d’organiser des élections, une autre est de faire en sorte que celles-ci ne débouchent pas sur une crise avec son lot de violences, comme il est de coutume en Afrique. Du reste, ce qui importe le plus, ce n’est ni la victoire de Essebsi ni celle de Marzouki, mais plutôt l’intérêt supérieur du peuple tunisien qui, de dictature lasse, aspire à plus de liberté et de démocratie.

Boundi OUOBA


No Comments

Leave A Comment