HomeA la unePROCES DE BLAISE COMPAORE ET DE SON DERNIER GOUVERNEMENT: Le dossier renvoyé au 4 mai prochain

PROCES DE BLAISE COMPAORE ET DE SON DERNIER GOUVERNEMENT: Le dossier renvoyé au 4 mai prochain


Le procès du dernier gouvernement de Luc Adolphe Tiao, dernier Premier ministre du Burkina Faso sous le régime de Blaise Compaoré, a débuté le 27 avril 2017 à Ouagadougou. La plupart des ministres mis en accusation étaient présents. Excepté quelques-uns, dont Blaise Compaoré, ministre de la Défense et des anciens combattants au moment des faits. Luc Adolphe Tiao et les membres de son gouvernement sont accusés des faits suivants : « coups et blessures, complicité de coups et blessures, assassinat et complicité d’assassinat ». Gilbert Diendéré, Chef d’état-major particulier de la Présidence du Faso, et chargé de la sécurité du président Blaise Compaoré, le Général Honoré Traoré, Chef d’état-major général des armées d’alors, et Hervé Ouattara, président du Collectif anti-référendum (CAR) au moment des faits, seront entendus dans ce procès à titre de témoins. L’audience tant attendue a été renvoyée au 4 mai prochain, à la demande du bâtonnier, Me Mamadou Savadogo, afin de permettre aux avocats de prendre part à la rentrée du Barreau du Burkina Faso qui se tient du 27 au 29 avril 2017 à Ouagadougou. Mais avant que le président de la Haute cour de justice, Mathieu Ouédraogo, ne prononce ce renvoi, l’ambiance était lourde dans la salle du Tribunal de grande instance (TGI) de Ouagadougou.

Dès 8h, heure locale, parents, amis, camarades politiques des mis en cause et autres citoyens ont investi la salle d’audience du Palais de Justice de Ouagadougou pour suivre le procès des membres du dernier gouvernement de Luc Adolphe Tiao, poursuivis dans le cadre de la répression des manifestations lors de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014. Mais pour avoir accès à la salle d’audience, tous doivent montrer patte blanche.
A noter que deux anciens ministres bénéficient d’un non-lieu, pour non-participation à ce fatidique conseil des ministres. Il s’agit de Yacouba Ouédraogo, ex- ministre des Sports et des loisirs, et Clotilde Ky, ministre délégué chargée du Budget. Ce sont au total 30 ministres dont l’ex-président du Faso, Blaise Compaoré, qui sont attendus à la barre. Ils sont poursuivis pour « coups et blessures, complicité de coups et blessures, assassinat et complicité d’assassinat ». Alors que la salle grouillait de monde, Luc Adolphe Tiao et plusieurs membres de son gouvernement font leur entrée. Il n’en fallait pas plus pour que photographes et autres preneurs d’images se ruent sur eux pour immortaliser l’instant. Aux environs de 9h, c’était au tour des membres de la Haute Cour de justice de faire leur entrée dans la salle. Parmi eux, plusieurs députés de la majorité présidentielle, de l’opposition y compris le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), l’ex-parti au pouvoir, et les magistrats. Après leur installation, commence alors l’appel nominatif des mis en cause. Nombreux sont les anciens ministres qui étaient présents. D’autres, par contre, ont brillé par leur absence. Parmi eux, l’ancien président du Faso, Blaise Compaoré, qui occupait également le poste de ministre de la Défense, Salif Lamoussa Kaboré, ex-ministre des Mines, de l’énergie et des carrières, Lucien Marie Noël Bembamba, ex-ministre de l’Economie et des Finances, Koumba Boly/Barry, ex-ministre de l’Education nationale, Assimi Kouanda, ex-ministre d’Etat chargé de mission auprès du président du Faso, Tinga Jérémy Ouédraogo, ex-ministre des Ressources animales. Il est reproché aux 30 anciens ministres d’avoir, au cours du conseil extraordinaire des ministres du 29 octobre 2014, pris une réquisition complémentaire spéciale faisant appel à l’armée pour maintenir l’ordre avec usage d’armes à feu. Certains des avocats étaient aussi présents dans la salle d’audience du TGI de Ouagadougou. En ce qui concerne les avocats de la défense, on peut citer, entre autres, Pr Abdoulaye Soma, Me Pacéré Titenga. Deux ex-ministres, à savoir Baba Hama et Diemé Hama ont souhaité ne pas se faire assister par un conseil. Toute chose que le Pr Abdoulaye Soma récuse au motif que la nature des accusations impose un avocat conseil à chaque mis en cause. Après l’appel nominatif des accusés, c’était au tour du Président de la Haute cour de justice de vérifier la présence des témoins. Ont répondu présents, le Général Gilbert Diendéré, ex-chef d’état-major particulier de la Présidence du Faso et chargé de la sécurité du président Blaise Compaoré, Honoré Nabéré Traoré, ancien chef d’état-major général des armées, Hervé Ouattara, président du Collectif anti-référendum (CAR). Après vérification de la présence des uns et des autres, s’en est suivie la lecture de la requête du bâtonnier par le président de la Cour, Mathieu Ouédraogo. Cette requête, dit-il, demande le renvoi du dossier à une date ultérieure afin de permettre aux avocats de défendre sereinement leur dossier. Après concertation, la date du 3 mai 2017 est proposée, mais les avocats des mis en cause souhaitent avoir plus de temps. C’est ainsi qu’ils proposent qu’on leur donne deux semaines pour se préparer. Après discussions entre juges et avocats, c’est finalement la date du 4 mai prochain qui est retenue.

