HomeA la unePROJET DE LOI PORTANT MODIFICATION DE LA CONSTITUTION : « Ce que le gouvernement vient de faire est qualifié (…) de fraude à la Constitution », dixit Karim Sango, juriste

PROJET DE LOI PORTANT MODIFICATION DE LA CONSTITUTION : « Ce que le gouvernement vient de faire est qualifié (…) de fraude à la Constitution », dixit Karim Sango, juriste


Dans l’analyse ci-dessous, le juriste Abdoul Karim Sango qualifie le projet de loi portant révision de la Constitution, en vue de la convocation du référendum pour sauter le verrou limitatif du nombre de mandats présidentiels, de coup d’Etat constitutionnel. Lisez !

 

Le 21 octobre 2014, le gouvernement a décidé, à l’initiative du président Compaoré, de soumettre un projet de loi portant modification de l’article 37. Sans en connaître la teneur exacte, je puis affirmer sans me tromper que l’objet de cette révision va consister à modifier l’article 37 pour permettre à l’actuel président Compaoré, au terme de 28 ans de pouvoir, de se représenter. Ses partisans qui ont animé un point de presse hier, l’ont affirmé. Ce projet de loi opère un changement anticonstitutionnel au sens de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance signé en 2001 et ratifié par notre pays en 2010. Nous sommes, dans le cas d’espèce, dans un coup d’Etat constitutionnel. En faisant appel au titre XV de la Constitution, le gouvernement sème la confusion dans l’opinion, notamment l’opinion internationale. En effet, les Burkinabè savent très bien qu’il n’y a rien de légal dans cette opération. Non! Cette opération de modification de la Constitution n’est en rien légale. Ce que le gouvernement vient de faire est qualifié par les juristes constitutionnalistes de fraude à la Constitution. En effet, une Constitution, ce n’est pas seulement la lettre, mais c’est surtout l’esprit qui est fondamental. La procédure du titre XV n’a pas été prévue pour servir des intérêts personnels. Or, ce qui vient de se passer le 21 octobre dernier, consiste à utiliser un mécanisme légal pour assouvir des intérêts personnels. En droit administratif, on parlerait de détournement de pouvoir.

Aucun juriste digne de ce nom ne va se contenter purement et simplement de la lettre d’un article de la Constitution pour en faire une interprétation. Si le rôle du juriste ne consistait qu’en cela, il n’aurait pas été utile de faire des études de droit, tant l’exercice serait facile. Voilà pourquoi on a assisté ces temps-ci, à la naissance de génération spontanée de juristes. “Il faut interpréter la Constitution en la considérant comme un tout. Isoler les articles pour les interpréter conduit souvent à un non sens juridique. » En combinant divers articles de la Constitution, les auteurs du présent projet de révision de la Constitution auraient compris son inconstitutionnalité. « Il faut interpréter l’article 37 à la lumière des articles 165, 167 et 168 de notre Constitution, sans oublier aussi les engagements régionaux ou internationaux. » Mais ceux qui ont décidé de passer par la force n’ont cure du droit! C’est pourquoi ils feignent d’ignorer que notre constitution consacre la forme républicaine de l’Etat et proscrit toute idée de pouvoir personnel. Comment permettre au président Compaoré de se représenter sans violer ces deux principes constitutionnels? On nous répondra que le peuple n’est pas obligé de le voter.

Ce n’est peut être pas faux, mais dites-moi comment celui qui prend autant de libertés avec la Constitution peut-il encore garantir l’organisation d’un scrutin crédible et transparent ? Il ne s’agit pas de dire que les élections sont organisées par une CENI. Une élection crédible et transparente, ce n’est pas seulement l’organe en charge des élections, c’est tout un dispositif qui, hélas, n’existe pas encore dans ce pays.

Les auteurs ou complices de la forfaiture en préparation devront répondre de leurs actes aujourd’hui ou demain. Au sens de notre Constitution, ils viennent ainsi de commettre l’infraction de trahison de la patrie et de l’atteinte à la Constitution: qui sont les crimes les plus graves que l’on peut commettre contre un peuple. Hélas, notre pays s’enfonce inéluctablement dans l’abîme. En effet, maintenant que le gouvernement lui-même a décidé de sortir de la légalité, on voit difficilement comment on pourra exiger des Burkinabè que ceux-ci respectent les lois de la République. Cependant, il n’y a pas de raison de désespérer. Monseigneur Anselme Sanou disait des Burkinabè en 2005, qu’ils n’étaient pas des ressorts amortis. Les Burkinabè ont démontré à plusieurs reprises leur capacité à résister contre les lois iniques. Nous devons rester mobilisés et très bien organisés pour empêcher à tout  prix que notre pays ne se transforme en une monarchie permettant l’« exercice d’un pouvoir personnel ». L’histoire nous enseigne que les dictatures les plus féroces ont toujours capitulé face à la détermination des peuples organisés !

 

Abdoul Karim SANGO

Juriste


Comments
  • Vous n’êtes pas cohérent avec vos écrits.

    23 octobre 2014
  • Blaise est pire que Balla le Pétrolier.Ballla le Pétrolier à braqué des stations d’essence et des pharmacies.Blaise braque tout un pays. C’est ” Balla le Pétrolier son grand-frère” comme disent les ivoiriens, c’est-à-dire que Balla le Pétrolier a été son élève.

    24 octobre 2014

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