HomeA la uneDENONCIATION DE LA MORT DANS DES PRISONS MILITAIRES DE MEMBRES PRESUMES DE BOKO HARAM AU NIGERIA : Amnesty international est dans son rôle

DENONCIATION DE LA MORT DANS DES PRISONS MILITAIRES DE MEMBRES PRESUMES DE BOKO HARAM AU NIGERIA : Amnesty international est dans son rôle


Amnesty International a une fois encore haussé le ton contre le Nigeria, suite à la mort en détention de 150 membres présumés de Boko Haram dans la prison militaire de Giwa, au Nord-Est du pays. Ce n’est pas la première fois qu’Amnesty dénonce des violations de droits de l’Homme par l’armée nigériane dans sa guerre contre les terroristes, mais son rapport publié mercredi dernier est des plus poignants, puisqu’il fait état de la mort, dans des conditions atroces, d’enfants et même de bébés. Certes, avec la cruauté des hommes d’Aboubakar Shekau et les multiples revers qu’elle a subis, on peut comprendre la propension de l’armée nigériane à se défausser même sur des individus désarmés et présumés innocents, mais de là à réserver des traitements inhumains à des nourrissons injustement raflés avec leurs parents, il y a un seuil de l’horreur que la soldatesque a tragiquement franchi. On aurait volontiers reconnu des circonstances atténuantes à cette armée prétendument la plus puissante de l’Afrique de l’Ouest si elle s’était limitée à infliger de sévères punitions aux terroristes de Boko Haram aux fins d’arracher des informations pouvant permettre de mettre Shekau et ses diablotins hors d’état de nuire. Les condamnations de principe et les rodomontades des mouvements des droits de l’Homme n’auraient pas à ce moment-là ému grand monde, car on sait que les adeptes de Shekau ne font pas dans la dentelle quand il s’agit de massacrer même leurs coreligionnaires. D’ailleurs, beaucoup de voix s’élèvent aujourd’hui à travers le monde pour demander la légalisation ou à tout le moins la légitimation de la peine de mort contre tous ceux qui commettent gratuitement les crimes les plus abjects pour des raisons souvent inavouables. Dans le cas du Nigeria, Aboubakar Shekau et ses hommes ont démontré plus d’une fois qu’en matière de barbarie, ils ont de l’expertise à revendre, mais faut-il pour autant revenir à la juste réciprocité du crime et de la peine avec la loi du Talion symbolisée par l’expression œil pour œil, dent pour dent ?

 

Un juste milieu devrait être trouvé

 

Nous répondrons avec Amnesty International par la négative, non seulement parce que la mise à mort, quelle que soit sa forme, annihile toute possibilité de repentance et de réhabilitation pour la victime, mais aussi parce qu’elle ne produit pas l’effet dissuasif souvent escompté. Elle contribue plutôt à radicaliser les plus modérés, comme ce fut le cas de nombreux adeptes de la secte islamiste nigériane après l’exécution sommaire de son chef historique en 2009, Muhammed Yussuf. C’est donc pour toutes ces raisons que l’acte que l’armée nigériane est soupçonnée d’avoir commis dans les casernes de Giwa est, au-delà de son caractère « poignant et horrifiant » pour reprendre les termes du directeur Afrique d’Amnesty International, d’une stupidité stratégique incroyable car, si l’objectif était de marquer les esprits et de présenter le bilan macabre de 150 prisonniers morts comme un trophée de guerre pour s’attirer la sympathie des populations locales et de la communauté internationale, le moins qu’on puisse dire est que le pari est loin d’être gagné. Et Amnesty International, qui est bien dans son rôle en dénonçant le recours à la torture systématique voire aux exécutions extra-judiciaires dans les casernes nigérianes, devra accentuer davantage la pression afin que les autorités d’Abuja prennent les mesures qui seyent dans le sens d’éviter aux soldats victimes de l’épuisement moral face à l’exposition au risque de mourir, la tentation de commettre des extrémités comme celles de Giwa, en guise de représailles contre la secte islamiste.  

En tout état de cause, un juste milieu devrait être trouvé, qui permette à l’armée nigériane de continuer  à engranger des victoires contre Boko Haram et qui ne bafoue pas de façon aussi tragique la sacralité de la vie humaine.

 

Hamadou GADIAGA


Comments
  • Ce qui est sur, c’est que Amnesty International est lui même un bras de l’Empire. Qui est utilisé très habilement.

    17 mai 2016

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