HomeBaromètreDAVID DABIRE : « Si malgré tout, Blaise veut réviser l’article 37, c’est qu’il a opté pour la violence en politique »

DAVID DABIRE : « Si malgré tout, Blaise veut réviser l’article 37, c’est qu’il a opté pour la violence en politique »


Dans la réflexion ci-dessous, David Dabiré, puisque c’est lui l’auteur, estime que si malgré les raisons suffisantes qui empêchent la modification de l’article 37, Blaise Compaoré veut résolument le réviser, c’est qu’il a irrévocablement opté pour la violence en politique.

Et pourquoi le peuple burkinabè se diviserait-il sur la question de l’article 37 de la Constitution ?

Le 12 décembre 2013 à Dori, au cours d’une conférence de presse, le président Blaise Compaoré a laissé entendre qu’il appellerait au référendum si le peuple est divisé sur la question de l’article 37. Et depuis, et cela conformément aux pratiques éprouvées des régimes dictatoriaux accomplis, ses partisans, à travers les associations et les partis politiques, revendiquent la révision de l’article 37 pour que celui-ci puisse continuer à régner au motif qu’il est une intelligence et une conscience uniques, une créature indispensable et irremplaçable, à la limite  une âme ou un esprit. Nous ne porterons pas de jugement de valeur sur leur choix, car chaque personne apprécie et évalue les choses en fonction de la hauteur de son idéal, de la noblesse des valeurs morales et éthiques auxquelles elle se réfère et de sa capacité à cogiter. A contrario, nous avons la latitude d’examiner la question suivante : « Le peuple burkinabè est-il  divisé sur la question de l’article 37 ? » Si la question paraît incongrue, la réponse n’est cependant pas évidente. Du point de vue du bon sens et du point de vue juridique, le peuple burkinabè n’est pas divisé sur la question de l’article 37  et ne peut l’être en ce moment.

Relativement au bon sens, imaginons un homme qui entre dans un marché et découvre un vêtement qui le charme énormément ; d’abord, il l’examine sous toutes les coutures : qualité du tissu, adaptabilité du vêtement à son environnement, couleur,  taille, coût d’entretien … Lorsqu’il s’enquit du prix, il se rendit compte qu’il n’avait pas suffisamment d’argent sur lui pour l’acquérir. Vite, il courut chez lui et rassembla toutes ses économies qui n’atteignirent toujours pas le prix du vêtement. Il emprunta alors le reste aux voisins, amis et connaissances,  retourna au galop au marché et s’empara du vêtement qui le tenait tant à cœur. Une fois à la maison, il le plaça soigneusement au fond de sa valise, attendant avec impatience le jour du grand dassandaga pour le porter afin d’être distingué, admiré, respecté. Enfin, ce jour vint. Notre homme sortit le précieux vêtement de la valise et, subitement et à la surprise de tous, il remit en cause son propre choix et cela, sans avoir essayé le nouveau vêtement, sans avoir découvert un défaut sur le vêtement qui lui était caché au moment de l’achat,  sans qu’une tierce personne ne  porte un jugement quelconque sur ledit vêtement. Il finit par devenir aphone à force d’hurler et de traiter d’imposteurs le commerçant et tous ceux qui voulaient lui faire entendre raison.

Cet homme-là, jouit-il de toutes ses facultés ? En termes plus clairs, est-il sensé ? Assurément pas ; il est illogique et irresponsable. De même, clamer que le peuple burkinabè est divisé sur l’article 37, ne revient-il pas à le traiter comme notre homme, parce que le peuple burkinabè a aussi librement opté pour la limitation des mandats présidentiels et cela, en conformité avec ses réalités historiques, sociales, politiques et culturelles. En effet, c’est le constituant originel à savoir le peuple qui l’a consacré à travers le référendum de 1991. Mais c’est plutôt le président Blaise Compaoré qui, par des contournements, a fait sauter le verrou de la clause limitative des mandats présidentiels en 1997 aux fins d’asseoir un règne à vie. Est-ce cela qui a été à l’origine de la mort de Norbert Zongo ? Bien malin qui saurait le dire ? Toujours est-il que le collège des sages institué consécutivement à sa mort, est  parvenu à la conclusion que la mort mystérieuse de journalistes et d’opposants, en un mot la violence en politique, est intrinsèquement liée au déverrouillage de la clause limitative des mandats présidentiels ; par conséquent, il fallait de nouveau les limiter. Blaise Compaoré a non seulement reconnu le fait mais en a été si convaincu au point que, de façon consensuelle, nous en sommes revenus à la limitation des mandats présidentiels en 2002.

