HomeOmbre et lumièreROCH CHEZ DES DICTATEURS AFRICAINS : Quand le réalisme prend le pas sur les valeurs

ROCH CHEZ DES DICTATEURS AFRICAINS : Quand le réalisme prend le pas sur les valeurs


Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, vient de rendre une visite de travail et d’amitié en Guinée Equatoriale. Avant ce pays, il avait fait la même chose respectivement en Côte d’Ivoire, au Tchad à l’occasion de l’investiture de Deby et au Congo-Brazzaville, plus précisément dans le village natal de son homologue Denis Sassou Nguesso. A l’exception d’Alassane Ouattara que l’on ne peut soupçonner, pour le moment, d’avoir des velléités dictatoriales, l’on peut faire le constat que les trois autres, à savoir Idriss Deby Itno, Denis Sassou Nguesso et Obiang Nguema sont des membres emblématiques de la satrapie africaine. Le maximum d’années que chacun d’eux totalise au pouvoir est de deux décennies. Et tout indique qu’ils rêvent d’y mourir. Car, ils ont tous modifié la Constitution de leurs pays respectifs dans ce sens. De ce point de vue, les démocrates du Burkina peuvent être gênés aux entournures de voir le premier président post-insurrectionnel et dont l’élection a été saluée par tous  pour son caractère démocratique, rendre successivement visite à des présidents de ce profil. Les insurgés des 30 et 31 octobre 2014 notamment, qui ont eu raison de la dictature de Blaise Compaoré grâce à leur sacrifice et à leur témérité, peuvent percevoir cela comme une trahison des valeurs liées à la démocratie, qui ont sous-tendu les ressorts de leurs actions. Il serait, par conséquent, compréhensible et légitime s’ils venaient à crier au scandale à la vue de Roch Marc Christian Kaboré trinquant avec des dictateurs de haut vol comme Deby, Sassou Nguesso et Obiang Nguema. Cela dit, l’on peut se poser la question de savoir ce qui fait courir Roch Marc Christian Kaboré chez des présidents qui, en matière de démocratie, sont de véritables cancres. D’abord, l’on peut se risquer à dire ceci : pour avoir travaillé pendant un quart de siècle avec Blaise Compaoré, le président Kaboré a eu la latitude de se constituer un carnet d’adresses. Dans ce carnet, pourraient figurer des noms de présidents comme Deby, Obiang Nguema et Sassou Nguesso. De ce point de vue, l’on peut dire qu’en leur rendant visite, Roch Marc Christian Kaboré a tenu à réchauffer de vieilles relations.

 

Dans les relations entre les Etats, seuls comptent les intérêts

 

Ensuite, et cela pourrait être là la principale motivation des visites de Roch Marc Christian Kaboré chez des satrapes, c’est que le président semble avoir fait preuve de réalisme. En effet, au plan économique, tout le monde sait que le Burkina Faso traverse des moments difficiles. De ce fait, le président pourrait ne pas s’encombrer de scrupules face à la nécessité d’aller chercher l’argent où il se trouve. Or, il est de notoriété publique que ce n’est pas ce qui fait défaut chez Deby, surtout Sassou Nguesso et Obiang Nguema. Car ces présidents, on le sait, règnent sur des pays pétroliers mais aussi, ils ont la particularité de gérer les ressources de leurs pays respectifs comme un planteur gère sa bananeraie. De manière discrète, ils savent se montrer généreux. Et comme l’argent n’a point d’odeur et n’aime pas le bruit, l’on peut croire que cela a pu déterminer le président à s’orienter vers ces 3 pays. Et puis, après tout, il ne faut pas oublier qu’avant de faire son entrée en politique, Roch Marc Christian Kaboré a officié d’abord comme directeur d’une institution bancaire de la place. Ce profil peut lui être d’un apport dans la collecte de l’argent frais, où qu’il puisse se trouver, pour oxygéner l’économie de son pays. Comme Blaise Compaoré, l’on peut dire que le président Kaboré est un partisan de la diplomatie du chéquier. Et l’on peut difficilement lui jeter la pierre pour cela. Car, dans les relations entre les Etats, seuls comptent les intérêts. Le Général De Gaulle l’a reconnu, lorsqu’il disait ceci : « La France n’a pas d’amis mais des intérêts ». Lorsque l’on observe bien le comportement des présidents des grandes nations démocratiques, l’on peut se rendre vite compte que les propos de l’auteur de l’appel du 18-juin sont vérifiés. De par le passé, en effet, l’on a vu des présidents occidentaux s’afficher publiquement avec des présidents qui ont pourtant défrayé la chronique à plusieurs reprises pour leurs excès en matière de non respect des droits humains et de démocratie. Pour toutes ces raisons, l’on peut décrypter les visites rendues à des satrapes africains par Roch Marc Christian Kaboré comme le triomphe du réalisme sur les valeurs liées à la démocratie. Il lui revient de savoir tirer profit de ces visites sans pour autant salir l’image du Burkina, connu notamment depuis les 30 et 31 octobre 2014 comme le pays qui porte l’étendard de la démocratie en Afrique. Car, à force de dîner avec le diable, l’on peut prendre le risque d’adopter certaines de ses habitudes.

 

Sidzabda      


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