HomeOmbre et lumièreSITUATION SOCIO-POLITIQUE AU BURKINA : Le diagnostic d un écrivain

SITUATION SOCIO-POLITIQUE AU BURKINA : Le diagnostic d un écrivain


Selon l’auteur des lignes qui suivent, Maurice Guiré, écrivain, directeur de l’école privée Wend Zoodo, le Burkina Faso est en crise. Pour résoudre cette crise, selon lui, il faut agir sur cinq points : ce qu’il appelle « Quinté politique gagnant ». Lisez plutôt sa réflexion !

“Aujourd’hui, si ce n’est pas la tempête, c’est loin d’être le calme et ce, malgré les nombreuses solutions d’un genre nouveau d’”experts”. Voici celles d’un autre “expert” mais à la différence des autres experts, celui-ci se définit lui-même plutôt comme une fourmi politique. Pour lui, le Burkina doit jouer les cinq numéros gagnants, mais dans l’ordre, comme pour un quinté au PMUB et aujourd’hui, quel peut être l’ordre de ce quinté politique ? A mon humble avis, le voici :

1) Premier numéro gagnant : Table ronde (Assises, Forum, Etats généraux ou Conférence nationale souveraine peu importe le terme) de tous les secteurs d’activité, bien représentés au niveau des partis politiques, des confessions religieuses, de tous les syndicats, des fonctionnaires, des anciens fonctionnaires internationaux, des ouvriers, des routiers, des OSC, de la jeunesse, des commerçants, des femmes, des chefs coutumiers, des anciens combattants, des retraités, des veuves et veufs, des handicapés, des éleveurs et agriculteurs, des anciens présidents du Burkina, de l’Armée, du Patronat, de la diaspora, etc. Pas de sujet tabou, tout évacuer, avec la ferme volonté et le courage de tourner résolument et définitivement la page d’un système décrié. Ce cadre devra débattre dans le calme, sans excitation, sans passion, sans haine et sans esprit de revanche et dégager dans un consensus national l’essentiel, l’intangible, les points fondamentaux et les grandes lignes directrices.

2) Deuxième numéro gagnant : ce nouveau cadre de dialogue devra enfin déterminer :

-le type de gouvernance et donc le type de gouvernants que nous voulons ;
-le type de Constitution que nous voulons et ce, UNE BONNE FOIS POUR TOUTES ;
-le rôle et la place de la Chefferie, le rôle et la place de l’Armée et ce, UNE BONNE FOIS POUR TOUTES.

3) Troisième numéro gagnant : appliquer toutes les recommandations issues du forum avec la ferme résolution :

-de disposer désormais d’une Justice indépendante (déconnectée du Parquet, donc du politique) ;
-de disposer aussi d’une administration impartiale, d’une presse libre et indépendante ;
-de la liquidation de tous les dossiers pendants et de mettre fin à l’impunité ;
de redonner toute leur place, rien que leur place, à la femme et à la jeunesse ;
-et enfin d’aller en guerre contre la corruption.

4) Quatrième numéro gagnant : quand il s’agira de nominations, nommer désormais QUI il faut, LÀ où il faut, c’est-à-dire désigner le meilleur, tous critères confondus (intégrité, compétence, engagement, dévouement au peuple, sans antécédents, etc.), quand il s’agira des hauts fonctionnaires, des Directeurs généraux ou centraux, des Directeurs d’entreprises ou de grosses sociétés d’Etat, etc. Là et là seulement, le peuple aura de nouveau confiance en ses dirigeants et cela va du coup susciter son adhésion ainsi que la mobilisation des populations. D’autre part, le pouvoir ne rencontrera aucune résistance ou réticence de la part des celles-ci quand il faudra accepter faire des sacrifices pour les différents programmes de développement, etc., on l’a vu en 1966, en 1974 et en 1983, c’est donc vérifié. Des hommes intègres, compétents et dévoués existent et  n’attendent que d’être aux commandes !

5) Cinquième numéro gagnant : développer une nouvelle culture (mentalité) :

celle de la bonne gouvernance ;
celle de l’EXCELLENCE, excluant à jamais la corruption ;
celle de la probité et de l’intégrité : “on n’est pas au service de l’Etat pour se servir ni pour des profits immédiats” (prébendes, villas, parcelles, promotions de complaisance, injustifiées ou fantaisistes, etc.).

