OUVERTURE D’UN PROCES EMBLEMATIQUE SUR FOND D’ATTAQUE TERRORISTE A BAMAKO: Les défis restent entiers
Alors que l’emblématique procès des affaires de l’avion présidentiel et des équipements militaires était attendu pour s’ouvrir le 17 septembre dernier à Bamako, l’actualité sera bousculée dans la capitale malienne qui se réveillera sous des tirs de terroristes qui ont attaqué un camp de gendarmerie. La précision sera donnée dans la matinée par l’armée à travers un communiqué invitant les populations au « calme et à suivre les consignes des forces de sécurité », après avoir indiqué que « la situation est sous contrôle ». Dans le même communiqué, on apprend que la cible était l’école de gendarmerie de Faladiè où les terroristes ont tenté de s’infiltrer tôt le matin. S’il est difficile, a priori, d’établir un lien entre l’attaque d’hier matin et l’ouverture de ce procès iconique dont les faits remontent à 2014 et qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive sur les rives du fleuve Djoliba, le moins que l’on puisse dire, c’est que les défis aussi bien sur le plan judiciaire que sécuritaire, restent entiers. D’autant plus que c’est un procès qui implique d’anciennes hautes personnalités civiles et militaires dont certains, à en croire certaines sources, étaient gardés dans le camp de gendarmerie en question.
L’attaque en pleine capitale, reste autant un symbole fort qu’une invite aux autorités de la transition à garder toujours l’arme au pied
De là à voir dans cette attaque plutôt osée, une connexion voire de la complicité entre certains mis en cause et les terroristes, il y a un pas que l’on pourrait d’autant plus franchir que la concomitance des événements, au cas où un lien viendrait à être établi, sonne comme une volonté d’empêcher la tenue dudit procès. A quelles fins ? Bien malin qui saurait répondre à cette question. Toujours est-il qu’au-delà du coup d’éclat et de son retentissement médiatique, l’attaque d’hier, en pleine capitale, reste autant un symbole fort qu’une invite aux autorités de la transition à garder toujours l’arme au pied. Car, c’est la preuve que malgré les efforts, beaucoup reste encore à faire pour venir à bout de la bête immonde. Pour le reste, une fois passés les moments de frayeurs, il est impératif que Bamako retrouve tout son calme dans les plus brefs délais. C’est aussi le lieu d’inviter les Maliens à se donner la main pour mieux faire face aux défis du moment. Et aujourd’hui plus qu’hier, l’armée doit savoir montrer son unité, pour ne pas laisser de failles profitables à l’ennemi commun qui a juré la perte du pays. Déjà, il est heureux que cette attaque qui a été, du reste, revendiquée par le JNIM, ne cache pas a priori un malaise au sein de l’armée malienne, comme beaucoup ont pu s’interroger, au début des tirs, sur l’identité et la motivation des assaillants. Car, ce n’est pas dans la guerre entre frères d’armes que l’on construit le pays. Mais c’est plutôt main dans la main que les Maliens pourront aborder les chantiers du développement qui ne manquent pas, si l’on s’en tient au discours du président Assimi Goïta, à l’occasion de la célébration de l’an 1 de la création de l’Alliance des Etats du Sahel (AES).
Autant il est impératif d’envoyer un signal fort dans la lutte contre l’impunité, autant il faut éviter de donner à ce procès, des allures de chasse aux sorcières
Pour en revenir au procès, il reste autant un défi pour la Justice malienne que c’est elle qui a relancé, en 2020, le dossier de ces deux affaires brûlantes classées sans suite en 2018. Des affaires qui portent sur l’achat d’un avion présidentiel et des contrats d’équipement militaires passés par le gouvernement de l’époque, et dans lesquelles des sommes faramineuses ont été engagées. Toute chose qui fonde les soupçons de la Justice malienne qui subodore des surfacturations et d’importants détournements. En somme, des possibilités de crimes économiques et financiers qui mériteraient d’être punis pour l’exemple. Tout le mal qu’on lui souhaite, c’est de parvenir à faire la lumière dans cette affaire à travers un procès juste et équitable. Et que ceux qui seront reconnus coupables, se voient appliquer la rigueur de la loi pour permettre à la République de repartir du bon pied. Mais que ceux qui seront innocentés, puissent laver leur honneur aux yeux de l’opinion publique. Cela est très important. Car, autant il est impératif d’envoyer un signal fort dans la lutte contre l’impunité, autant il faut éviter de donner à ce procès, des allures de chasse aux sorcières dont le verdict est fixé d’avance. C’est dire si la Justice malienne joue quelque part aussi sa crédibilité dans cette affaire. En tout état de cause, le Mali a besoin de panser ses plaies. Et cela passe aussi par de telles épreuves.
« Le Pays »