SASSOU CHEZ KABILA : Quand la peste parle au choléra
Hier, 14 février 2018, à Kinshasa, à l’initiative du président du Congo-Brazzaville en sa qualité de président en exercice de la Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs (CIRGL), s’est tenue une réunion tripartite Angola-Congo Brazzaville-République démocratique du Congo. Au menu des échanges entre Denis Sassou Nguesso, Joao Lourenço et Joseph Kabila, la situation sécuritaire et la question des élections en RDC. De prime abord, l’initiative ne manque pas de pertinence et est, de ce fait, à saluer car les chefs d’Etat des Grands Lacs se montrent préoccupés par la situation au Congo et au-delà, par la stabilité de la sous-région. On le sait, la RDC, en plus de son état comateux consécutif à la grave crise politique qu’elle vit, connaît des attaques de bandes armées qui la parcourent sans discontinuer, mettant sous coupe réglée des régions entières. Ce chaos, en raison de ses excroissances ethniques, humanitaires, politiques et militaires, s’avère très contagieux pour les pays voisins. Et le ministre des Affaires étrangères de l’Angola, Manuel Domingos Augusto, ne s’est pas trompé en déclarant ceci : «La RDC est la mère de toutes les crises, car ce qui s’y passe affecte toute la région des Grands Lacs ». Dans la même veine, du côté de Brazzaville, l’on soutient que « quand Kinshasa éternue, Brazzaville s’enrhume ! ». Face aux risques d’explosion, une réponse communautaire et des plus appropriées, était donc attendue. Cela dit, l’on peut se demander ce que Sassou peut bien dire à Kabila en matière de gouvernance politique. Sans rien exagérer, on peut affirmer que c’est la peste qui parle au choléra.
Sassou est mal placé pour donner des leçons à Kabila
Car, faut-il le rappeler, l’hôte de Kabila lui-même ne s’est pas privé de tripatouiller la Constitution de son pays pour se maintenir ad vitam aeternam au pouvoir et ne cesse de martyriser ses opposants à longueur de journée. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est mal placé pour donner des leçons de morale à Kabila et l’on imagine aisément, de ce fait, que c’est pour vendre sa propre recette qu’il est passé de l’autre côté de la rive. Les Kinois devraient s’en offusquer et récuser cette médiation qui a toutes les caractéristiques d’un marché noir. Toutefois, le rai pourrait provenir du président angolais qui, seul, porte dans cette chambre basse, les attributs d’un démocrate. Et même là, il faut attendre de voir l’homme à l’œuvre, car il a été le bras armé d’un dictateur féroce et silencieux, Eduardo Dos Santos pour ne pas le nommer, qu’il a servi dans l’ombre pendant près de trois décennies. Il connaît donc bien la recette. Il reste à savoir s’il voudra participer au marché. En tout état de cause, les Congolais devraient plus s’inquiéter de cette rencontre au sommet que d’en attendre véritablement des résultats probants pour relancer le processus électoral en panne. Il faut même craindre qu’elle ne soit l’occasion, pour des gens qui ont en commun un passé dans le maquis et qui ont une forte propension à l’usage des armes pour trancher les débats dans l’arène politique, de formaliser leur union contre la démocratie en prenant prétexte sur les problèmes sécuritaires dans la région des Grands Lacs.
SAHO