HomeA la uneREPRISE DE LA VILLE DE MENAKA PAR DES MILICES PRO-BAMAKO : De la défensive à l’offensive

REPRISE DE LA VILLE DE MENAKA PAR DES MILICES PRO-BAMAKO : De la défensive à l’offensive


 

Ménaka, cette localité du Nord-Est du Mali, qui était dans le giron du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) depuis près d’un an, a été conquise le lundi 27 avril 2015 dernier par les milices d’autodéfense du Gatia, connues pour être proches de Bamako. Il n’en fallait pas plus pour susciter l’ire des responsables de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) et plus particulièrement ceux de sa principale composante, le MNLA. En effet, dans un communiqué diffusé peu après la chute de Ménaka, la CMA a qualifié cet assaut de grave violation des accords de cessez-le-feu de mai et juillet 2014. Par ailleurs, la CMA note que la prise de Ménaka par les milices pro-Bamako est susceptible de l’amener à reconsidérer son engagement ferme de parapher l’accord de paix d’Alger le 15 mai prochain. Cet engagement, selon la CMA, était d’autant plus ferme que  Bamako serait disposé à ouvrir des discussions sur les points de blocage de l’accord de paix avant sa signature définitive. Cela dit, la prise de Ménaka pourrait être décryptée de la manière suivante :

D’abord, elle traduit le fait que la CMA et notamment le MNLA sont devenus vulnérables et ce, depuis que la communauté internationale, visiblement agacée par les atermoiements des irrédentistes touareg et de leurs alliés, s’est engagée à soutenir fermement l’accord de paix d’Alger. De ce fait, et par des mots univoques, elle avait invité pour ne pas dire sommé la CMA de parapher le document d’Alger. Pour ne l’avoir pas encore fait, l’on voit mal aujourd’hui la coordination entreprendre des actions militaires à l’effet de reprendre le contrôle de Ménaka. Car la puissante Algérie voisine pourrait en profiter pour lui faire payer son refus osé de valider le schéma de sortie de crise que sa diplomatie a patiemment et laborieusement élaboré.

Le MNLA est au carrefour de son destin

Ensuite, un autre élément qui traduit la vulnérabilité de la CMA, et particulièrement le MNLA, est lié au fait qu’au sein même de la Coordination, le MNLA et ses alliés ne sont pas loin du divorce. Les seconds reprochant au premier, c’est-à-dire le MNLA, le jusqu’au- boutisme dont il fait preuve à propos des pourparlers inter- maliens. De ce point de vue, l’on peut dire que le MNLA est en passe de se retrouver seul contre tous.

Enfin, l’on peut interpréter la prise de  Ménaka par le Gatia par le fait que Bamako a voulu, par cet acte qui, de toute évidence n’est pas pour lui déplaire,   signifier qu’il est en train de reprendre du poil de la bête dans la sempiternelle guerre qui l’oppose au MNLA à propos du statut du Nord-Mali. De la position défensive où il était, il est donc passé à l’offensive. Cette stratégie militaire peut contraindre la CMA et notamment sa principale composante le MNLA, à revoir à la baisse le projet politique qu’il  a toujours porté à propos de l’Azawad. En effet, à l’approche de la date butoir pour parapher l’accord de paix d’Alger, ce revers militaire, si l’on peut l’appeler ainsi, pourrait placer la CMA dans une position où elle n’a pas d’autre choix que celui de faire profil bas. Et ce ne serait pas étonnant. Car  les rapports de force du moment, surtout avec la prise sans résistance de Ménaka,  ne sont pas visiblement en sa faveur. Tout cela fait dire que le MNLA n’est pas dans une position confortable aujourd’hui. Et c’est un euphémisme que de le dire ainsi. La réalité est que le MNLA est au carrefour de son destin et il gagnerait à faire l’option de la paix et du vivre-ensemble dans le cadre, comme le souhaite tout le monde, d’un Mali unique et indivisible. Toute autre attitude lui sera suicidaire. Car tout le monde est fatigué de cette guerre, y compris ceux qui nourrissaient, de par le passé, de la sympathie à son endroit. Le MNLA est en panne d’arguments aujourd’hui pour défendre son projet politique initial maintes fois affirmé d’un Azawad indépendant. Toutefois, l’on peut dire que le MNLA cherche depuis toujours des alibis pour ne pas parapher l’accord de paix d’Alger. Et la prise de Ménaka par les milices d’autodéfense pro-Bamako du Gatia pourrait lui en offrir un.

Pousdem PICKOU


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