CHERIF SY, président du CNT à propos du putsch manqué : « C’est bien que nous ayons subi ce que nous avons subi »
L’homme a joué un rôle important lors du coup d’Etat manqué du 16 septembre 2015 puisque de sa cachette, même s’il déclare ne s’être pas caché, il a su galvaniser le peuple pour faire face au coup de force de Gilbert Diendéré et ses hommes. Lui, c’est Moumina Chérif Sy, président du Conseil national de la Transition (CNT) que nous avons rencontré le mercredi 7 octobre 2015, dans son bureau. Les échanges ont essentiellement porté sur la parenthèse du Conseil national pour la démocratie (CND) que le Burkina a vécue, ces derniers temps.
« Le Pays » : Comment avez- vous accueilli le coup d’Etat perpétré par le général Diendéré?
Chérif Sy : Comme le peuple burkinabè l’a accueilli, en réagissant contre. Vous voulez que je l’accueille comment ?
Vous y attendiez-vous ou cela vous a-t-il surpris ?
Dès le début de la Transition, je crois qu’il y a eu suffisamment de signes avant-coureurs dès décembre 2014, février et avril 2015. Donc, c’est un processus qui est allé crescendo, puisque nous nous approchions de la date des élections et que nous étions à quelques jours de l’ouverture de la campagne. Ils ont décidé certainement de jouer leur va-tout.
Les autorités de la Transition savaient que quelque chose se tramait. Pourquoi n’avez-vous pas réagi ?
Quel que soit le niveau de responsabilité des uns et des autres, nous avons, pour d’aucuns, pêché par naïveté. Notre société repose sur un certain nombre de valeurs qui ont certainement été prises en compte. Ce qui a fait que les autorités de la Transition n’ont pas voulu prendre de mesures fortes à l’encontre de certaines personnes ou de certaines organisations, dès le début de la Transition. En laissant faire celles-ci, elles pensaient qu’elles avaient le pouvoir de s’affirmer autrement en marge de la République par des forces ou par des moyens qui, somme toute, sont illégaux. Si vous vous rappelez de la crise d’avril, c’était des prémices, mêmes pas des signes qui ne trompaient pas. On a voulu simplement sauver une situation pour que nous puissions aller aux élections. Donc l’un dans l’autre, on pourrait penser qu’on aurait pu taper du poing sur la table. Vous savez, dans une transition, il y a tous les jours des préoccupations à résoudre, des questions à traiter, etc. L’un dans l’autre, il se pourrait qu’il y ait eu des défaillances à certains niveaux ou que l’on ait pu être moins regardant sur d’autres points. L’essentiel est que le coup d’Etat est arrivé. Peut-être aussi que c’était le plan de Dieu.
Vous avez joué un rôle important dans l’échec du coup d’Etat. Où étiez-vous caché ?
On vous a dit que j’étais caché ? J’étais au Burkina, c’est le plus important. J’étais avec le peuple. Je partageais le même combat. 99, 99% du Burkina était un territoire libre où les putschistes n’osaient pas accéder. Donc il n’y avait que Ouagadougou qui était occupée. Il est évident que dans ces conditions, la situation n’est pas aussi facile que si vous étiez dans une situation normale. Mais ce sont des conditions qui font partie de notre engagement dans la lutte que nous menons.
Dans quelles conditions faisiez-vous vos différentes déclarations au moment de la crise ?
Nous sommes issus d’une certaine culture militante. On est issu aussi d’un certain professionnalisme journalistique qui nous a toujours conseillé un minimum de précautions, d’attitude. Donc de ce fait, ce minimum, on l’a en permanence. Cela peut paraître étonnant pour certains, mais j’étais dans mon rôle et dans mon élément.
Etiez-vous parti avec votre famille ou seul ?
Vous pensez que dans ces conditions on peut se balader avec femmes et enfants ? La question ne sied pas ! Aussi bien pour moi que pour ma famille, il y a un minimum de précautions que nous prenons en temps normal comme en temps de guerre.
Etes-vous pour une prolongation de la Transition ?
