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TOGO : Il faut sauver le prisonnier Kpatcha


L’actualité au Togo est marquée, ces dernières heures, par la dégradation de l’état de santé de Kpatcha Gnassingbé, ancien ministre de la Défense et demi-frère du Président Faure Gnassingbé, incarcéré depuis avril 2009 pour tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat. Suite à cette accusation, son domicile avait été pilonné à l’arme lourde dans la nuit du 12 au 13 avril 2009, par un commando dirigé, incroyable ironie du destin, par son propre beau-frère du nom de Félix Abalo Kadanga. Certes, il y avait échappé, mais la traque qui s’en était suivie avait permis son arrestation puis sa comparution devant la Cour suprême de Lomé qui l’avait lourdement condamné à 20 ans de réclusion, le 15 septembre 2011. Depuis ce verdict insusceptible de recours, le sort semble implacablement s’acharner sur l’ex-tout puissant ministre de la Défense et député du RPT, le parti au pouvoir, avec les refus répétés de son frère président de lui accorder la grâce, malgré ses requêtes, pour ne pas dire ses supplications, et les demandes introduites par la Cour de justice de la CEDEAO, l’Association des Victimes de Torture au Togo (ASVITTO), de même que le Conseil des droits de l’Homme des Nations unies auprès du locataire du Palais de la Marina, Faure Essozimna Gnassingbé.

En un peu plus de six ans derrière les barreaux, l’ éléphantesque Kpatcha Gnassingbé, qui n’était pas au mieux de sa forme avant même ses déboires avec son frère et son incarcération à la prison civile de Lomé, fait aujourd’hui la Une de l’actualité togolaise non pas en raison du temps relativement long qui lui reste à purger, mais à cause de son état de santé de plus en plus chancelant, voire critique. Les dernières informations dont nous disposons faisaient, en effet, état de l’évacuation, le 5 août 2015, du célèbre prisonnier au Centre Hospitalier Universitaire Sylvanus Olympio de Lomé, suite à une complication des maux dont il souffre, en l’occurrence une hypertension artérielle couplée à un diabète sévère, le tout aggravé par une embolie pulmonaire.

C’est justement en raison de ce tableau clinique pour le moins inquiétant, que ses avocats et les associations de droits de l’homme poussent depuis des mois voire des années, des cris d’alerte à l’adresse des autorités togolaises afin de sauver le prisonnier Kpatcha, en l’élargissant et en le transférant vers des centres de santé disposant de matériel et d’équipement appropriés pour une meilleure prise en charge. Mais le moins qu’on puisse dire, c’est qu’il n’est pas sûr que ces appels au secours soient entendus par le très rancunier Faure Gnassingbé, d’autant qu’il y a eu des précédents avec notamment les coaccusés de Kpatcha dans cette ténébreuse affaire de tentative d’attentat à la sûreté de l’Etat. On se rappelle en effet que l’un des piliers du régime et principal acteur du hold-up ayant profité au président actuel du Togo à la mort soudaine entre « ciel et terre »de son prédécesseur et père en février 2005, le général Assani Tidjani, pour ne pas le nommer, avait succombé à sa longue maladie le 7 décembre 2012, après avoir été tardivement « gracié pour aller mourir ailleurs », par le Président Faure. L’évacuation du Général Assani vers Limoges en France, dans un état de santé comateux et irréversible, a été rendue possible après plusieurs refus catégoriques de la présidence togolaise, seulement après avoir eu la certitude que le Général en disgrâce allait mourir à petit feu, loin du Togo, dans l’indifférence générale de ses compatriotes. Et c’est pour cela que la famille du capitaine d’aviation Adjinon Lambert, cet autre accusé dans la supposée tentative de coup d’Etat d’avril 2009, est toujours inquiète, malgré la grâce dont ce dernier a bénéficié en février 2013, puisqu’il s’en est sorti avec une infirmité auditive consécutive à une tumeur de l’oreille gauche qu’il a probablement eue suite à ses très mauvaises conditions de détention à la tristement célèbre Agence nationale de renseignement. Adjinon est certes sorti de prison libre et vivant, mais pour qui connaît les méthodes du régime en place à Lomé et le sort de ses prisonniers politiques, il y a de quoi se poser très vite la question de savoir « pour combien de temps ? »

Que le Président Faure refuse à des êtres humains le droit d’aller se faire soigner, est contraire aux valeurs africaines

On se rappelle encore que le  roitelet  de Lomé avait poussé « l’outrecuidance » jusqu’à faire la sourde oreille devant les appels à la clémence et à l’humanisme lancés depuis l’Hexagone, afin d’obtenir la libération de l’ancien PDG d’Elf, Loïck Le Floch-Prigent, arrêté en Côte d’Ivoire puis extradé au Togo où il était en détention provisoire pour une affaire présumée d’escroquerie. Il a fallu attendre cinq longs mois (ce qui est un record de résistance de la part d’un chef d’Etat africain contre les injonctions de la France) avant que les autorités togolaises acceptent de laisser sortir Le Floch-Prigent de leur territoire, sans doute de peur des représailles de l’Hexagone si le prisonnier de luxe venait à rendre l’âme dans les geôles ou même dans les hôpitaux togolais, réputés être de véritables mouroirs pour les prisonniers politiques et assimilés.

Evidemment, les Togolais qui sont dans le viseur du régime ne peuvent pas bénéficier de cette « bonté » dont a fait preuve le Président Faure vis-à-vis de Loïck Le Floch-Prigent, parce qu’ils n’ont pas la même valeur marchande ou politique, pour ne pas dire tout simplement humaine.

Que par instinct de survie, sous-tendu par un complexe de persécution, le Président Faure suspecte et embastille à tour de bras ses compatriotes, cela ne surprend pas les Africains qui sont habitués à voir ou à vivre ces comportements paranoïaques de la part de leurs dirigeants.

Mais qu’il refuse à des êtres humains, fussent-ils des diables, le droit d’aller se faire soigner, est contraire aux valeurs africaines faites d’humanisme, de pardon et de compassion vis-à-vis des souffrants. Et dans le cas d’espèce, cette indifférence du président Togolais est d’autant plus incompréhensible qu’il s’agit du sort de son propre frère consanguin, dont la mort sera à jamais gravée sur sa conscience, quelles que soient la haine et la détestation qui ont pu, peut-être pour des raisons de succession mal préparée, naître entre les deux. Après tout, le boucher de Bujumbura, Pierre Nkurunziza, n’a-t-il pas accepté l’évacuation vers l’étranger de l’activiste des droits de l’homme, Pierre Claver Bonimpa, pour des soins, suite à ses graves blessures dont les sbires du régime burundais sont les présumés auteurs ? Faure Gnassingbé gagnerait à échanger un tant soit peu avec l’ancien président centrafricain, François Bozizé, qui avait avoué ne s’être jamais moralement remis de la mort de son prédécesseur à qui il avait méchamment refusé d’aller se faire soigner à temps, dans des centres spécialisés. Cela pourrait peut-être attendrir l’homme « Faure » de Lomé et sauver ainsi son frère Kpatcha d’une mort qui, si elle advenait, ne serait pas si naturelle qu’elle n’y paraîtrait.

Hamadou GADIAGA


Comments
  • De toutes les façons Dieu est juste et sait tout ce que la famille Yasimgbé à fait au peuple Togolais comme tord et mal. Kpatha est peut être victime et bourro. Faure va finir par payer aussi. Proverbe: un jour pour le propriétaire et dix jours pour le voleur. WAIT and see!

    7 août 2015
  • Il sortira les pieds devant. C”est sûr !

    7 août 2015

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