HomeA la uneATTAQUES TERRORISTES : La vie reprend peu à peu sur Kwame N’krumah

ATTAQUES TERRORISTES : La vie reprend peu à peu sur Kwame N’krumah


30 morts, 57 blessés et des dégâts matériels non encore évalués ; c’est le triste bilan provisoire des attaques djihadistes perpétrées contre « Splendid Hôtel », le « Cappuccino » et le café-restaurant « Taxi Brousse » sur l’avenue Kwame N’krumah à Ouagadougou. C’était le 15 janvier 2016. Après l’assaut contre les terroristes mené par les Forces de défense et de sécurité dans la même nuit et qui s ‘est poursuivi jusque dans la matinée du 16 janvier, l’avenue a été fermée pour les besoins de l’enquête. Ce n’est que le 20 janvier 2016 que la « plus belle avenue de Ouagadougou » a été rouverte aux usagers. Nous y avons fait un tour. Lentement mais sûrement, les activités ont repris mais, visiblement, quelque chose a changé sur cette avenue mythique de la capitale burkinabè.

Kwame N’krumah, avenue des affaires, symbole de modernité, bref, la plus belle avenue de Ouagadougou fait la fierté des Ouagalais. Mais, le 15 janvier 2016, des « fous d’Allah », ont décidé d’ôter à cette rue, son âme en massacrant des innocents, dont certains vaquaient paisiblement à leurs occupations, tandis que d’autres sirotaient leurs boissons au café-restaurant « Cappuccino », à « Splendid Hôtel » ou encore au « Taxi Brousse ». Depuis lors, l’avenue était fermée au public pour les besoins de l’enquête jusqu’à ce jour 20 janvier où elle a été rouverte à la circulation. A notre arrivée sur les lieux, vers 11h, dans la matinée d’hier, l’avenue Kwame N’krumah était, en effet, ouverte à la circulation. Mais, en venant du côté nord, à partir de l’immeuble SODIFOR, jusqu’à l’intersection de l’avenue avec la « Rue de l’intégrité », la circulation se faisait sur une seule portion de l’avenue. Les Forces de l’ordre, la police municipale notamment, géraient la circulation et assuraient le respect des consignes. Quant aux Forces de défense et de sécurité, elles étaient toujours visibles.
L’on pouvait passer du côté de « Splendid Hôtel », mais pas de celui de « Cappuccino » et de « Taxi Brousse ». Ces 2 endroits étaient entourés de rubans de balisage et interdits d’accès. Là, des experts français et burkinabè poursuivaient leurs enquêtes. L’avenue qui, d’habitude grouillait de monde, était presque déserte. Les quelques usagers qui passaient ne pouvaient s’empêcher, une fois à la hauteur des lieux du drame, de jeter de furtifs coups d’œil à gauche et à droite pour satisfaire leur curiosité, oubliant du coup qu’ils étaient sur une voie publique. Souvent, ce sont les coups de klaxon des autres usagers qui les ramenaient à la réalité. La déception se lisait pratiquement sur tous les visages. Devant Splendid Hôtel, le bitume porte la marque de la folie des terroristes. Un coup d’œil sur la bâtisse de l’hôtel et les traces d’impact de balles suffissent à donner la chair de poule. Devant l’entrée principale, quelques personnes discutent. Au côté sud de « Splendid Hôtel », nous rencontrons Moussa Sana. Il est venu récupérer sa voiture. « Le jour du drame, j’étais au 4e étage de « Splendid Hôtel » en réunion avec le ministre Clément Sawadogo. J’avais laissé ma voiture sur les lieux ; par la suite, j’ai appris que la voiture était restée intacte. Je suis venu ce matin la récupérer et je l’ai trouvée comme je l’avais laissée», raconte-t-il.