Si les élections n’ont pas lieu le 11 octobre et même si elles se déroulent le 12 octobre, il y a forcément un impact quelque part et c’est un minimum. Au-delà, il faut que nous apprenions à aller aux questions essentielles et ne pas nous enfermer dans des soupçons ou dans quoi que ce soit. Notre pays s’est retrouvé dans une situation historique suite à une insurrection et le peuple a estimé qu’un certain nombre de ses fils pouvait assumer des tâches et c’est dans ce sens que des missions leur ont été confiées. Qu’on leur permette de mener ces missions à bon port et qu’on arrête de soupçonner les gens d’avoir un agenda caché. Il faut qu’on mette balle à terre et que les uns et les autres soient sereins pour déterminer les questions essentielles. Le chef de l’Etat a clairement dit qu’il va prendre attache avec les forces politiques et qu’ensemble, ils vont déterminer une date consensuelle. Ce n’est pas un organe de la Transition qui va décider de la date des élections, mais les forces vives, les forces politiques, les signataires de la Charte de la transition qui vont se retrouver pour décider d’une date raisonnable. Sinon, la CENI a déjà déclaré qu’elle était prête pour organiser à tout moment ces élections. Il s’agit de faire des réajustements. Personne n’a intérêt à traîner par rapport à la tenue des élections. Ce qui est sûr, ces élections vont se dérouler au mois de novembre et il n’y a aucun doute.
Quel sort, selon vous, doit être réservé au général Gilbert Diendéré ?
Je ne suis pas de la Justice. Il y a une procédure judiciaire qui est engagée et je fais confiance à toutes ces autorités chargées de l’enquête pour dire le droit. Je n’ai pas à choisir le sort qui doit être réservé à Gilbert Diendéré puisque la Justice se chargera du sort des putschistes et leurs complices.
Quelles sont les leçons que vous tirez de ce que vous venez de vivre ?
Je dirai que c’est bien que nous ayons subi ce que nous avons subi ici et maintenant, tout en déplorant nos morts et nos blessés parce que nous avons résolu une question principale qui était posée depuis le début de la Transition. Imaginez si nous n’avions pas eu cette parenthèse douloureuse, que nous allions aux élections et qu’au soir des élections, on nous prenne les résultats en otage. Qu’est-ce que nous ferions ? Dieu merci, tout est maintenant résolu, mais douloureusement pour nous. En termes de gain, tout en déplorant le nombre de morts et de victimes, c’est qu’en l’espace d’une semaine, le Burkina a fait un bond démocratique de plus d’un demi-siècle. La leçon principale que chacun doit retenir est que ceux qui viendront à diriger ce pays, jamais, au grand jamais, ne pourront imposer à ce peuple burkinabè quoi que ce soit s’il n’en veut pas. C’est ce que nous pouvons retenir parce que nous avons fait un grand bond en termes de démocratie et de maturité politique.
Qu’est-ce que vous auriez aimé dire que nous n’avons pas pu aborder ?
Nous devons tous retrouver la paix du cœur, continuer à prier pour ceux qui sont des croyants, parce qu’il n’y a pas de doute que la main de Dieu était dans la résolution des crises vécues par le Burkina. En plus, il nous appartient de nous féliciter d’avoir une jeunesse formidable, un peuple dont il faut être fier parce le courage qu’il a démontré pendant ces jours troubles, est inestimable et inexplicable. Cela donne un exemple à tous les pays d’Afrique. Il nous faut souligner qu’il nous appartient de célébrer, à l’occasion de ce putsch, notre Armée nationale, l’Armée républicaine et patriotique qui s’est réconciliée avec son histoire, ses valeurs, ses missions fondamentales mais plus encore, avec son peuple. Et ce sont autant de choses que nous devons capitaliser afin que le Burkina continue de rayonner au sein des nations.
Propos recueillis par Antoine BATIONO et Françoise DEMBELE
LoiseauDeMinerve
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Félicitations Président ! Vous vous seriez tapi dans l’ombre attendant la fin comme tout bon politicar mangeur repu de beefteck et de Porto ou de scotch. Ici là vous avez montré le militant révolutionnaire.Bravo ! Bravo ! Bravo ! Il serait bon de ramener la conscription, le passage sous les drapeaux des jeunes. Ça peut servir d’avoir des rudiments.
8 octobre 2015