Issa SIGUIRE et Françoise DEMBELE

 

Ils ont dit

Victor Pahoulabou, président des familles des victimes de l’insurrection populaire et du coup d’Etat manqué de septembre 2015

« Nous attendons que justice soit rendue à nos martyrs »

« Nous sommes vraiment contents d’apprendre que ces dossiers ont fini par être ouverts. La plupart des accusés étaient là, sauf le gros poisson. Nous espérons que le droit sera dit. Il est vrai que nous sommes les familles des martyrs, mais le peuple burkinabè dans son ensemble attend que le droit soit dit. C’est tout une foule qui est sortie les 30 et 31 octobre 2014 pour chasser le dictateur. Ils ont ordonné et les autres ont tiré sur la foule ; les jeunes qui n’ont pas eu la chance sont tombés sous les balles. Il y a eu également plus de 600 blessés. Ce procès concerne donc tout le peuple burkinabè. Nous attendons que justice soit rendue à nos martyrs. »

Boukari Konombo, président du mouvement Brassard noir, ancien député du CNT

« C’est avec un sentiment de joie que nous accueillons l’ouverture de ce procès »

« Sans la justice et la vérité, on ne peut pas construire quelque chose de solide. C’est avec un sentiment de joie que nous accueillons l’ouverture de ce procès ce matin, pour savoir enfin qui a donné l’ordre et qui a tiré sur nos camarades. Nos camarades ont seulement usé de leur droit constitutionnel et on les a tués. »

Jonathan Tapsoba, ancien député CNT, président de la Synergie nationale pour les personnes en situation de handicap

« On saura qui a donné l’ordre de tirer sur cette brave population du Burkina »

« C’est un sentiment de joie qui m’anime aujourd’hui. On saura qui a donné l’ordre de tirer sur cette brave population du Burkina. Cette population qui a décidé de manifester pour que l’Etat de droit soit respecté au Burkina. On sent maintenant que les institutions judiciaires fonctionnent  et qu’on a un début de mouvement vers la réconciliation. Le premier pas vers la réconciliation, c’est la verité et la justice. »

Aziz Dabo, Secrétaire national adjoint de la NAFA

«  Mon souhait est que la justice soit équitable »

