HomeA la uneRETOUR DES VIEUX DEMONS DANS LE DELTA AU NIGERIA : Pourquoi maintenant ?

RETOUR DES VIEUX DEMONS DANS LE DELTA AU NIGERIA : Pourquoi maintenant ?


Les attaques contre les installations pétrolières au Nigeria sont légion. Mais celle dont l’installation offshore du groupe pétrolier américain Chevron a été victime dans le Sud du Nigeria le 4 mai dernier, se singularise par la nature de ses auteurs.  En effet, cette attaque a été revendiquée par « Les vengeurs du Delta du Niger ». Assiste-t-on  à un réveil des vieux démons dans cette partie du Nigeria ? On n’aurait pas tort de le penser.  Toujours est-il que cette attaque n’est pas pour faciliter la tâche au président Muhammadu Buhari. En effet, depuis son élection en mars dernier, le général se bat comme un beau diable contre la corruption et la secte islamiste Boko Haram. Voilà qu’il doit maintenant faire face à un nouveau front. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le mandat de Buhari ne sera pas de tout repos. Car, on a le sentiment que depuis son arrivée à la tête du pays, les problèmes se multiplient. Et il devrait avoir des soucis à se faire. Il a hérité d’un pays où la corruption et le banditisme ont atteint des proportions inquiétantes. Malgré son statut de première puissance économique africaine, le Nigeria reste un géant aux pieds d’argile. Il faut bien le dire, le pays d’Obasanjo est malade au sens propre comme au figuré. D’abord, à cause de son gigantisme, ensuite à cause de son fédéralisme et enfin en raison de son surpeuplement. Il urge donc de repenser son fédéralisme pour plus d’autonomie économique des fédérations. Il est aussi plus que nécessaire de revoir la gestion des fonds générés par la manne pétrolière. Du reste, on a l’impression que ce pétrole qui devait faire le bonheur du pays, est en passe de devenir pour lui une malédiction. Cela est d’autant plus vrai que depuis des décennies, de nombreuses personnes dont Ken Saro Wiwa ont été pendues haut et court pour avoir réclamé un juste partage des richesses provenant de la vente du pétrole. Et que dire du Mouvement pour l’émancipation du Delta du Niger (MEND) qui, pour attirer l’attention des autorités centrales sur la mauvaise répartition de la manne pétrolière, s’était illustré négativement dans les années 2000 par des enlèvements et des attaques contre des installations pétrolières ? Quid du Biafra qui a récemment menacé de prendre son indépendance pour espérer bénéficier de plus des richesses du pétrole ? Pourquoi maintenant ?  On sait que sous l’ère Goodluck Jonathan, on n’avait jamais entendu parler du groupe « Les vengeurs du Delta ». Est-ce parce que ce dernier avait mis en place un fonds occulte pour gérer les tensions dans le Delta ? Difficile d’y répondre.

 

Buhari ne doit pas jouer la politique de l’autruche

 

Mais ce dont on est certain, c’est que l’amnistie que Goodluck avait accordée aux rebelles en 2009, avait contribué à faire baisser la tension. Car, plus de 30 000 rebelles avaient déposé les armes en échange d’une aide à la formation et à la reconversion. Et le simple fait que Buhari ait annoncé la fin probable de ce programme en 2018, pourrait avoir sonné le réveil des vieux démons. Cela dit, Buhari gagnerait à revoir sa copie. Car, la fracture sociale entre le Sud et le Nord est aujourd’hui abyssale. Et comme un adage le dit, on ne peut pas cacher le soleil avec son doigt. La situation du Delta du Niger est un scandale.  En effet, cela fait deux décennies que des milliers de personnes n’ont ni accès à l’eau potable ni à leurs champs, encore moins aux cours d’eau de cette région, tellement l’environnement est pollué par les compagnies pétrolières.  En tout cas, les habitants de cette partie du Nigeria ne font plus mystère de leur volonté de briser le pacte social qui les lie à l’Etat central. Pour tout dire, ils ne sont plus prêts à accepter que l’on vienne piller les richesses de leur zone au profit d’autres régions du pays, alors qu’eux manquent de tout. C’est dire que Buhari ne doit pas jouer la politique de l’autruche. Il doit trouver des solutions durables à cette crise qui intervient au pire moment, le coût du baril étant à son plus bas niveau.

 

Dabadi ZOUMBARA


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