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REFORESTATION AU BURKINA


Les bilans des campagnes de reforestation indiquent que pour la période 2002-2016, les acteurs de la lutte contre la déforestation ont produit 9 525 105 plants par an et reboisé en théorie 10 428 ha. L’autre révélation sur laquelle l’on peut s’arrêter, parce qu’elle interpelle, est la suivante : la majeure partie de ces plantations ne bénéficient pas de mesures de protection et d’entretien appropriées si fait que les plantes ne subsistent pas toujours. Résultat, moins de 25% de ces plantes survivent dès la 2e année. Ces chiffres sont ceux du ministère de l’Environnement. Ils ont été révélés à l’occasion des états généraux dudit département, tenus les 11 et 12 juillet 2019. Et le moins que l’on puisse en dire c’est que, pour lutter contre la déforestation, le tout n’est pas de planter des arbres. Encore faut-il savoir les entretenir. C’est cette précaution qui est le cadet des soucis des Burkinabè. En effet, chaque saison des pluies que Dieu fait, des opérations tous azimuts de plantation d’arbres sont réalisées à coups de millions de F CFA et de médiatisation hors norme, chacun voulant être vu en train de mettre des plants en terre. Après, on ne se préoccupe pas de savoir ce que deviennent ces malheureux plants. Pour un véritable gâchis, c’en est un. Mais que voulez-vous ? L’activité nourrit son homme. En effet, bien des Organisations non-gouvernementales sont disposées à délier les cordons de la bourse pour accompagner toute opération entrant dans le cadre de la protection de l’environnement. Il suffit donc de monter un dossier dans ce sens et de le leur soumettre dans la perspective de son financement. Et le tour est joué. Le financement obtenu, on fait tout sauf ce pour quoi les fonds ont été alloués. Ces pratiques sont le partage de bon nombre d’associations qui interviennent dans le domaine de la protection de l’environnement et plus particulièrement en matière de reboisement. Pendant ce temps, de braves hommes, à l’image du vieux Yacouba Sawadogo du Yatenga, qui ont fait de la lutte contre la déforestation, le credo de leur vie, ne sont pas toujours soutenus à la hauteur de leurs efforts.

Au-delà du gouvernement, c’est toute la communauté nationale qui doit prendre conscience que l’arbre, c’est la vie

Il revient donc au gouvernement et aux ONG qui financent les activités de reboisement, de savoir distinguer le bon grain de l’ivraie. Le premier a l’obligation de faire une cartographie de toutes les associations qui interviennent dans le domaine afin de leur soumettre des cahiers de charges avant toute opération d’envergure de plantation d’arbres. Les bailleurs de fonds doivent avoir le souci de vérifier sur le terrain si leurs financements ont été effectivement utilisés pour planter des arbres et assurer leur protection. Le ministère a eu le mérite, lors de ses états généraux, d’avoir mis le doigt sur la plaie, chiffres à l’appui, mais il faut aller au-delà si tant est que le souci est de mettre en place une politique de reforestation qui ne fait pas dans la simulation. L’on peut par exemple lui suggérer d’opter pour la formule « un village une forêt ». Cette opération pourrait consister à délimiter des sites de
reboisement par village. La deuxième étape est d’approvisionner ces villages en plants qui conviennent à leur climat. Et pour encourager les populations à l’entretien des sites reboisés, on pourrait avoir un fonds pour récompenser les meilleurs villages qui mettent un point d’honneur à entretenir les arbres plantés. A défaut d’opter pour cette formule, le ministère pourrait tout mettre en œuvre pour encourager les initiatives privées de reboisement d’envergure. La situation, en tout cas, exige que l’on change notre façon de faire en matière de reboisement. Au-delà du gouvernement, c’est toute la communauté nationale qui doit prendre conscience que l’arbre, c’est la vie. Ce faisant, chacun comprendra qu’il a une partition à jouer dans la restauration du couvert végétal de notre pays. La Révolution avait eu le mérite de mettre en place une politique volontariste de protection de l’environnement. L’on se souvient, en effet, qu’à cette époque, le gouvernement avait initié la politique dite des « 3 luttes » : la lutte contre la divagation des animaux, la lutte contre la coupe abusive du bois et la lutte contre les feux de brousse. Bien sûr, tout n’était pas parfait, à l’époque, mais on pouvait percevoir un engagement fort au sommet de l’Etat à lutter contre la déforestation. L’on pouvait également percevoir une implication des populations à la base, pour reverdir le Burkina. A l’époque, on dépensait peu mais on réalisait des performances en matière de reboisement. Aujourd’hui, on investit beaucoup d’argent dans les compagnes de reboisement pour les résultats que l’on sait. A l’heure où la communauté internationale est disposée à promouvoir l’économie verte dans les pays, il revient à l’Etat de savoir profiter de ces opportunités pour véritablement reverdir le Burkina. Et une bonne politique de l’arbre est indispensable pour parvenir à cet objectif. Dans ce combat, il y a la nécessité d’associer les établissements d’enseignement. Quant on fait un répertoire des enceintes scolaires les plus reboisées, on peut faire le constat que les vieux établissements tiennent la tête du peloton. Cette particularité traduit le fait que le reboisement était la chose la plus partagée chez les autorités éducatives de l’époque. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Faites un tour dans les établissements scolaires nouvellement construits et vous serez édifiés. On y plante rarement des arbres et le peu d’arbres plantés agonisent, faute d’entretien.

Sidzabda


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