INTERPELLATION ET RELAXE D’ANCIENS DIGNITAIRES POUR VICE DE FORME : N’est-on pas allé trop vite en besogne ?

Il ne fait pas bon être ancien dignitaire du régime de Blaise Compaoré. Car, cela fait à peu près deux semaines que l’on assiste à une vague d’arrestations ou d’interpellations de ceux-là qui nous gouvernaient hier encore. Anciens ministres, ex-maires et conseillers, anciens directeurs généraux et j’en passe, sont traqués jusque dans leurs derniers retranchements. On reproche à beaucoup d’entre eux des malversations financières présumées, sur fond de surfacturations. Quant à d’autres, notamment les ex-maires et conseillers, ils sont accusés de manque de transparence dans les attributions de parcelles. J’avoue que j’adhère entièrement à cette démarche des autorités de la transition, qui consiste à assainir et à moraliser la gestion de la chose publique dans un pays où certains se croyaient tout permis. Car, que n’a-t-on pas vu ici au Burkina Faso sous Blaise Compaoré ? Des individus venus du néant qui, subitement, roulaient carrosse. Certains même qui mangeaient à peine à leur faim se sont retrouvés, en un an seulement, avec plusieurs villas construites à coups de millions de F CFA. Où ont-ils eu tout cet argent ? Je me demandais parfois s’il ne pleuvait pas de l’argent dans certains quartiers. Sinon, je ne comprenais pas l’avènement soudain de ces nouveaux riches qui prenaient du plaisir à narguer ceux qui peinaient parfois à s’assurer un seul repas par jour. Et c’est maintenant que je commence à comprendre les choses. Car, beaucoup de gens dans ce pays-là, se sont enrichis illicitement. Si ce n’est sur le dos des autres, c’est sans doute sur le dos de l’Etat qui était devenu la vache laitière de certains privilégiés. C’est pourquoi je tire mon chapeau aux autorités de la Transition qui commencent à demander des comptes à certains anciens barons. Je sais que tous ne sont pas fautifs. Car j’en connais qui étaient d’une loyauté exemplaire, si bien qu’ils ne touchaient jamais à ce qui ne leur appartenait pas. Ces gens-là dorment tranquilles aujourd’hui. Ceux qui ont le sommeil trouble sont ceux-là qui ont quelque chose à se reprocher. Et Dieu seul sait s’ils sont nombreux. En tout cas, l’heure de la reddition des comptes a sonné. Les autorités de la transition semblent avoir sifflé la fin de la récréation. Pour ce faire, je les encourage à aller jusqu’au bout de leur logique, en prenant le soin de s’entourer de toutes les précautions judiciaires pour éviter que des erreurs de forme ou de procédure ne profitent à certains anciens dignitaires. Je le dis parce que j’ai l’impression que la transition fait beaucoup dans l’amateurisme. Sinon, comment comprendre qu’elle interpelle des gens pour les relaxer presqu’aussitôt, pour vices de procédure. Cela dénote d’un tâtonnement.

Il aurait fallu procéder à l’installation des membres de la Haute Cour de justice avant de procéder aux interpellations

Le gouvernement ignorait-il qu’un tribunal ordinaire ne peut pas juger un ancien ministre ? N’est-on pas allé trop vite en besogne ? Je n’y comprends rien. Dans tous les cas, il en a pris pour son grade, puisque le tribunal s’est déclaré incompétent pour juger un ancien ministre. Il aurait fallu tout simplement procéder à l’installation des membres de la Haute Cour de justice avant de procéder aux interpellations de ceux-là qui ont commis des gaffes dans leur gestion. Cela aurait été plus élégant à mon sens. Et puis, je ne veux pas que l’on choisisse n’importe qui pour faire partie de cette juridiction spéciale. Il faut des gens intègres et non des gredins qui, eux-mêmes, sont loin d’être de bons exemples. Je le dis parce que dans ce pays-là, on ne met pas toujours les gens qu’il faut à la place qu’il faut. Donc, vous êtes prévenus puisque je vous tiens à l’œil. Cela dit, je souhaite que tous ceux de l’ancien régime ou de l’ex-opposition qui seront épinglés, aient droit à un procès équitable digne de ce nom. Car, moi je suis contre les règlements de comptes. A bon entendeur !

« Le Fou »