HomeA la uneNKURUNZIZA ET KAGAME : Deux attardés démocratiques

NKURUNZIZA ET KAGAME : Deux attardés démocratiques


 

C’est bien la première fois que les spécialistes et analystes de la scène politique burundaise ont le même avis sur l’évolution politique du pays. En effet, malgré les promesses de Pierre Nkurunziza de respecter la Constitution de son pays, tous ou presque avaient émis des doutes sur la bonne foi du président-pasteur qui était arrivé en 2010 au sommet de l’Etat en enjambant les cadavres de plusieurs centaines de ses compatriotes. Il n’y a pas longtemps, nous nous interrogions sur ce que vaut la parole « d’un assoiffé de pouvoir ». Avec le temps, et sous la pression de la société civile burundaise ainsi que de la communauté internationale, l’homme a fini par tomber le masque : il est atrocement gagné par la boulimie excessive du pouvoir. Depuis lors, la presse privée burundaise, les ONG et les organisations de la société civile du Burundi n’ont eu de cesse d’interpeller la communauté internationale sur les dangers que le Pasteur de Bujumbura faisait planer sur la démocratie dans son pays. Aujourd’hui, bien que seul contre tous, Nkurunziza continue d’avancer, fidèle à sa seule logique qui ne reconnaît aucune démocratie en dehors de celle imaginée par lui-même et qui doit lui tracer la voie du pouvoir absolu et à vie.

Aujourd’hui, alors que le Burundi est continuellement secoué par d’importantes manifestations hostiles à son troisième mandat, Pierre Nkurunziza, sourd aux nombreux appels à la raison qui proviennent de toutes parts, enfermé dans sa bulle, prépare avec ses partisans les élections locales qui précéderont la présidentielle. L’opposition, pour ne pas servir de faire-valoir, a tout simplement appelé la population au boycott. Et ce n’est pas tout. L’Union européenne annonce qu’elle n’enverra pas d’observateurs pour surveiller les élections. Et l’Eglise catholique qui avait déjà donné de la voix face aux dérives de Nkurunziza, vient également de se retirer du processus électoral.

De toute évidence, c’est la meilleure réponse que l’on pouvait apporter à l’entêtement de Pierre Nkurunziza. En effet, on voit mal de quelle manière l’opposition aurait pu participer sereinement à cette compétition dont les règles du jeu sont dictées par Nkurunziza. Sur le terrain, les différents leaders de l’opposition sont pour la plupart entrés en clandestinité, craignant pour leur vie et pour celle de leurs familles. Les organes de presse privée, quant à eux, ont tous été saccagés par les militaires loyalistes et des milices acquises à la cause du parti présidentiel. Les seuls canaux d’information sont désormais ceux qui appartiennent à l’Etat. Dans ces conditions, les jeux sont largement faussés et il est clair que Nkurunziza, en organisant ces élections, ne cherche rien d’autre que son maintien au pouvoir. Peu importe si le Burundi doit sombrer. Et pour se fabriquer une légitimité, il se fera probablement accompagner par des « candidats motards » pour se donner un semblant de victoire du reste programmée avant même que le premier bulletin ne soit tombé au fond de l’urne. On peut dire que l’opposition burundaise a eu le nez creux.

Instruit par la malheureuse expérience du pasteur de Bujumbura, Paul Kagamé tente de se sédimenter au pouvoir

En refusant de se mettre sur la ligne de départ, elle coupe l’herbe sous les pieds du dictateur qui se rappellera sans doute cette mise en garde de Corneille : « A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire ». Mais peu importe, l’essentiel pour lui étant de rester aux commandes de l’Etat.

