HomeA la uneDEBY FILS AU QATAR  

DEBY FILS AU QATAR  


Le président tchadien, Mahamat Idriss Déby Itno, est arrivé le 12 septembre dernier à Doha au Qatar pour une « visite d’amitié et de travail » de quarante-huit heures, au cours de laquelle le financement du futur dialogue national inclusif dont il fait son cheval de bataille, sera au menu et au centre des discussions. Le Conseil militaire de la transition qui dirige le Tchad depuis la mort d’Idriss Déby Itno en avril dernier, a entrepris de recoudre le tissu sociopolitique tchadien que des décennies de crises diverses ont contribué à déchiqueter, à travers un forum de réconciliation nationale regroupant tous les fils du pays sans exclusive. L’idée est noble et louable. Mais seulement voilà. Le Tchad est économiquement et financièrement étranglé depuis la chute drastique des cours du pétrole, et il lui est impossible de financer sur fonds propres ce projet pour le moins budgétivore. Il faut donc qu’il appelle ses partenaires à la rescousse pour ne pas rater le coche, et l’Emirat gazier du Qatar connu pour sa générosité, pourrait aider à démarrer le train de cette réconciliation si chère et si nécessaire aux Tchadiens,  à travers une aide financière substantielle. Le Général Mahamat Déby, qui fait preuve de lucidité depuis qu’il a remplacé au pied levé son père à la tête de l’Etat, a compris que la répression et l’attitude condescendante vis-à-vis du peuple, vont contribuer à déglinguer davantage l’Etat tchadien, déjà très fragilisé par des foyers de rébellions toujours incandescents, notamment à l’Est du pays, et par des incursions meurtrières et récurrentes de groupes islamistes dans le bassin du lac Tchad.

 

 

L’Emirat pourrait jouer les intercesseurs entre lui et son cousin Timan Erdimi qui y a trouvé refuge

 

 

En bon militaire, il sait que c’est le terrain qui commande la manœuvre, et il serait plus sage, au regard des nombreux défis auxquels le pays est confronté, de changer de cap en privilégiant l’option du dialogue et de la réconciliation, au lieu de ruiner une économie déjà exsangue, dans des dépenses militaires onéreuses et quasiment inutiles pour la stabilité du pays. Dans cette perspective, la visite éclair du Général Mahamat Déby aux autorités qatari, suscite beaucoup d’espoirs quand on sait qu’il va décoller de l’aéroport international Hamad de Doha les poches remplies à ras bord, sans oublier qu’au-delà des pétrodollars, l’Emirat pourrait jouer les intercesseurs entre lui et son cousin Timan Erdimi qui y a trouvé refuge depuis qu’il a échoué à renverser, en 2008, le défunt président et père de Mahamat, Idriss Déby Itno. Cet exilé pas comme les autres a, en effet, longtemps pourri les relations entre les deux pays, et l’ancien président tchadien n’avait pas hésité, en 2017, à fermer l’ambassade du Qatar à Ndjamena et à rappeler son personnel diplomatique en poste à Doha.  Certes, depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et les relations ont été renouées, mais que celui qui fait office aujourd’hui de président de la République tchadienne et l’un des plus puissants chefs de guerre en exil, acceptent de se parler et d’envisager le retour de la « brebis galeuse » dans la bergerie, serait un grand pas de plus vers l’enterrement définitif de la hache de guerre au Tchad. Espérons seulement qu’au dernier moment, un petit grain de sable ne viendra pas gripper la machine, et que la marche organisée le 11 septembre dernier par des associations de la société civile pour dénoncer la mise en place de comités non inclusifs du dialogue national en vue, n’est pas le signe que rien n’est encore joué sur ce terrain oh combien sinueux de la paix et de la réconciliation au Tchad.

 

Hamadou GADIAGA


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