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VALIDATION DU CHOIX DE DENIS KADIMA A LA TETE DE LA CENI PAR LE PRESIDENT CONGOLAIS


Six confessions religieuses sur  huit l’avaient choisi pour être à la tête de la CENI (Commission électorale nationale indépendante) de la RDC (République démocratique du Congo). Ce choix, on se rappelle, avait suscité l’ire des confessions catholique et protestante, de l’opposition politique et des organisations de la société civile. Le principal argument brandi pour récuser Denis Kadima, puisque c’est de lui qu’il s’agit, est qu’il est proche du président Tshisekedi, donc censé rouler pour la chapelle de ce dernier. C’est pourquoi les contestataires avaient approché l’Assemblée nationale pour que cette institution recale l’homme. Peine perdue. L’Assemblée nationale a entériné, le 16 octobre dernier, la désignation de Denis Kadima. C’est alors que les contestataires se sont tournés vers le président Tshisekedi. Là aussi, la déception était au rendez-vous. En effet, ce dernier a annoncé,  le 22 octobre dernier, avoir décidé de confirmer le choix controversé de Denis Kadima au poste de président de la commission électorale. Pour la plateforme d’opposition Lamuka, dirigée par Martin Fayulu et Aldophe Muzito, l’entérinement présidentiel n’est ni plus ni moins qu’une «  déclaration de guerre au peuple congolais ». Dès lors, la coalition envisage « descendre dans la rue pour chasser Kadima de la CENI et pour exiger un consensus le plus rapidement possible entre les parties prenantes ». La très puissante Eglise catholique et l’Eglise protestante, pour le moment, n’appellent pas leurs fidèles à faire pareillement pour chasser Kadima de la CENI, mais elles ne sont pas moins remontées contre la validation du choix de Kadima par Tshisekedi. Le parti Lumumbiste unifié aussi, est dans le même état d’esprit. Même au sein de l’Union sacrée de la Nation, du nom de la coalition qui soutient Tshisekedi, l’on enregistre des partis qui sont vent debout contre le choix présidentiel.

 

Félix Tshisekedi se prépare à marcher sur les pas de Joseph Kabila

 

Le parti de Moïse Katumbi et celui de Jean-Pierre Bemba en font partie. Seuls le parti du président, c’est-à-dire l’UDPS (Union pour la démocratie et le progrès social) plus quelques partis qui comptent pour du beurre sur l’échiquier politique du Congo, applaudissent des deux mains la décision de Tshisekedi d’entériner la désignation du très controversé Denis Kadima. Augustin Kabuya, secrétaire général de l’UDPS, justifie la position du parti présidentiel par l’argument suivant : « Si le chef de l’Etat a pris cette décision, c’est par rapport à la réalité. Notre pays est un pays laïc. Devant nous, il y avait huit confessions religieuses. Six s’étaient prononcées pour un candidat et les deux autres avaient opté pour une autre voie, la voie de la terre brûlée ». Pour le parti du caméléon politique congolais devant l’Eternel, c’est-à-dire le parti de Lambert Mende, autre soutien de Tshisekedi, ce qui compte, c’est le cadre légal. Du côté donc des irréductibles du camp présidentiel, l’on invoque  la loi du nombre (NDLR : six confessions religieuses sur huit ont choisi Denis Kadima) et  la légalité pour justifier le choix présidentiel. L’on peut prendre le risque de leur opposer ceci : que vaut la légalité sans la légitimité ? En tout cas, la majorité, dans certaines circonstances, n’a pas toujours raison. Dans le cas d’espèce, et sans vouloir chercher forcément à classer les confessions religieuses sur la base du nombre de leurs fidèles, l’on peut se risquer à dire que les six confessions religieuses qui ont soutenu le choix de Denis Kadima, réunies, pourraient ne pas avoir le nombre de fidèles de l’Eglise catholique et de l’Eglise protestante. Et puis, Tshisekedi a-t-il la mémoire si courte au point qu’il ait déjà oublié la part contributive de l’Eglise catholique à la victoire  du peuple congolais contre la dictature des Kabila ?  Enfin, dans un domaine aussi sensible et délicat que celui du choix du président de la CENI, ne vaut-il pas mieux aller vers le consensus que d’opérer un choix qui risque de brûler le pays ? Dans certains pays, comme le Burkina par exemple, sous la sage décision du chef de l’Etat, c’est le consensus et la légitimité qui ont été préférés à la légalité, lorsque l’opposition avait récusé le choix d’un des commissaires pour être le patron de la CENI. En tout cas, personne ne peut dénier à Martin Fayulu, le droit de contester la légitimité de Denis Kadima, lui dont la victoire à la présidentielle de 2018 a été volée par le sulfureux Corneille Nangaa, le prédécesseur de Denis Kadima. Et Félix Tshisekedi le sait. L’Eglise catholique, à l’époque des faits, avait courageusement dénoncé ce braquage électoral. Si donc aujourd’hui, Tshisekedi, envers et contre tous, a entériné le choix d’un homme aussi controversé à la tête de la CENI, c’est qu’il se prépare,  peut-on dire, à marcher sur les pas de Joseph Kabila en matière de manipulation des résultats électoraux. De ce point de vue, l’on peut en déduire que Félix Tshisekedi a désormais son « Corneille Nangaa », c’est-à-dire un patron de la CENI, qui est prêt à s’asseoir sur sa conscience pour manipuler les résultats, selon les desiderata de son mentor. De ce point de vue, si en 2023, le pays plonge dans une  crise postélectorale, à cause d’une éventuelle partialité de Denis Kadima, la personne qui aura travaillé en amont à cela, c’est bel et bien Félix Tshisekedi. Mais il n’est pas exclu qu’entre-temps, Denis Kadima fasse montre de devoir d’ingratitude envers Tshisekedi en faisant le choix de servir la RDC, et rien que la RDC. Pour cela, il lui faut un supplément d’âme. C’est tout le mal qu’on lui souhaite.

 

Pousdem Pickou       

   


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