HomeA la uneARRIVEE DE SOLDATS AMERICAINS AU CAMEROUN CONTRE BOKO HARAM : Que pourront faire les boys ?

ARRIVEE DE SOLDATS AMERICAINS AU CAMEROUN CONTRE BOKO HARAM : Que pourront faire les boys ?


 

Les lignes commencent à bouger dans le cadre de la  lutte contre Boko Haram  au Cameroun, avec une nouvelle qui tranche avec le macabre décompte des victimes. En effet,  la Maison Blanche annonce l’envoi de 300 militaires au Cameroun, à la demande du gouvernement de Yaoundé. Ce déploiement a pour mission de conduire des missions de renseignement et de reconnaissance aérienne, précise le porte-parole de Barack Obama. Ces informations seront utilisées pour renforcer la lutte antiterroriste en cours sur le terrain. « Je souhaite être clair sur la mission des militaires américains déployés au Cameroun : ils sont armés, mais ils sont armés pour leur protection et pour assurer la sécurité des troupes. Ils n’ont pas de mission de combat», a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche.

L’Exécutif camerounais se frotte naturellement les mains

C’est ce qui manquait dans la lutte contre ces fous d’Allah dont la tête décapitée ne cesse de repousser. Les renseignements  sont d’une importance capitale dans cette guerre asymétrique contre Abubakar Shekau et sa bande de criminels, surtout en cette phase critique de la lutte où la nébuleuse djihadiste a changé de stratégie, après avoir été fortement handicapée dans la guerre classique menée contre elle par les troupes tchado-nigériennes. Sur le plan stratégique, l’initiative est aussi à saluer car, à défaut d’éradiquer le péril, la contribution américaine aidera à contrer l’avancée de Boko Haram et le confiner dans les territoires montagneux et forestiers qui constituent leur fief. Au plan psychologique, l’arrivée des boys peut rassurer les populations camerounaises dont l’imaginaire, alimenté par les films d’action et les succès de l’intervention américaine au Moyen et Proche Orient,  fait de l’oncle Sam le tout-puissant en sécurité, principalement dans la casse des  terroristes. L’Exécutif camerounais se frotte naturellement les mains. Il disposera désormais de « compétences uniques », aux dires de Josh Earnest, porte-parole de Barack Obama, pour venir à bout des djihadistes. Mieux, il peut se vanter d’être choyé par l’Oncle Sam,  dans un contexte de rivalité larvée avec le Nigeria dont les dysfonctionnements au sein de l’armée ne lui ont plus valu la confiance américaine. Trop souvent, en effet, de par le passé, armes et renseignements fournis par l’armée américaine aux forces de défense et de sécurité nigérianes, se sont retrouvés in fine entre les mains des troupes de l’ennemi. Les Américains, eux, ont, en plus de l’occasion de rabattre le caquet à ceux qui dénonçaient leur immobilisme jugé coupable dans la lutte contre Boko Haram, une opportunité de participer à l’équilibre de la géostratégie militaire sous- régionale. En effet, les Français ont déjà des programmes similaires dans la sous-région, notamment avec leurs drones au Niger et au Tchad.

Paul Biya pourra se sentir réconforté par la plus grande démocratie au monde

Mais au-delà du satisfecit des politiques, on peut cependant se poser des questions sur l’efficacité de ce déploiement américain, présenté comme la panacée face au fléau djihadiste au Cameroun. Les boys réussiront-ils à dérouter les djihadistes à partir seulement d’observations aériennes, Shekau et ses combattants ne paradant plus en chars ni en pick-up ? Et quelle sera la durée d’immersion pour ces Boys  qui arrivent en terra incognita, avant que leur action ne porte des fruits dans cette guerre de tranchées? Comment pourront-ils mettre à contribution les populations dont l’apport en renseignements s’avère irremplaçable dans la détection et la prévention des actes d’un ennemi qui, comme un Caméléon, prend les couleurs locales ? Et quid des bavures dont les Américains sont coutumiers, comme celles qui ont marqué leurs interventions au Proche  et Moyen Orient ? Au-delà même de l’efficacité des stratégies militaires, on est quelque peu peiné par le fait que Paul Biya, qui est loin d’être un démocrate sur le continent, puisse se sentir réconforté par la plus grande démocratie au monde. Et le fait que les Américains optent pour la coopération bilatérale avec Yaoundé, vient décupler les inquiétudes quant à l’opérationnalisation de la grande coalition internationale contre Boko Haram. Il reste à espérer au-delà de ce scepticisme, que les boys aient les coudées franches pour ratisser large et mettre, en complicité avec les forces régionales, l’hydre hors d’état de nuire.

« Le Pays »


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