Ensuite, n’est pas fondée, la revendication du déverrouillage de la clause limitative des mandats présidentiels faite par les partis politiques et les associations de divers ordres. La raison est que la candidature à l’élection présidentielle intéresse les personnes physiques et non les personnes morales, si fait que les syndicats, les associations et les partis politiques ne peuvent pas faire acte de candidature à l’élection présidentielle. Toutefois, une personne membre de ces regroupements sociaux peut le faire pour autant qu’elle n’est pas frappée d’interdiction légale. C’est pour cela qu’il n’est pas aisé de comprendre certains partis politiques et associations qui réclament à cor et à cri la révision de l’article 37 et qui,  en aucun lieu ne les lèse. Ce n’est qu’un seul Burkinabè qui est concerné par l’article 37: Blaise Compaoré. Si ce dernier s’estime lésé, mieux que quiconque, il connaît la voie à suivre pour entrer dans ses droits, encore que l’article 37 ne dispose pas de façon spécifique pour lui ou contre lui. A partir de là, il est assez aisé de constater que ceux qui revendiquent la modification de l’article 37 au motif que le peuple est divisé sur la question, ne cernent pas la notion de peuple, moins, ils ne maîtrisent pas l’opération de soustraction en arithmétique. Observons alors leur démarche : nous sommes 16 000 000 de Burkinabè ; un seul Burkinabè, le président Blaise Compaoré, est concerné par la modification de l’article 37 de la Constitution ; 15 999 999 Burkinabè ne sont pas concernés. La logique des diviseurs de peuple veut que les 15 999 999 de Burkinabè qui ne sont pas concernés par la modification de l’article 37, soient la première partie du peuple et Blaise Compaoré qui est le seul Burkinabè concerné, la seconde partie… et boumm, le peuple est divisé et pour l’unir il faut vite modifier l’article 37 afin de garantir la paix et la stabilité.

Plus indescriptible est la revendication de la modification de l’article 37 pour que Blaise Compaoré puisse être candidat en 2015, alors même que les porteurs de ladite revendication déclarent n’avoir jamais été mandatés par Blaise Compaoré, de même que celui-ci n’a jamais indiqué son intention d’être candidat en 2015, et c’est en cela que le peuple est divisé. Evidemment, des positions opposées sans objet conduisent à des dialogues sans objet. Est-il étonnant que ces dialogues finissent avant d’avoir commencé ?

De plus, ceux qui demandent la modification de l’article 37 pour que Blaise Compaoré puisse continuer sans jamais s’arrêter ; sans toutefois avoir été mandatés par l’intéressé, ont de fait mis celui-ci sous tutelle comme on le ferait pour des mineurs ou des majeurs incapables.  C’est cela qui augmente davantage les craintes et les inquiétudes du peuple.

Le constat est limpide : du point de vue de l’histoire, de la logique, de l’éthique  et du droit, le peuple burkinabè ne peut pas être divisé sur l’article 37. La prétendue division du peuple n’est qu’un subterfuge de thuriféraires qui ramènent tout à Blaise Compaoré: le passé, le présent et le futur du Burkina.

Ceci étant, si malgré tout ce qui précède, Blaise Compaoré veut résolument réviser l’article 37, c’est qu’il a irrévocablement opté pour la violence en politique, et c’est du reste le dénominateur commun des « Hommes forts ».       

Dans tous les cas, en l’article 37 se jouent la crédibilité de trente ans de règne et la personnalité réelle du président Blaise Compaoré. S’il est un homme intègre, il sacrifiera ses intérêts personnels afin de léguer à la postérité un pays dans la paix et la stabilité. Par contre, s’il est égoïste, au nom de ses intérêts, il précipitera le Burkina dans la tragédie.

Mon Président, qui êtes-vous alors ?                                                                         

David DABIRE

                                                                  Conseiller d’Administration scolaire et universitaire

 

 

 


Comments
  • La révision de l’article 37 c’est juste pour permettre à la personne Blaise COMPAORE de rester au pouvoir. Cet article a déjà été modifié 2 fois. Nous voulons avancer et non tourner en bourrique. Il s’agit purement là d’une tentative d’instauration d’un pouvoir personnel, ce qui est interdit par l’article 168 de la constitution.
    Article 168
    Le peuple burkinabè proscrit toute idée de pouvoir personnel. Il proscrit également toute oppression d’une fraction du peuple par une autre.
    Je me souviens qu’à la mort de Nelson Mandela, Blaise Compaoré avait a déclaré que la vie de Mandela a été une école pour lui. Un internaute avait répondu que Blaise était donc le dernier de la classe dans cette école. http://www.lefaso.net/spip.php?article57033
    Certains disent que parce que Blaise est un homme de paix aimé par le peuple Burkinabè, donc il doit demeurer au pouvoir. Ne pensez vous pas que le peuple sud africain aimait Mandela, un homme de paix ? Mais ce dernier a cédé le fauteuil par amour pour sa patrie. C’est ça être un homme de paix.
    Aucun être n’est indispensable pour une nation. Ce serait idiot et dommage de penser que ce mortel est l’unique être qu’il faut pour diriger ce pays.
    Si aujourd’hui ou dans 40 ou 50 ans, Blaise n’est plus ? Quand l’heure viendra ou ce mortel va disparaitre avec ou sans son carnet d’adresse pensez vous que le Burkina va disparaitre ? Pensez-vous que la sous région, l’Afrique ou le monde vont disparaitre ? C’est une insulte à la Nation !
    Un peu de sagesse. Finissons-en avec la politique du tube digestif.
    Blaise dispose de bourreurs d’urnes, de voleurs d’urnes, de gens comme Damana Pickass, comme Paul Yoa N’Dré…
    Nous avons vu ce qui est arrivé à Tandja, à la côte d’Ivoire… pourquoi s’obstiner à prendre un chemin qui va enflammer le pays ? Pourquoi ?
    Tout ce que je souhaite c’est que mon pays ne s’enflamme pas.

