HomeA la unePRESUMEES EXACTIONS CONTRE DES CIVILS AU MALI   : Que peuvent la CEDEAO et l’UA ?

PRESUMEES EXACTIONS CONTRE DES CIVILS AU MALI   : Que peuvent la CEDEAO et l’UA ?


Dans un rapport publié le 24 juillet dernier, l’Organisation non gouvernementale de défense des droits humains, Human Rights Watch, dénonce de nouveaux cas d’exactions qu’auraient commises l’armée malienne et ses supplétifs russes de Wagner contre des populations civiles. Elle interpelle l’Union africaine (UA) et la CEDEAO en leur demandant « d’accroître la pression sur les autorités maliennes pour qu’elles mettent fin aux graves abus commis par les forces armées maliennes et les présumés combattants affiliés au groupe Wagner ». Le moins que l’on puisse dire, c’est que les rapports des organisations de défense des droits humains se suivent et se ressemblent de même que les dénégations des autorités de la transition malienne qui, dans le cas d’espèce, dénoncent une enquête « à charge » visant à « accabler » l’armée malienne. Mieux, Bamako met en doute la « fiabilité » du rapport tout en démentant formellement le ciblage d’une ethnie particulière comme cela apparaît clairement dans ledit rapport.

 

De part et d’autre, il y a bien des choses à reprocher aux deux camps belligérants dans cette sale guerre

 

En attendant de voir les suites de l’enquête que le gouvernement malien se dit disposé à ouvrir suite à ces allégations, c’est un rapport accablant de plus, qui ternit davantage le blason des autorités de Bamako prises dans la tourmente d’une guerre asymétrique contre des forces obscurantistes qui ne sont pas plus respectueuses des droits humains. La preuve, quelque dix jours avant la production de ce rapport, la même organisation de défense des droits humains publiait un rapport sur les violences commises par les groupes terroristes au Mali. C’est dire si de part et d’autre, il y a bien des choses à reprocher aux deux camps belligérants dans cette sale guerre qui déchire le pays de Soundiata Keita depuis bientôt dix ans. C’est pourquoi l’on comprend que de guerre lasse d’accumuler les rapports restés sans suite, l’ONG américaine en appelle à l’UA et à la CEDEAO à l’effet d’exercer la pression sur Bamako pour que cessent les violations répétées des doits de l’Homme. En agissant de la sorte, Human Rights Watch est sans aucun doute dans son rôle. Mais à l’analyse, que peuvent la CEDEAO et l’UA face aux drames sécuritaires qui se jouent sur les bords du fleuve Djoliba ? De quels moyens coercitifs ces institutions continentale et régionale disposent-elles pour mettre la pression sur Bamako ? Des questions qui se posent d’autant plus avec acuité que les autorités intérimaires du Mali ne se reconnaissent pas dans les rapports de l’ONG internationale basée à New- York. Mais si l’on peut comprendre le sentiment à la limite de l’acharnement que peuvent ressentir les autorités intérimaires du Mali de plus en plus isolées après le départ des forces internationales dans cette guerre contre l’hydre à têtes multiples, cette façon d’être toujours sur la défensive et dans le déni permanent, interroge sur la volonté réelle des autorités de Bamako de corriger les erreurs de leurs combattants, étant donné qu’en la matière, il n’y a pas de guerre propre.

 

La CEDEAO et l’UA ne se sont pas toujours montrées à la hauteur des attentes des populations en matière d’assistance et de lutte contre les forces du mal

 

C’est pourquoi, pour autant que la CEDEAO et l’UA puissent changer quelque chose à la situation, cette interpellation de Human Right Watch ne paraît pas inopportune. Mais encore faudrait-il qu’au-delà de la légitimité d’agir dans ce sens, ces institutions africaines bénéficient de la confiance pleine et entière des autorités de Bamako. Ce qui semble loin d’être le cas.  Tant dans cette guerre contre le terrorisme qui est parti du Mali pour se métastaser dans toute la sous-région ouest-africaine, en dehors de quelques discours de circonstance, c’est peu de dire que la CEDEAO et l’UA ne se sont pas toujours montrées à la hauteur des attentes des populations en matière d’assistance et de lutte contre les forces du mal. Mais cela ne saurait justifier les violations répétées des droits de l’Homme ici reprochées aux forces armées maliennes et leurs supplétifs de Wagner. C’est pourquoi, aussi sujet à caution que puisse paraître ce rapport, le combat de  Human Right Watch a ici toute sa raison d’être. Et cette interpellation de ces institutions africaines sonne comme une illustration des limites objectives de l’ONG si ce n’est un aveu d’impuissance à faire bouger les lignes dans le sens souhaité sur le terrain. Mais en appelant l’UA et la CEDEAO à sévir contre le Mali, l’ONG américaine de défense des droits humains serait plus conséquente avec elle-même si elle déployait aussi de l’autre côté, son énergie à l’effet d’amener les groupes terroristes aussi à respecter des droits humains. Car, en matière de respect des droits humains, ce qui vaut pour Pierre doit aussi valoir pour Paul.

 

 « Le Pays » 


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