HomeA la uneTENSIONS SOCIO-POLITIQUES EN GUINÉE : Et si les Guinéens acceptaient enfin de se parler ?

TENSIONS SOCIO-POLITIQUES EN GUINÉE : Et si les Guinéens acceptaient enfin de se parler ?


Après la journée sans presse, observée par les médias, les Forces vives guinéennes (FVG) ont repris leur série de manifs pour exiger, entre autres, l’arrêt des harcèlements judiciaires contre les acteurs politiques et de la société civile dont certains seraient arbitrairement détenus sans jugement depuis de longs mois. Les manifestants protestent aussi contre la suspension des manifestations pacifiques dans les rues et  places publiques. Ils réclament enfin l’ouverture d’un dialogue inclusif et crédible en vue d’un retour rapide des civils à la tête du pays, sous l’égide de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Pour répondre à ces manifs, le pouvoir militaire en place a choisi de faire la sourde oreille et a plutôt préféré bander les muscles en déployant comme à l’accoutumée, un impressionnant arsenal répressif avec pour objectif d’étouffer toutes les voix contraires à celles des autorités de la transition. C’est dire donc que le bras de fer se durcit malgré la médiation des leaders religieux.

 

On ne peut s’empêcher de saluer la détermination du peuple guinéen

 

L’on se souvient, en effet, que trois personnalités de la société civile emprisonnées sous la junte au pouvoir, avaient été libérées suite aux négociations de ces leaders religieux. Neuf autres ont vu leur contrôle judiciaire levé. Toutefois, c’est en vain aussi que les autorités religieuses ont tenté de dissuader les responsables des organisations de la société civile et des partis politiques de renoncer à ces nouvelles manifestations de rues. La question que l’on peut donc se poser est la suivante : qui pour amener les Guinéens à s’asseoir autour d’une même table pour discuter de leurs problèmes ? En attendant la réponse à cette question, l’on ne peut tout de même s’empêcher de saluer la détermination du peuple guinéen qui, malgré le lourd tribut en sang qu’il a payé, tient encore debout et n’entend pas renoncer à son aspiration légitime à la liberté et au progrès. Ce peuple a compris qu’on ne peut aller au paradis sans mourir et a décidé donc de ne pas se laisser conter fleurette. Il a compris sans doute aussi que la seule voie d’accès à des lendemains meilleurs, c’est celle qu’elle a frayée et bâtie par la sueur et le sang.  Et c’est sans nul doute aussi le seul moyen de rompre le sortilège des dirigeants tyranniques dont malheureusement le destin les a dotés depuis le père-fondateur de la Nation, Ahmed Sékou Touré jusqu’à Mamady Doumbouya en passant par Lassana Conté et Dadis Camara, pour ne citer que ceux-là. Tous, sans exception, y compris celui qui s’était taillé la réputation de combattant historique pour la démocratie, c’est-à-dire Alpha Condé, ont les mains tachées du sang des Guinéens quand ce ne sont pas leurs placards qui débordent de  cadavres. Et c’est le signe indien ou plutôt guinéen de cette malédiction originelle, que les Guinéens veulent briser. En face, ce que l’on comprend moins, c’est l’entêtement du régime militaire de Doumbouya dont on ne comprend plus le jeu, sans doute, à cause d’un agenda caché que lui seul connait.

 

Il est plus que temps que la communauté internationale puisse accompagner la Guinée

 

Son attitude répressive est d’autant plus incompréhensible que ce pouvoir a lui-même autorisé et organisé le procès du régime de Dadis Camara dans l’affaire du massacre du 28 septembre qui n’est pas sans rappeler la répression que lui-même abat sur les populations qui n’usent que de leurs droits constitutionnels à s’exprimer et manifester librement. Une chose semble claire : en optant de foncer tête baissée dans la répression de ses concitoyens, Mamady Doumbouya peut dire adieu à la Transition tranquille dont il avait rêvé. Car, vraisemblablement, son seul succès aujourd’hui est de s’être mis tout le monde à dos.  Dans un tel cas de figure, le bon sens recommande qu’il cherche le plus rapidement une porte de sortie de la scène politique où il est arrivé par effraction en faisant une spectaculaire volte-face contre son mentor Alpha Condé. Et s’il ne comprend pas cela, sans doute l’exemple de Dadis Camara est là pour le lui rappeler.  Cela dit, pour éviter la répétition tragique de cette page de l’histoire de la Guinée, il faut trouver les ressources internes et les combiner à celles externes pour amener les protagonistes de la scène politique guinéenne, connue pour être l’une des plus incandescentes du continent africain, à s’asseoir sous l’arbre à palabre. Les leaders religieux ont pris l’initiative et il est plus que temps que la communauté internationale qui semble en retrait, puisse accompagner la Guinée. Le chemin est déjà tout tracé par la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) qui a nommé un médiateur en la personne de l’ex-chef d’Etat béninois, Yayi Boni. Mais force est de reconnaitre que sa voix est très peu audible sur cette scène burlesque. Il est donc plus que temps que le missi dominici de l’organisation sous-régionale fasse entendre sa voix sur les monts du Fouta Djallon.

 

« Le Pays »  


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