HomeA la uneREUNION D’ACTIVISTES AFRICAINS CONTRE L’AUTOCRATIE  

REUNION D’ACTIVISTES AFRICAINS CONTRE L’AUTOCRATIE  


Face à la montée des régimes autocratiques matérialisée par la multiplication des troisièmes mandats, la jeunesse consciente du continent noir a décidé de ne pas rester les bras croisés. C’est dans ce cadre que  Dakar, la capitale du Sénégal, a accueilli, du 14 au 16 décembre dernier, des activistes africains et pas des moindres, réunis au sein de l’UPEC (Université populaire de l’engagement citoyen) et engagés dans la lutte contre la patrimonialisation du pouvoir sur le continent africain. Ce, à l’effet de réfléchir sur le thème : « Quelle place pour les mouvements citoyens face aux poussées autocratiques ?» Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces activistes africains sont dans leur rôle. Et le thème de la rencontre ne pouvait pas mieux tomber. D’autant plus que ce rendez-vous de Dakar intervient au moment où de vieux dinosaures de la scène politique africaine, l’Ivoirien Alassane Dramane Ouattara et le Guinéen Alpha Condé pour ne pas les nommer, viennent de porter un coup de Jarnac à la démocratie à travers leurs investitures respectives pour un troisième mandat.

 

Cette rencontre de la capitale sénégalaise, se veut une tribune d’interpellation citoyenne face au virus… des troisièmes mandats

 

Un véritable recul démocratique qui ne se veut pas moins un attentat contre les règles de l’alternance, au moment où l’Afrique de l’Ouest semblait se distinguer du reste du continent par ses progrès et la maturité qu’elle affichait en matière de respect des règles du jeu démocratique. C’est pourquoi il faut se féliciter de cette rencontre de la capitale sénégalaise, qui se veut une tribune d’interpellation citoyenne face au virus… des troisièmes mandats qui semble gagner du terrain en Afrique. C’est le lieu de saluer, au passage, l’action de ces organisations de la société civile qui ont joué un grand rôle dans l’ancrage de la démocratie sur le continent africain, notamment à travers les exemples de Y’en a marre au Sénégal, la Lucha et Filimbi en RD Congo ou encore le Balai citoyen au Burkina Faso. En effet,  elles ont souvent fait preuve de témérité face à l’adversité, au moment où ils n’étaient pas nombreux, les combattants pour la liberté et la démocratie, à prendre les risques inconsidérés que ces activistes ont pris en osant affronter les dictateurs dans leurs pays respectifs, pour barrer la route à leurs ambitions de confiscation du pouvoir. A titre d’exemple, au Sénégal et au Burkina, nul ne peut nier l’apport de Y’en a marre et du Balai citoyen, dans la contrariété des ambitions pouvoiristes d’Abdoulaye Wade et de Blaise Compaoré. C’est dire si ces mouvements citoyens ont, à un moment donné, suscité l’espoir si fait qu’il n’est pas exagéré de dire qu’il aurait fallu les créer, s’ils n’avaient pas existé. Car, c’est justement de ces combats-là, que ces OSC ont tiré leur force et leur légitimité. Même si, en RD Congo, l’expérience n’a pas été la même pour Filimbi et la Lucha qui se sont heurtés à un hermétique et belliqueux Joseph Kabila. Mais ces combats semblent déjà éculés. Et aujourd’hui, la donne a changé. Le constat que l’on fait est que ces OSC n’ont plus la même force de frappe, quand leur aura n’a pas pris un véritable coup sur le terrain.

 

Un moment d’introspection et de réflexion pour ces activistes à la recherche d’un second souffle

 

C’est dire si ces activistes étaient bien partis pour réussir, mais ont peut-être parfois péché par inexpérience ou par naïveté face à des politiciens roublards qui ont aussi pu les  utiliser bonnement  pour leurs propres intérêts, avant de les abandonner à leur sort. D’où la nécessité, pour ces activistes, de repenser la lutte pour sortir de leur propre ombre et se donner des chances d’être de véritables  forces de contre-pouvoir qui comptent, et non des organisations réduites à leur plus simple expression, obligées de  prendre parfois position et de donner de la voix, juste par acquit de conscience.  D’ailleurs, au regard des récentes investitures d’ADO et d’Alpha Condé pour leur troisième mandat chacun,  on peut se demander si cette rencontre de Dakar ne vient pas un peu sur le tard, un peu comme le médecin après la mort.  D’autant que les hommes forts d’Abidjan et de Conakry ont déjà, chacun de son côté,  empoigné  « sa chose », alors que le combat devait se mener beaucoup plus en amont, pour empêcher le fantôme d’entrer dans la maison. En tout cas, c’est cette impression que l’on  peut avoir, et qui traduit toute la faiblesse à laquelle sont aujourd’hui réduits ces acteurs de la société civile qui ne semblent plus véritablement en mesure de peser sur les événements, au moment où le combat pour la démocratie s’annonce encore plus ardu. C’est dire si cette rencontre de Dakar se présente comme  un moment d’introspection et de réflexion pour ces activistes à la recherche d’un second souffle. Cela n’est pas une mauvaise chose en soi. Le tout est maintenant de savoir ce que l’on peut en attendre. Car, à y regarder de près, la problématique semble se poser en termes simples : exister ou disparaître à moins d’être réduit à jouer les seconds rôles. Entre toutes ces alternatives, ces activistes africains sauront-ils trouver leur chemin ? On attend de voir.

 

 « Le Pays »

 


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