HomeA la uneSOMMET DE LONDRES SUR LA CORRUPTION : Une tribune de défoulement collectif !  

SOMMET DE LONDRES SUR LA CORRUPTION : Une tribune de défoulement collectif !  


 

Le premier ministre britannique a accueilli hier les représentants d’une cinquantaine de pays pour un sommet international  inédit contre la corruption. Plusieurs personnalités politiques dont des chefs d’Etat ainsi que des dirigeants d’ONG et d’institutions internationales étaient présents à Lancaster House à Londres pour écouter le maître de cérémonie, David Cameron, décliner les grandes articulations de l’événement, mais surtout pour plancher sur ce fléau planétaire qu’est la corruption, qui, il faut bien le dire, ruine tous les efforts menés pour réduire la pauvreté dans le monde et pour lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes. Pour le Premier ministre britannique, il s’est agi de faire adopter et signer une déclaration dite de Londres qui permettra de «traquer la corruption où qu’elle se trouve, poursuivre et sanctionner les personnes qui la commettent, la facilitent ou en sont complices». Au-delà de la beauté du discours et du catalogue de bonnes intentions déroulé par l’organisateur en chef de ce sommet, ce sont les mesures concrètes et surtout leur application effective dans les différents pays qui nous diront si cette rencontre valait véritablement la peine d’être organisée. Car, dans des pays où la corruption est endémique, si elle n’est pas tout simplement érigée en système de gouvernement, l’on est en droit de se demander si les conclusions d’un sommet organisé au pas de charge pourront faire bouger les lignes, a fortiori mettre un terme à ce phénomène aussi vieux que le monde. Notre scepticisme pour ne pas dire notre pessimisme est d’autant plus grand et fondé que la majorité des participants à la rencontre de Londres ont été récemment épinglés dans l’affaire dite des  «Panama Papers» sur l’évasion fiscale. L’hôte du sommet lui-même a été éclaboussé par le scandale révélé par le cabinet panaméen d’avocats Mossack Fonseca pour avoir détenu des parts dans la société offshore de son père. D’aucuns affirment déjà que le fait que ce soit David Cameron qui lance l’offensive mondiale contre la corruption peut être compris comme un acte de contrition publique et un engagement ferme de sa part de combattre farouchement ce qu’il a lui-même qualifié de « cancer » qui gangrène presque tous les pays du monde, à commencer par sa Grande Bretagne natale.

Ils sont nombreux, qui pensent que la corruption est indissociable des affaires

Et comme il a compris que pour danser le tango il faut être 2, il a invité autour de la même table de discussion les associations et les pays qui se sont illustrés dans la lutte contre le phénomène comme Amnesty international et les Etats-Unis, ainsi que les pays qui sont « incroyablement corrompus » comme le Nigeria et l’Afghanistan, selon la short-list dressée par David Cameron himself. Ce mixage entre les bons et les mauvais élèves dans la lutte anticorruption pour des échanges d’expérience assortis de décisions inédites, suffira-t-il à ramener tous les corrompus et tous les corrupteurs du monde à de meilleurs sentiments et à plus d’orthodoxie dans la gestion des finances, des affaires et de l’économie ? Rien n’est moins sûr, car, ils sont nombreux, surtout en Afrique, qui pensent que le phénomène de la corruption est indissociable du monde des affaires, et il constitue bien souvent la principale clé de réussite, notamment pour tous ceux dont la fortune n’a « aucune histoire ». De nombreux analystes estiment d’ailleurs que dans cette lutte oh combien noble contre la prévarication et l’évasion fiscale, il y a eu erreur de casting, puisque le fer de lance n’aurait pas dû être Cameron ou la Grande Bretagne, mais plutôt les Etats-Unis, le Danemark ou la Norvège par exemple, tous connus pour leur transparence dans la gestion de la chose économique. Toutefois, espérons que ce sommet, qui continue de faire sourire plus d’un au regard des personnalités à la morale douteuse qui y étaient présentes, ne sera pas un de plus, et que les décisions qui en sont sorties seront applicables. Faute de quoi, on aurait tout simplement assisté à un défoulement collectif de dirigeants très mal en point dans leur âme et dans leur conscience, et qui cherchent désespérément un exutoire, après avoir amassé d’immenses fortunes tout aussi sales que les activités qui les ont générées.

Hamadou GADIAGA


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