HomeA la uneRUPTURE DES ACCORDS ENTRE BAMAKO ET PARIS  : Le Mali, victime consentante des intérêts russes ?  

RUPTURE DES ACCORDS ENTRE BAMAKO ET PARIS  : Le Mali, victime consentante des intérêts russes ?  


Le divorce entre le Mali et la France est entièrement consommé depuis le 2 mai dernier où le ministre malien des Affaires étrangères a notifié au chargé d’affaires de l’ambassade de France à Bamako, la décision des autorités maliennes de dénoncer les accords de défense avec l’ancienne puissance coloniale. La nouvelle, il faut le dire, n’a véritablement rien de surprenant ; tant il y a longtemps que les deux alliés dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, ne parlaient plus le même langage. Le dernier épisode de ces tumultueuses relations entre les deux ex-époux, est l’affaire du charnier de Gossi filmé au lendemain du départ des troupes françaises et que l’armée française dénonce, images à l’appui, comme une mise en scène destinée à la propagande russe. Ce démenti est resté comme un os en  travers de la gorge des autorités maliennes qui, accusant leur ancien partenaire de « multiples violations » de l’espace aérien malien et « d’atteintes flagrantes » à la souveraineté du pays, se sont précipitées pour enfoncer une porte déjà ouverte en annonçant la rupture de la coopération militaire avec le pays d’Emmanuel Macron.

 

Les Russes se servent du Mali pour la défense de leurs intérêts

 

Tout en reconnaissant aux autorités maliennes le droit de se défaire d’un partenariat qui, à leurs yeux, ne répond plus aux attentes surtout sécuritaires des populations, l’on ne peut cependant que nourrir des regrets dans cette affaire qui apparait comme un pic dans l’escalade des tensions entre Bamako et Paris. En effet, le premier regret que l’on peut avoir, est que le divorce entre la France et le Mali est prononcé sur un tissu de mensonges où la mauvaise foi de la part des autorités maliennes et de leur allié russe, est manifeste. Certes, il y a bien des choses à reprocher à l’ancienne puissance coloniale dans l’épineux dossier malien, mais il est difficile de ne pas lire de l’ingratitude dans l’attitude des autorités maliennes qui tentent de couvrir d’opprobre un ancien allié à qui l’on doit l’existence même du pays. En effet, n’eût été l’intervention de la France de François Hollande à travers l’opération Serval en 2012, face aux groupes djihadistes qui fonçaient sur la capitale Bamako, le Mali serait, sans nul doute, aujourd’hui, un califat. L’autre regret que l’on peut avoir dans cette affaire est que le Mali se laisse manipuler par les intérêts Russes.  Point n’est besoin d’avoir le troisième œil du sorcier bambara ou du marabout peul pour savoir que les Russes, tout comme les Français d’ailleurs, se servent du Mali pour la défense de leurs intérêts. L’intérêt des russes aujourd’hui pour le Mali, il faut le dire, n’est pas dicté par la beauté des yeux ou la croupe arrondie de la femme malienne, mais par leurs intérêts économiques et géostratégiques.  A titre d’exemple, le pays d’Assimi Goïta est devenu un gros marché d’armes pour l’un des plus grands marchands d’armes de la planète.

 

Le pari est risqué

 

La guerre au Mali est donc une industrie pour la Russie et donc un moyen pour desserrer l’étau des sanctions économiques que lui imposent les puissances occidentales. Mais l’on peut comprendre que la junte au pouvoir à Bamako, ferme les yeux sur cette exploitation que font les Russes, de leur pays. L’accointance avec les mercenaires du groupe Wagner est une monnaie politique qui permet d’approvisionner en comburant, le doux feu du sentiment anti-français qui sert quasiment de programme politique à Assimi Goïta et ses compagnons d’armes arrivés un soir d’août de la garnison de Kati. L’on peut donc se risquer à affirmer que le Mali est une victime consentante des intérêts russes. Mais la question que l’on peut se poser est la suivante : le Mali fait-il le bon choix en suivant, les yeux bandés, les chasseurs de primes russes ? En attendant que l’histoire apporte la réponse à cette question, l’on peut dire que le pari est risqué. Car, le Mali si jaloux de sa souveraineté, ne gagne rien à quitter l’aile d’un impérialiste pour se réfugier sous les ailes d’un autre qui, d’ailleurs, mène en ce moment une guerre d’occupation en Ukraine. Et c’est véritablement là que l’on peut nourrir le plus grand regret : celui de voir le Mali refuser d’assumer entièrement son indépendance en prenant en main toutes les garanties de son existence. Cela dit, la France qui est aujourd’hui renvoyée du Mali comme une pestiférée, n’est pas à plaindre. Elle est responsable de la situation au Mali et cela pour deux raisons. La première raison est qu’elle a commis, dès l’entame de la guerre au Mali, une erreur d’appréciation en croyant que la rébellion touarègue pouvait trouver une solution dans un processus politique, ignorant intentionnellement les liens ombilicaux entre les combattants de l’Azawad et les grandes katibas terroristes. Elle a donc offert sa protection à des terroristes qui ont fini par se métastaser comme un cancer dans toute la bande sahélo-saharienne dont elle avait d’ailleurs ouvert les portes par son intervention sans service après-vente en Libye.  La deuxième raison est que la France n’a pas été capable, après une décennie de présence au Sahel, de vaincre l’hydre terroriste après avoir vendu l’illusion de sa toute-puissance aux populations africaines.

 

 

« Le Pays »


Comments
  • Très intéressante première partie qui reprend la vraie histoire (petit détail serval a été en place en janvier 2013)..

    Pour reprendre cette phrase “La première raison est qu’elle a commis, dès l’entame de la guerre au Mali, une erreur d’appréciation en croyant que la rébellion touarègue pouvait trouver une solution dans un processus politique …”
    Il faut rappeler que les Touaregs du Nord Mali sont maliens et qu’à ce titre seul le Mali peut et doit intervenir. .La France dès qu’elle est arrivée a été une force d’interposition .Les premières rébellions des Touaregs maliens remontent à 1963/1964 sous MODIBO KEITA qui mis en place une très forte répression…D’autres rebellions ont eu lieu. Après
    D’autres pays ont été confrontés aux mêmes problèmes concernant les Touaregs . Des pays ont réussi a trouver des solutions qui ont apaisé les tensions…
    Le Mali a été pris de court car son armée n’était pas à la hauteur malgré 2 présidents généraux de l’armée .Cette armée forte aurait pu s’imposer ..De plus le Mali n’avait pas réglé un certains nombre de problèmes ethniques (Peulhs contre Dogons) , Touaregs etc
    Le 19/2/2015 des accords ( d’Alger) pour la PAIX et la réconciliation Nationale ont été signés entre l’Etat Malien et les Touaregs ..Mais les réunions pour la mise en place de cet accord ont été boudées par l’Etat et ne sont toujours pas appliqués où remis en cause

    5 mai 2022

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