Instruit par la malheureuse expérience du pasteur de Bujumbura, Paul Kagamé, un autre attardé de la démocratie dans la région des Grands lacs, tente avec plus ou moins de maladresse, de se sédimenter au pouvoir. Mais au lieu de choisir l’affrontement avec son peuple, lui a choisi un tour de passe-passe consistant à lui faire signer un contrat machiavélique, au terme duquel le peuple lui permettra de renouveler à volonté son bail. La mise en route de ce plan a commencé par l’annonce par le parlement, d’une pétition de plus de deux millions de signatures de citoyens rwandais en faveur d’une réforme de la Constitution. Comme quoi, tous les dictateurs ont le même dessein envers leur peuple, mais tous n’usent pas de la même stratégie envers lui. Bien sûr, il ne s’agit là que d’une mise en scène bien élaborée, qui ne trompe que ceux qui veulent s’en laisser conter. Mais elle n’en révèle pas moins la volonté de Kagamé de se prendre pour un messie, le seul capable de sauver le peuple. L’homme mince de Kigali, il est vrai, peut se vanter d’avoir un bilan honorable, qui renforce sa sympathie auprès du peuple rwandais. Mais, ce n’est pas une raison suffisante pour refuser l’alternance à la tête de l’Etat. Les cimetières de tous les pays sont pleins de gens indispensables. L’ancien président ghanéen, John Jerry Rawlings, le père de la démocratie ghanéenne, peut être fier de son bilan. Pourtant, il n’avait pas hésité à céder volontairement son fauteuil, au terme de son mandat. Alpha Omar Konaré du Mali a tout aussi beaucoup fait pour son pays ; et pourtant, il a refusé de répondre aux sirènes des Raspoutine qui l’invitaient ardemment à solliciter un troisième mandat. Kagamé devait plutôt se réjouir d’avoir fait ce qu’il a pu et céder la place à des gens tout aussi compétents. Assurément, le Rwanda n’en manque pas. A moins que cet entêtement à rester ne cache une volonté de maintenir aussi longtemps que possible certains cadavres dans les placards. Histoire de ne pas se faire rattraper par son passé trouble. En cela, le duo Nkurunziza / Kagamé a un dénominateur commun : ils sont tous les deux des attardés démocratiques.

Dieudonné MAKIENI 


Comments
  • M. Dieudonné MAKIENI, avant d’insulter le très populaire Président africain du Burundi, interrogez vous d’abord.
    Au Burundi, il n’y a pas eu changement de Constitution. La Cour Constitutionnelle du Burundi, institution qui est garante de l’Etat de Droit Démocratique des Barundi, a sorti un arrêté le mardi 5 mai 2015 qui explique en 7 pages que le Président actuel du Burundi, S.E. Nkurunziza Pierre peut se représenter une dernière fois à la Présidentielle: L’arret-de-la-cour-constitutionnelle-rccb-303 http://burundi-agnews.org/wp-content/uploads/2015/05/arret-de-la-cour-constitutionnelle-rccb-303.pdf
    Moi j’aurai voulu que M. Dieudonné MAKIENI vous reveniez sur l’argumentaire juridique de cette Cour. Mais, même, en tant que démocrates, et Panafricain, je m’interroge sur votre façon d’écrire ce que vous écrivez.
    La France, la Belgique et les USA, avec le Réseau de l’ancien Dictateur HIMA Pierre BUYOYA, ont tenté un coup d’Etat à Bujumbura le mercredi 13 mai 2015. Le coup d’Etat a manqué.
    Le Burundi, et comme le Burkina Faso, un pays de notre beau vieu continent l’Afrique

    28 mai 2015
    • Monsieur ,
      De qu’elle Cour Constututionnelle burundaise vous parlez ?
      Celle du Burundi n’en est pas une malheureusement.
      Il s’agit plutot d’un petit groupe de petits serviteurs zélés et peureux auxquels Nkurunziza a donne le titre de juges pour tordre le coup à Accord d’Arusha et la Constitution.
      Les experts du droit constitutionnel ont été témoins de cette farce.
      Seul le juge Sylvere voulait dire le droit et il a été contraint de fuir le pays !!!!
      Quel est ce pays ou les juges donnent le verdict en fuyant la terre natale ?
      C’est le Burundi de Nkurunziza Pierre.

      29 mai 2015

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