Un revendeur de téléphones portables, de passage devant l’hôtel Splendid, regarde les dégâts, secoue la tête, et lance un juron. Nous l’approchons. Il s’appelle Lazare Ilboudo. « Depuis cette histoire, ça ment sur nous. On se cherche même », lâche-t-il d’entrée de jeu. Comprenez par-là que plus rien ne va sur le plan des affaires. Il explique qu’avec les attaques terroristes, il a perdu sa clientèle. « Nous proposions nos marchandises aux clients du Cappuccino et de Splendid Hôtel. L’attaque terroriste a stoppé net nos activités et cela se ressent énormément dans nos poches », nous confie-t-il. « Ce n’est que ce matin que l’avenue a été rouverte au public, mais il n’y a plus un seul client ; on ne sait plus comment faire », se lamente-t-il. A la question de savoir s’il n’a pas peur de revenir sur les lieux des attaques, Lazare Ilboudo répond par la négative. Reconnaissant qu’il a quelques appréhensions, il n’est pas question pour lui d’exclure l’avenue Kwame N’krumah de son itinéraire quotidien. D’ailleurs, il est convaincu que les clients des lieux attaqués reviendront. Pour lui, ce n’est qu’une question de temps. Avant de poursuivre son chemin, il nous a confié que son souhait est qu’une telle horreur ne se reproduise plus au Burkina Faso.
« Les Burkinabè continueront d’emprunter leur « Taxi Brousse », de boire toujours leur « Cappuccino » dans un Burkina « Splendid » »
Quelques mètres plus loin, tout en marchant, des jeunes écoutent religieusement un des leurs. Nous l’entendons expliquer ce qu’il a vu ce tragique vendredi 15 janvier. Dès que nous rejoignons le groupe, les langues se lient. Prudence oblige. Après les présentations d’usage, la causerie continue. Le «conférencier» du jour, un parker des environs de Splendid Hôtel, rappelle l’impact économique des attaques terroristes. A l’en croire, tout comme le sien, ce sont plusieurs centaines de ménages qui ont vu leurs sources de revenus brutalement coupées par ces attaques. Et, c’est sans compter les pertes en vies humaines, les blessés et les dégâts matériels, précise-t-il. Puis, il s’éloigne. Visiblement dépité, il n’avait pas envie de pousser la conversation plus loin.
En dehors du balisage de sécurité, la vie a timidement repris dans les autres bâtiments. L’ambiance est morose et les gens sont avares en mots. Ceux qu’on approche déclinent gentiment notre micro.
A 12h, l’avenue est de nouveau fermée à la circulation. Pour cause, Mario Giro, sous-secrétaire aux Affaires étrangères de l’Italie, est sur place. Il dépose une gerbe de fleurs devant le Cappuccino et s’incline à la mémoire des victimes des apôtre du diable. Il est venu, dit-il, pour constater de visu l’étendue des dégâts. « C’est un geste de solidarité, de condoléances et d’attristement de la part de mon gouvernement, mais aussi de la part de tous les Italiens pour toutes les victimes », soutient-il. Au même moment, l’ambassadeur français, Gilles Thibault, était en pleine discussion avec les experts français encore à pied d’œuvre au Cappuccino. Accompagné d’un léger cortège, le diplomate italien quitte finalement les lieux, quelques minutes plus tard. Même si l’arrivée des diplomates a conduit au blocage de la voie pendant quelques instants, il faut dire que comme un Phoenix, l’avenue Kwame N’krumah a commencé à renaître de ses cendres, en témoigne l’optimisme des usagers. Comme l’a dit quelqu’un : «Les Burkinabè continueront d’emprunter leur «Taxi Brousse», de boire toujours leur «Cappuccino» dans un Burkina « Splendid».

Adama SIGUE

 

PANIQUE SUR L’AVENUE KWAME N’KRUMAH

En début d’après-midi du 20 janvier 2016, un incident s’est produit sur l’avenue Kwame N’krumah. En effet, selon les témoignages, trois présumés trafiquants de motos ont foncé à vive allure sur les policiers toujours stationnés sur l’avenue, tentant ainsi de forcer le passage. Pour les arrêter, les policiers ont dû faire usage de leurs armes en tirant en l’air. Pris de panique, l’un des présumés trafiquants a heurté une consœur avant de finir dans le décor. Ce qui a permis aux forces de l’ordre de mettre la main sur lui. Les 2 autres, ont rebroussé chemin et se sont enfuis.

A.S.


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