FESPACO 2021
Après moult reports pour cause de pandémie du Covid-19, la 27e édition du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO), initialement prévue pour se tenir en février dernier, s’est ouverte finalement le 16 octobre 2021 dans la capitale burkinabè. La cérémonie d’ouverture qui s’est déroulée au palais des sports de Ouaga 2000, en présence du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, a été riche en couleurs. Fait marquant, un hommage mérité a été rendu au père de la Révolution burkinabè, Thomas Sankara, dont le pays a commémoré, la veille, le 34e anniversaire de son assassinat. Dans un contexte de morosité économique sur fond de crise sanitaire plus ou moins maîtrisée du virus à couronne, Ouaga la belle a accueilli une belle fournée de festivaliers et d’invités de marque venus d’Afrique et d’ailleurs, même si, contexte oblige, tout porte à croire que l’on sera, cette année, largement en deçà des 700 invités habituels du festival. Le thème de cette édition est « Cinémas d’Afrique et de la diaspora : nouveaux regards, nouveaux défis ». Le pays invité d’honneur est le Sénégal. En attendant de voir quel visage prendra le FESPACO 2021, la tenue même de cette 27e édition de la biennale du cinéma africain paraît, pour le moins, comme un défi qui était loin d’être gagné d’avance. Non seulement en raison de la crise sanitaire du Covid-19 qui est venue chambouler le calendrier, mais aussi en raison de la situation économique rendue encore plus difficile et de la crise sécuritaire qui continue de mobiliser les énergies jusqu’au plus haut sommet de l’Etat burkinabè.
C’est un FESPACO de la résilience qu’il est donné aux Burkinabè et à leurs invités de vivre cette année
C’est le lieu de tirer son chapeau aux autorités burkinabè qui, malgré le contexte difficile, ont fait le pari de la tenue de cette 27e édition qui sera sans nul doute une bouffée d’oxygène pour les acteurs du cinéma en particulier et le monde de la culture, en général, qui ont beaucoup souffert de la pandémie du Covid-19. C’est la preuve que mieux que le roseau qui plie sans rompre, le Burkina a su faire face, entre autres, à l’adversité de la crise sanitaire et de la morosité économique pour tenir cette 27e édition qui se veut aussi celle de certaines innovations. Reste maintenant le défi sécuritaire qui appelle à la vigilance de tous les Burkinabè aux côtés des Forces de défense et de sécurité, pour réussir ensemble le pari de cette édition 2021. C’est donc, peut-on dire, un FESPACO de la résilience qu’il est donné aux Burkinabè et à leurs invités, de vivre cette année. Mais l’essentiel ne doit pas être de tenir l’événement. Et il ne faudrait surtout pas donner le sentiment aux Burkinabè de leur offrir un FESPACO a minima. C’est pourquoi il faut espérer que les petits couacs organisationnels plus ou moins liés aux questions financières, ne cachent pas d’autres malaises latents qui pourraient impacter négativement le festival ou porter un coup à son image. C’est dire si ce 27e FESPACO a besoin de se tenir avec tout le panache, le sérieux et le professionnalisme que requiert la grandeur de cet événement qui demeure à ce jour, avec le SIAO et le Tour du Faso, l’une des plus grandes vitrines du Burkina Faso à l’extérieur. Dès lors, l’on comprend pourquoi les autorités du pays ont tout fait pour sauver cette 27e édition qui a failli pâtir de la pandémie du Covid-19. C’est pourquoi il importe, non seulement de la réussir sur le plan organisationnel, mais aussi sur celui du palmarès des films et de la participation du public.
Cette 27e édition doit être une nouvelle interpellation des réalisateurs burkinabè à relever le défi de « Tilaï » et « Buud Yam »
A ce propos, sur 1 132 films inscrits, 239 ont été sélectionnés et 17 retenus dans la catégorie long-métrage de fiction, pour concourir à l’Etalon d’or de Yennenga, la récompense suprême. Le Burkina Faso y est représenté par Boubacar Diallo avec son film, « Les trois lascars ». Dans cette catégorie, 15 autres pays sont en lice dans la course au Saint graal. Ce sont l’Angola, le Sénégal, le Cameroun, le Nigeria, la Tanzanie, la Somalie, la Côte d’Ivoire, le Tchad, le Rwanda, le Maroc, l’Egypte, la Tunisie, la Namibie, le Lesotho et Haïti. Seul un film succédera à « The Mercy of the Jungle » du Rwandais Joël Karekezi, lauréat 2019 du dernier FESPACO. La question est maintenant celle de la participation du public burkinabè dont on peut se demander s’il aura véritablement le cœur à la fête. Car, faut-il le rappeler, si le report de date a permis de sauver l’événement, cette édition se tient en pleine rentrée scolaire qui reste encore, pour de nombreux Burkinabè, un véritable casse-tête financier. Si l’on ajoute à cela le fait que du 16 au 23 du mois, ils sont nombreux les fonctionnaires et autres travailleurs du privé à ne pas être passés à la caisse, l’on se demande quelle saveur aura ce FESPACO 2021 dont l’ouverture a eu lieu dans l’enceinte du Palais des sports de Ouaga 2000, loin des 35 000 places du Stade du 4 Août qui donnait un caractère particulièrement populaire à l’événement. Au-delà, cette 27e édition doit être une nouvelle interpellation des réalisateurs burkinabè à relever le défi de « Tilaï » de feu Idrissa Ouédraogo et « Buud Yam » de Gaston Kaboré qui restent, à ce jour, les deux seuls films burkinabè à avoir remporté le prestigieux Etalon d’or de Yennenga, respectivement en 1991 et 1997, ce qui commence à faire trop long.
« Le Pays »