HomeA la uneDEPOT DES CANDIDATURES POUR LA PRESIDENTIELLE EN TUNISIE : En attendant le plébiscite de Kais Saïed

DEPOT DES CANDIDATURES POUR LA PRESIDENTIELLE EN TUNISIE : En attendant le plébiscite de Kais Saïed


En Tunisie, le compte à rebours pour la présidentielle du 6 octobre prochain, a débuté avec l’ouverture du dépôt des candidatures le 29 juillet dernier. Une opération qui se poursuivra jusqu’au 6 août prochain et qui suscite beaucoup d’engouement, à en juger par la flopée de candidats déclarés (près de la centaine), à avoir retiré le formulaire pour la collecte des parrainages qui est l’une des conditions sine qua non de la validation de leur candidature.  Si le président Kais Saïed, candidat déclaré à un second mandat, est, sauf tremblement de terre de forte magnitude, quasiment assuré d’être sur la ligne de départ de la course à sa propre succession, il en va autrement pour ses challengers potentiels susceptibles de lui tenir la dragée haute, parmi lesquels se comptent des opposants qui croupissent en prison dans l’attente de leur jugement et qui vivent la croix et la bannière pour recevoir les documents qui ne peuvent être retirés que par le candidat en personne.

 

Avec un système aussi verrouillé, la probabilité est forte que les candidats de poids soient retenus dans les filets de ISIE

 

Toujours est-il que face à la multiplicité des obstacles, Issam Chebbi, secrétaire général du parti Al Joumhouri, incarcéré depuis février 2023 dans le cadre d’une affaire de complot contre la sûreté de l’Etat, a jeté l’éponge tandis que Lotfi Mraihi, président de l’Union populaire républicaine (UPR), est frappé d’interdiction de se présenter en raison d’une condamnation judiciaire dans une sombre affaire de fraude électorale lors de la présidentielle de 2019. Quant à Abir Moussi, présidente du Parti destourien libre (PDL) et Ghazi Chaouachi du Courant démocrate, ils ne sont pas logés à meilleure enseigne du fait de leur incarcération depuis 2023, qui ne leur permet pas d’aller retirer en personne les formulaires des parrainages même si rien ne les empêche a priori de concourir. Pas plus que les autres prétendants dont certains, à l’image de Mondher Zenaidi, Safi Saïd et Kamel Akrout qui  ont annoncé leur candidature depuis l’étranger, et dont on se demande s’ils pourront aller au bout de la procédure ; tant les règles paraissent aussi compliquées que contraignantes. En effet, pour être éligible, chaque candidat devra présenter le parrainage de dix députés de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) ou membres du Conseil national des régions et des districts, ou celui de 40 présidents élus de collectivités locales, ou encore celui de 10 000 électeurs inscrits au registre électoral sur 10 circonscriptions comportant au moins 500 électeurs chacune. Autant dire qu’avec un système aussi verrouillé, la probabilité est forte que les candidats de poids capables de tailler des croupières au président Kais Saïed, soient retenus dans les filets de l’Instance supérieure indépendante des élections (ISIE), l’instance électorale. Et pour cause : elle a édicté les conditions, pour laisser la place à des candidats motards. Et ce, dans un contexte où la crédibilité des institutions est d’autant plus sujette à caution que ces dernières sont dirigées par des hommes-liges de l’universitaire président.

 

Dans sa vision de restructuration du système politique tunisien, Kais Saïed a travaillé à brader les acquis de la révolution

 

Lequel se prépare à aller à un plébiscite après avoir travaillé à faire place-nette pour s’ouvrir le boulevard d’une réélection sans coup férir. Comment peut-il en être autrement quand on voit comment le président Kais Saïed a travaillé à renforcer ses pouvoirs par l’adoption, en 2022, d’une Constitution aussi controversée qu’elle a fait couler beaucoup d’encre et de salive par l’instauration d’un régime hyper-présidentiel en rupture avec la précédente loi fondamentale qui limitait volontairement le rôle du chef de l’Etat.  Toujours est-il que le faible taux de participation lors de l’adoption de cette Constitution, traduit la désaffection des populations tunisiennes obligées de subir les dérives autocratiques de leur président qui a travaillé au musèlement des voix critiques tout en concentrant l’essentiel du pouvoir entre ses mains, dans un contexte où la liberté de la presse reste fortement préoccupante. Et c’est peu dire que les Tunisiens qui ont lutté pour plus de liberté à travers le printemps arabe, ne sont pas loin, si ce n’est déjà fait, de la désillusion avec Robocop qui, dans sa vision de restructuration du système politique tunisien, a travaillé à brader les acquis de la révolution. En tout état de cause, avec ce deuxième mandat qu’il se prépare à aller chercher au bout d’une élection qui paraît déjà une formalité, c’est peu dire que le changement n’est pas pour demain et que les Tunisiens ne sont pas au bout de leurs peines d’autant plus que les candidatures annoncées qui se dégagent pour le moment, sont celles d’un rappeur, d’un cinéaste, d’un cardiologue et de membres de partis politiques.

 

 « Le Pays »

 


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