« Mon souhait est que la justice soit équitable, une justice pour tous et que ce ne soit pas une justice des vainqueurs contre ceux qui ont perdu. De là, partira le socle d’un Burkina de demain. Il y a l’opinion publique nationale comme internationale qui observe ce procès avec un grand intérêt, et le Burkina doit démontrer à toute cette opinion-là, que nous sommes prêts pour une vraie démocratie, pour une justice équitable pour tous. Je souhaite que tous les Burkinabè, main dans la main, aillent à une vraie réconciliation. »

Safiatou Lopez, responsable d’OSC

« Nous ne croyons en rien du tout »

« Nous sommes venus parce que nous avons un camarade de lutte qui a été cité comme témoin. Nous sommes venus pour le soutenir moralement, pour qu’il sache que dans tous les cas, nous sommes là. Nous avons lutté ensemble, nous avons failli mourir ensemble, mais Dieu nous a épargnés. Nous suivons de près la suite. Au regard de ce que nous avons vu ces derniers temps, où des cliniques ont été transformées en chambres d’hôtel pour certains, nous ne croyons en rien du tout. Si la vérité sort et qu’il y a justice, nous allons dire merci à Dieu. Nous ne pouvons pas prendre de décision, parce que nous ne sommes que des citoyens. Tout ce que nous pouvons faire, c’est de dénoncer. »

Salifou Tahita, secrétaire national adjoint à la mobilisation de la jeunesse du CDP

« Nous voulons une justice impartiale »

« L’ouverture de ce procès répond à un besoin. Un besoin parce qu’après l’insurrection populaire, le peuple demande la justice. La justice est un élément clé dans le processus dans lequel nous sommes engagés. Pour nous, c’est un début de réconciliation à travers ce procès. Nous voulons qu’à cet instant T, la justice soit dite. Une justice impartiale pour tous. C’est un point de départ pour que les Burkinabè puissent se parler en face. »

Propos recueillis par Issa SIGUIRE

 

La liste des 26 anciens membres du gouvernement qui devraient être devant la Haute Cour de justice le 27 avril 2017

1- Luc Adolphe Tiao, Premier ministre
2. Ministre d’Etat, ministre chargé des Relations avec les Institutions et des Réformes politiques : Monsieur Bongnessan Arsène Yé
3. Ministre d’Etat, Ministre des Affaires étrangères et de la coopération régionale : Monsieur Yipènè Djibrill Bassolé
4. Ministre de l’Administration territoriale et de la sécurité : Monsieur Jérôme Bougouma
5. Ministre de la Justice, garde des sceaux : Monsieur Dramane Yaméogo
6. Ministre de l’Agriculture et de la sécurité alimentaire : Monsieur Mahama Zoungrana
7. Ministre de l’Industrie, du commerce et de l’artisanat : Monsieur Patiendé Arthur Kafando
8. Ministre de la Communication, Porte-parole du Gouvernement : Monsieur Alain Edouard Traoré
9. Ministre de la Promotion de la Femme et du Genre : Madame Nestorine Sangaré/Compaoré
10. Ministre de la Culture et du tourisme : Monsieur Baba Hama
11. Ministre des Infrastructures, du désenclavement et des transports : Monsieur Jean Bertin Ouédraogo
12. Ministre de la Santé : Monsieur Lené Sebgo
13. Ministre de L’Habitat et de l’urbanisme : Monsieur Yacouba Barry
14. Ministre des Enseignements secondaires et supérieur : Monsieur Moussa Ouattara
15. Ministre de la Fonction publique, du travail et de la sécurité sociale : Monsieur Vincent Zakané
16. Ministre de la Recherche scientifique et de l’innovation : Monsieur Gnissa Isaïe Konaté
17. Ministre de l’Environnement et du développement durable : Monsieur Salif Ouédraogo
18. Ministre de la Jeunesse, de la formation professionnelle et de l’emploi : Monsieur Basga Emile Dialla
19. Ministre de l’Eau, des aménagements hydrauliques et de l’assainissement : Madame Mamounata Bélem/Ouédraogo
20. Ministre du Développement de l’économie numérique et des postes : Monsieur Jean Koulidiati
21. Ministre de l’Action sociale et de la solidarité nationale : Monsieur Alain Zoubga
22. Ministre des droits humains et de la promotion civique : Madame Prudence Julie M. N. K. Nigna/Somda
23. Ministre de l’Aménagement du territoire et de la décentralisation : Monsieur Toussaint Abel Coulibaly
24. Ministre Délégué auprès du Ministre des Affaires étrangères et de la coopération régionale, chargé de la coopération régionale : Monsieur Thomas Palé
25. Ministre Délégué auprès du Ministre de l’Education nationale et de l’alphabétisation, chargé de l’alphabétisation : Monsieur Amadou Diemdioda Dicko
26. Ministre Délégué auprès du Ministre des Infrastructures, du désenclavement et des transports, chargé des transports : Monsieur Baba Diémé