    Vaillant peuple du Burkina Faso. Débout comme un seul homme, la lutte continue dans la non violence. Manifestons de façon pacifique, sans détruire les biens publics et privés. Sans agresser les usagers de la route. Tout ce que nous voulons c’est proscrire toute idée de pouvoir personnel pour l’intérêt supérieur de la Nation.

    Notre nombre et notre union sont notre force!

    La patrie ou la mort, Nous vaincrons!

    24 octobre 2014
  • vous savez ce président n’est jamais responsable de se qui le concerne directement. tenez VOUS bien à la mort de Thomas SANKARA, il n’était pas au courant et n’a jamais souhaité ce qui s’est passé ce 15 octobre. l’élimination de tous ses amis et proches après le 15 octobre il n’est pas au courant, l’élimination de ceux qui ont osé se mettre à travers de son chemin (Norbert, Nébié, etc.) JAMAIS AU COURANT ENCORE MOINS ORDONNe, Actuellement la révision de l’article 37 et sa candidature en 2015 c’est pas lui c’est les autres qui lui demandent et font tous pour. il n’est responsable que quand il y’à un succès engrangé par le pays (succès dans les médiations, performances des étalons, années agricoles excédentaires, Ouag 2000). voici qui est le président COMPAORE

    24 octobre 2014
  • je pense que la réponse est évidente!pour sacrifier ses intérêts pour une cause,il faut être habité par une grande âme,il faut être un noble pas de naissance,mais de conviction,malheureusement ce monsieur a démontré à maintes reprise qu’il en est loin,et effectivement lui et ses partisans ont choisi la violence!!!et le peuple n’a d’autre choix que d’y répondre!!!

    24 octobre 2014
  • Je salue la pertinence de l’écrit. Le commentaire de EtatNation est juste et très explicite. En effet, depuis que le débat est lancé, Blaise n’a jamais dit sa position à lui; il laisse le soin à d’autres de le faire. C’est pourquoi je pense qu’il faut dans les écrits tout en dénonçant Blaise, dire quelque chose sur ses défenseurs. Ils doivent expliquer aux peuples comment des intellectuels peuvent-ils se battre pour quelqu’un qui refuse de dire publiquement sa position?

    25 octobre 2014
  • Pensons aussi à laisser une belle page de l’histoire pour les générations futures. On enseignera un jour que Balise Compaoré a régné X années, est mort (car de toute façon tout le monde mourra). quelques années avant sa mort, il a créé le cahot et détruit tout ce qu’il avait construit. Dommage, le jugement dernier sera comment ???

    25 octobre 2014
  • Le texte proposé par le Gouvernement confirme ce que l’opposition et la société civile disent depuis longtemps : le pouvoir personnel de Blaise, ce qui est proscrit par la constitution. A partir de ce moment, Blaise, son gouvernement et l’Assemblée qui aura voté ce texte deviennent illégitime et les citoyens doivent désobéir impérativement, comme le veut Notre Constitution. Militaires, Gendarmes, Policiers, refusez de participer à l’assassinant de notre démocratie. Faites comme les forces de sécurité en Egypte, au Mali, en Tunisie : si ce Gouvernement désormais illégitime vous envoie pour mâter les manifestants, allez-y tout simplement grossir ces rangs de manifestation.
    Le vote de l’Assemblée n’a aucune valeur dans la mesure où il s’opère grâce à une très forte corruption (100 millions par député et le poste de premier ministre à Gilbert).
    Blaise croit qu’il a gagné la partie. Mais que NON : C’est maintenant que la vraie crise commence. Ce pays sera ingouvernable jusqu’à ce qu’il renonce à son funeste projet.
    Blaise est actuellement paniqué. il se rend compte que c’est une bêtise d’avoir solliciter le vote de l’AN.
    NOTRE CONSTITUTION NE SERA PAS MODIFIEE, QUELQUE SOIT LE CHEMIN EMPRUNTE.

    MOBILISATION GENERALE !!!

    25 octobre 2014
  • Un peuple en voie d’éveil pourrait comprendre la volonté d’une personne rien que par ses actions. En politique on évacue le plus souvent l’idée de concrétisation qui pourrait engendrer un effet boomerang.

    25 octobre 2014

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