N’oublions pas que chaque fois qu’il y a corruption, ce sont des routes, des écoles, des CSPS et du matériel de santé en moins…

Quand on plante un arbre, l’ombre et les fruits, c’est bien pour plus tard !

On est au service du pays pour les générations futures, pour la POSTERITE, non pour soi.

SI ON EST DONC PRET POUR CETTE NOUVELLE VISION DE LA GOUVERNANCE, EN AVANT ! ON AURA ALORS POSE DES FONDEMENTS SOLIDES, POUR L’AVENIR.
Maintenant, quelle peut être la feuille de route ? A mon avis, la voici mais toujours en cinq points :

1. Il faudra au pays, un nouveau traitement de choc durable, avec des mesures énergiques immédiates aptes à apporter des solutions toutes aussi durables.
Il faut commencer par réduire tout de suite le train de vie de l’Etat (Présidence, Premier ministère, ministères, différentes institutions), au niveau des parcs autos (remplacer toutes les 4×4 par des petites cylindrées), au niveau des nombreuses villas entretenues par l’Etat en plafonnant les charges domestiques (gaz, eau, électricité, jardins), des dépenses de prestige (fêtes de fin d’année, pauses café, bons d’essence, budget des Premières Dames…). Réduire aussi de (quel taux ?) les diverses indemnités accordées au Président, aux Présidents d’institutions, aux Ministres, aux Gouverneurs et autres hauts fonctionnaires.
Réduire également le personnel domestique à un boy cuisinier et à un jardinier pris en charge par l’Etat. Pour les missions à l’étranger par avion, à part les Présidents des institutions et les Ministres, tous les autres fonctionnaires devraient voyager en classe touriste. De plus, ces missions devraient obtenir l’autorisation du Conseil des ministres et présenter un intérêt certain pour le pays.

2. Dans une nouvelle dynamique retrouvée donc, pourquoi ne pas demander un effort collectif national comme en 1966, comme en 1974, comme en 1983-1984 ? Pourquoi aussi ne pas demander aux populations une souscription volontaire gratuite, au profit de l’Etat ? Pourquoi ne pas demander à chaque salarié de céder une partie de son salaire mensuel à l’Etat ? Pourquoi aussi ne pas demander aux entrepreneurs et aux commerçants une partie du montant de leur patente (étalée sur un an), et au reste de la population de verser par exemple 100 F CFA par habitant des campagnes et 200 F CFA par habitant des villes ? L’appel sera entendu, par le passé on a vu qu’en ces moments difficiles précis, le patriotisme des populations prenait le pas sur toutes autres considérations. Quand le peuple se rend compte qu’on travaille réellement pour lui, il adhère, il accompagne, il apporte sa participation, de façon très volontariste.

3. On posera ainsi les vrais jalons et les fondements d’un vrai Etat de droit, moderne, avec sa justice indépendante, son administration impartiale, une presse libre et responsable, un Etat digne et capable de se prendre en charge.

4. Redonner aux ministères régaliens toutes leurs lettres de noblesse (éducation, santé, recherche, infrastructures, etc.), évaluer ce que cela va coûter et donc ce que cela peut exiger des populations, des années durant, et leur dire que c’est le prix à payer pour nos enfants, demain.

5. Le rôle des partis étant d’animer la vie politique, veiller mais alors vraiment veiller à ce que cette animation de la vie politique ne se résume pas à :”Rome vous a nommé, je ne vous connais plus”. Appartenir à un parti ne doit pas faire de vous l’ennemi à abattre. La politique politicienne, maudite, les querelles de chapelles, vaines, inutiles et la forme aiguë du mal burkinabè auront à tout jamais vécu.

En pays Haoussa, on dit que tout va bien quand les dirigeants – serviteurs du peuple – acceptent de dormir le ventre creux (s’il le faut), tant que les populations n’ont pas le ventre plein : donc, c’est l’exemple que doit s’efforcer d’incarner toute classe politique dans ses efforts !

Maurice GUIRE, écrivain,
Directeur de l’école privée Wend Zoodo


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