SITUATION DES BURKINABE SANS ETAT CIVIL : L’ARCN demande l’assistance du MBDHP
Ceci est une adresse du président de l’Association pour la renaissance d’une citoyenneté nouvelle (ARCN) au président du Mouvement burkinabè des droits de l’homme et des peuples (MBDHP), à qui il demande de s’engager pour la cause des Burkinabè sans pièces d’état civil. Lisez plutôt !
« Monsieur le président,
L’ARCN, dans le cadre de ses activités, étant en contact permanent avec une partie importante de la population, a pu constater que plusieurs natifs de notre pays sont traités comme des apatrides.
Cette appréciation est fondée sur le fait que, bien que nés sur notre sol et dans des entités administratives légalement reconnues, des Burkinabè sont sans documents, notamment ceux relatifs à leur état civil. (Acte de naissance, jugement supplétif, etc.).
Ainsi traités depuis leur naissance, certains le demeurent jusqu’à leur majorité et souffrent naturellement tout le long de leur vie, d’une ségrégation qui les prive de leurs droits comme ceux relatifs à l’éducation et à d’autres avantages que la nation offre aux autres citoyens. Cette ségrégation de naissance condamne ainsi cette partie de la population à une existence marginalisée ou même à l’exclusion. Bien que publiquement reconnue par l’opinion, la situation de ces laissés-pour-compte n’est évoquée que pendant la « pêche » aux électeurs que constituent les compagnes pré -électorales.
En effet, c’est pendant ces périodes de recherche de potentiels électeurs que les candidats ou leurs supporteurs écument les compagnes pour opérer, à coup de publicité, des délivrances de pièces d’état civil afin de munir leurs soutiens éventuels du précieux « sésame », c’est-à-dire la carte d’électeur qui ne peut être obtenue que sur présentation de la pièce d’état civil.
Monsieur le président, vous voyez donc que de par sa nature sélective, une telle compagne ou opération de délivrance, bien qu’utile, est fondamentalement injuste et inique, car non seulement elle est aléatoire et délictueuse, mais sa mise en œuvre est sans programme officiel. Notre point de vue, c’est que c’est la première forme de corruption à laquelle s’adonnent les candidats qui disposent des moyens de toutes natures, à savoir administration, féodalité locale, biens mal acquis, etc., faisant ainsi le lit de la corruption électorale avant l’ouverture officielle de chaque campagne.
L’ARCN dont l’objectif principal est la construction d’une société nouvelle, est préoccupée par l’abandon d’une aussi grande partie de notre population à la merci de qui peut ou veut en faire usage. C’est, à notre avis, une négligence très grave.
C’est pourquoi nous venons, par la présente, solliciter votre appui pour lancer et mener des débats à même de rappeler à l’opinion nationale et internationale, le sort peu enviable de cette population qui fait aussi pourtant partie des hommes et des peuples dont vous vous êtes engagés à défendre les droits.
– Notre requête est aussi soutenue par la crainte des
conséquences inéluctables que pourra engendrer une telle marginalisation dans notre contexte de mouvements revendicatifs violents, qui servent de terreau aux dérives constatées çà et là dans le monde en général, et en Afrique en particulier (rébellion, sécession, trafics divers de personnes, terrorisme, etc.).
Monsieur le président, la jeunesse de notre association ne lui permet pas pour l’instant de se faire entendre convenablement devant les instances appropriées sur un sujet aussi explosif, alors que votre mouvement, qui a déjà fait ses preuves, peut nous être d’un précieux concours pour dégoupiller cette bombe latente. Aussi, nous vous demandons de bien vouloir consacrer un espace de votre audience à la bonne cause que constitue la lutte pour la délivrance de pièces d’état civil à tous au Burkina Faso, avec pour cible ceux qui, depuis, sont abandonnés par l’Administration, malgré la décentralisation et le besoin de l’expression démocratique fanfaronné par tous pour légitimer les élections et justifier les besoins de financements divers.
Nous ne doutons pas de votre capacité à prendre en charge notre doléance, vu l’audience que votre mouvement a acquis dans la lutte depuis maintenant presque trois (3) décennies et dont l’expertise et le potentiel débordent au point de servir maintenant la cause des détenus de luxe et autres Généraux putschistes.
L’ARCN, en s’adressant au MBDHP, fait également appel aux autres associations et mouvements sensibles aux mêmes orientations que les vôtres et qui vous accompagnent dans la lutte pour les droits des élites qui , pourtant , selon notre vision, ont déjà plus que de ce qu’il faut pour vivre. (cf. le cas des magistrats et d’autres grands commis de l’Etat).
Monsieur le président,
– considérant que depuis bien longtemps, ce peuple travailleur et modeste, dans son style de vie, a servi de réservoir de main-d’œuvre dans la réalisation des grands travaux qu’a nécessité le développement des pays voisins et de leurs peuples à travers l’esclavage d’abord et la colonisation ensuite ;
– considérant que de façon cynique, notre population a été utilisée pour libérer ce qu’on a voulu lui faire prendre pour sa patrie lors des deux (2) guerres hors du continent ;
– considérant que malgré ces énormes sacrifices consentis, notre peuple a dû attendre Août 1983 pour avoir le droit de s’affirmer et cela pendant quatre (4) années seulement ;
– considérant que l’insurrection des 30 et 31 Octobre et ses sacrifices ont été récupérés, L’ARCN, tirant leçon de ce passé tumultueux mais improductif pour notre émancipation, conclut que la véritable cause de nos insuccès, est la mise à l’écart de la plus grande partie de la population dans notre principe de gestion.
Si donc l’effort que nous vous demandons pouvait être acquis et soutenu, le sort de notre population pourrait être sensiblement amélioré.
Monsieur le Président, l’ARCN reste disponible pour apporter sa modeste contribution dans la recherche de solutions aux problèmes de la partie déshéritée de la population de notre pays. La lutte de notre association pour l’avènement d’une société nouvelle étant menée dans le but ultime de prendre en compte le sort de tout notre peuple et de son environnement ; d’où la nécessité de planter des arbres, construire des diguettes, réaliser des pare-feux et lutter contre la divagation des animaux.
Les tâches ci-dessus énumérées ne demandant pas d’expertises hors de notre milieu, l’association s’y attelle depuis, mais, pour la protection des hommes et des peuples, votre mouvement nous a paru beaucoup plus approprié.
C’est pourquoi, Monsieur le Président du MBDHP, l’ARCN réitère sa requête de prise en charge du dossier ci-dessus évoqué comme sixième points de la plateforme revendicative minimale récemment arrêtée et présentée à l’opinion, lors de la marche du 4 novembre 2017.
Pour l’Association,
Le Président
El Hadji Mousbila SANKARA