TRANSITION POLITIQUE AU GABON : Oligui Nguema dans les pas de Amadou Toumani Touré et Salou Djibo ?
Initialement prévue pour le mois d’août 2025, la présidentielle devant signer le retour du Gabon à l’ordre constitutionnel, a été ramenée au 22 mars prochain, par le président de la transition, le Général Brice Clotaire Oligui Nguema. Une décision qui sonne d’autant plus comme une symphonie achevée pour les démocrates du continent, que le président de la Transition, à en croire certaines sources, renoncerait à briguer la magistrature suprême alors même que la Charte de la Transition ne le lui interdit pas formellement, contrairement aux autres membres de l’équipe intérimaire qui ne sont pas autorisés à se présenter. Et c’est peu dire que pour de nombreux observateurs, cette Charte de la transition érigée en loi fondamentale, semblait taillée à la mesure du Général-président que l’on ne voyait pas nettoyer les écuries…des Bongo pour y installer un poulain. Et pourtant ! A en croire des informations qui auraient fuité de la Présidence, l’homme du 30 août 2023, pourrait surprendre en remettant le pays sur les rails de la démocratie plus tôt que prévu.
Une chose est de tenir des élections, une autre est de faire de ces élections, un exemple de transparence
Qui plus est, en n’étant pas juge et partie d’une course au fauteuil présidentiel dont l’occasion aurait été belle pour lui, de légitimer son pouvoir par la voie des urnes. Mais le Général gabonais qui avait promis, dès les premiers instants de son coup d’Etat, de remettre le pouvoir aux civils, au terme d’une transition qui se voulait la plus courte possible, semble tenir à sa parole d’officier. En tout cas, en le prenant au mot, on se demande s’il s’inscrira dans la lignée de Amadou Toumani Touré (ATT) et Salou Djibo ; deux officiers supérieurs des armées malienne et nigérienne, qui s’étaient inscrits en redresseurs de la démocratie dans leurs pays respectifs, en ne montrant pas de volonté affichée de conserver le pouvoir qu’ils avaient conquis par la force des armes. Et Dieu seul sait si leurs actes les ont grandis aux yeux des démocrates du continent. Pour en revenir au Gabon qui se prépare à un retour anticipé à l’ordre constitutionnel, le pari est d’autant plus grand que le pays revient de loin, après plus d’un demi-siècle de dynastie des Bongo, et l’on espère que le processus ne sera pas biaisé. Car, une chose est de tenir des élections pour rétablir l’ordre constitutionnel, une autre est de faire de ces élections, un exemple de transparence et d’inclusivité qui ne vise pas à remplir de simples formalités. C’est pourquoi on se demande si le scrutin sera ouvert et si, pour autant qu’il tienne promesse, le Général ne travaillera pas à favoriser un candidat s’il ne choisit pas de faire peser la balance en faveur d’un homme-lige. Pour le reste, on espère que la date du 22 mars sera tenable quand on connaît toutes les contraintes techniques, logistiques, matérielles et financières liées à l’organisation d’un tel scrutin.
Aussi noble que soit la démarche du Général Nguema, elle ne manque pas d’interroger sur ses motivations profondes
Déjà, la révision anticipée des listes électorales, qui a commencé le 2 janvier dernier pour se poursuivre jusqu’au 31 du même mois, après l’adoption d’une nouvelle Constitution votée par référendum le 16 novembre dernier, est un bon signal. Et cela traduit à souhait la volonté des autorités intérimaires de Libreville, de tenir un calendrier électoral qui n’était pas gagné d’avance. En tout état de cause, aussi noble que soit la démarche du Général Brice Oligui Nguema, elle ne manque pas d’interroger sur ses motivations profondes ayant conduit à cette décision d’avancer la date de la présidentielle, et le pourquoi de cette volonté subite d’accélérer le cours de la transition. Mais, en attendant de savoir à quels impératifs répond cette volonté de tourner rapidement la page de la transition voire de passer la main, c’est un acte de renoncement de soi, si cela se confirme, qui contribuera, sans doute, à augmenter son capital de sympathie aux yeux des démocrates du continent noir. Lequel acte pourrait lui ouvrir d’autres portes si ce n’est lui permettre de revenir au pouvoir par la grande porte, en troquant le treillis contre le costume. A l’image du Général malien, Amadou Toumani Touré qui avait dirigé le Mali de 1991 à 1992, à la faveur du coup d’Etat qui a renversé le Général Moussa Traoré. Avant de passer la main aux civils et revenir quelques années plus tard en force, pour se faire élire en 2002, puis en 2007 pour un second mandat.
« Le Pays »