 

La composition de la Haute Cour de Justice installée le 4 mars 2016

Les membres désignés par l’Assemblée nationale
Titulaire 1 : Ouédraogo B. Mathieu
Suppléant 1 : Taondyandé Frédéric Benoît
Titulaire 2 : Ouédraogo Abdoul Rasmané
Suppléant 2 : Barry Boureima
Titulaire 3 : Ouédraogo/ Zongo Marie Isabelle
Suppléant 3 : Nabié Nimayé
Titulaire 4 : Sankara Bénéwendé Stanislas
Suppléant 4 : Bonkoungou Issa Anatole
Titulaire 5 : Compaoré Justin
Suppléant 5 : Somé Ollo Ferdinand
Titulaire 6 : Bonkoungou Juliette

Il faut noter que le député Salifou Sawadogo du CDP qui est inculpé dans le dossier du coup d’état de septembre 2015 a été remplacé à l’Assemblée nationale par Kibsa Charles Niédogo.

Membres désignés par la Cour de cassation
Jean Kondé
Daniel Kontongomé
Elisabeth Bado

 


Comments
  • D’abord, il faut savoir que les Burkinabé ont intériorisé l’Insurrection Populaire des 30 et 31 octobre 2014 qui a chassé l’ex-Président Blaise Compaoré et son régime constitue un événement historique et social majeur dans l’histoire politique et social du peuple Burkinabé, et même dans une certaine mesure celle de l’Afrique. Les crimes de sang commis à l’occasion de l’Insurrection populaire et ceux du Coup d’Etat du Général Diendéré qui, vont être jugés à partir du 4 Mai 2017 par la Haute Cours de Justice ne seront qu’une infime partie des affaires politico-judiciaire qui attendent. En outre, le Procureur du Faso près le Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou doit savoir et considérer que des « Dossiers de crimes économiques transmis par l’ASCE/LC courant 2016 » ne sont qu’une partie à notre sens des crimes et affaires économiques et financières dans lesquels le peuple Burkinabé est lésé. Du reste, tous les crimes économiques et de sang commis depuis le 15 octobre 1987 au 31 octobre 2014, ne sauraient être passés par pertes et profits et doivent être jugés comme il se doit et « la loi doit être appliquée sans passion mais dans toute sa rigueur ». De plus, les dirigeants actuels de l’Etat, doivent en prendre conscience et travailler dans ce sens sinon l’Histoire pourrait être un éternel recommencement car la Jeunesse Burkinabé consciente ne laissera pas son avenir hypothéqué par une certaine élite nationale. Enfin, « l’indignation des peuples devant l’injustice et l’impunité pourrait se transformer en des Révolutions Sociales » Courage et Salut !

    29 avril 2017

Leave A Comment