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LACHAGE DE KABILA PAR SES SOUTIENS


Sale temps pour la galaxie Kabila en RDC. En effet, après avoir perdu le contrôle de l’Assemblée nationale dont la présidente, Jeanine Mabunda, a été destituée en bonne et due forme, c’est au tour du chef du gouvernement, Sylvestre Ilunga Ilunkamba du Front commun pour le Congo (FCC) de l’ex-chef de l’Etat, de connaître la déchéance de son poste de Premier ministre par un vote sanction à une majorité écrasante de 367 députés sur 377 votants, suite à la motion de censure introduite par le camp Tshisekedi qui s’est constitué une nouvelle majorité au Parlement. C’était le 27 janvier dernier. Pourtant, au sortir des dernières élections, présidentielle et législatives, c’est à une écrasante majorité que le FCC de Joseph Kabila avait pris le contrôle de la Représentation nationale ; ce qui lui conférait de droit, le maroquin de la Primature avec un Premier ministre issu de ses rangs, en la personne de Sylvestre Ilunga. Moins de deux ans plus tard, peut-on dire, les lignes ont fortement bougé dans le landerneau politique pour tendre vers une inversion du rapport de forces au sein de la majorité présidentielle en RDC. En effet, le FCC, jadis ultra dominateur, a fini par perdre de sa superbe et a vu ses forces fondre comme du beurre au soleil au profit du Cach de Félix Tshisékédi.

Un jeu d’équilibrisme et de calculs d’intérêts partisans, qui ne sert pas la démocratie

Et c’est un Kabila visiblement à la peine et de plus en plus esseulé, qui assiste, quasi impuissant, au débauchage en règle de ses élus. Telles des brebis attirées par de plus verts pâturages, nombre de ces derniers sont allés grossir les rangs du président Tshisekedi à l’effet de permettre au chef de l’Etat de se constituer une nouvelle majorité au Parlement, pour se donner les coudées franches dans son action. Ainsi a-t-on assisté à une transhumance de nombreux élus nationaux pro-Kabila dans le camp Tshisekedi, provoquant une véritable saignée dans les rangs de l’ex-homme fort de Kinshasa dont le mythe de la toute puissance semble s’être effrité. Est-ce à dire que les bases politiques de Joseph Kabila n’étaient pas aussi solides qu’elles le paraissaient ? Quoi qu’il en soit, voilà qui devrait donner à réfléchir aux satrapes du continent qui, au plus fort de leur règne, se laissent souvent aller à des louanges flatteuses de zélateurs aussi opportunistes qu’hypocrites, et souvent prompts à tourner casaque au moindre coup de vent contraire.  C’est le jeu politique, dira-t-on, qui a peut-être sa logique  que la logique du citoyen lambda ignore. Mais il y a lieu de dire que dans le cas d’espèce, cela manque, à bien des égards, d’éthique, de voir les mêmes personnes qui soutenaient le satrape hier, retourner aussi facilement leur veste pour se retrouver dans l’autre camp. C’est un jeu d’équilibrisme et de calculs d’intérêts partisans, qui ne sert pas la démocratie. Car, cela semble plus répondre à des besoins tube-digestivistes qu’à de véritables idéaux fondés sur de solides convictions politiques et idéologiques. Malheureusement, en la matière, la RDC ne semble pas un cas isolé sur le continent africain où, à quelques exceptions près, cela est en passe de devenir, si ce n’est déjà fait, la règle.

En Afrique, le pouvoir est loin d’être un sacerdoce

Contrairement à des pays comme les Etats-Unis d’Amérique qui viennent de démontrer le contraire avec le feuilleton Donald Trump, du nom de l’ex-locataire de la Maison Blanche dont bien des partisans et pas des moindres ont refusé de le suivre sur le chemin de l’égarement, prouvant au passage qu’au-delà de leur appartenance politique, leur engagement pour servir la Nation américaine répond à de solides convictions éthiques, morales et hautement républicaines. Un idéal qui semble largement hors de portée de la classe politique africaine d’aujourd’hui.  Cela dit, on ne plaindra pas Joseph Kabila dont le lâchage en règle par ses partisans, permet, quelque part, à défaut de réparer tous les torts, de rééquilibrer à tout le moins l’équation de la démocratie ; une démocratie si brutalement torturée et malmenée par le grand timonier qu’il se voulait. C’est dire si le piège se referme sur le Raïs qui croyait détenir toutes les clés de la politique en RDC au point de croire qu’il pouvait se payer le luxe d’une gouvernance par procuration, à travers l’élection de son successeur dans les conditions que l’on sait. Aujourd’hui, avec le retournement spectaculaire de situation en sa défaveur, Kabila n’est pas loin de répondre à l’adage « tel est pris qui croyait prendre », qui semble prendre tout son sens en RDC. Si cela peut permettre de redonner des couleurs à la démocratie en RDC, c’est tant mieux ! Car, à l’aune de l’éthique politique, on n’est pas loin de penser que l’ex-chef de l’Etat reçoit là, en pleine figure, l’effet boomerang de près de deux décennies de pratiques antidémocratiques et mafieuses au sommet de l’Etat, érigées en mode de gouvernance où l’argent passe pour le principal déterminant des convictions politiques de bien des acteurs majeurs. C’est dire si, en Afrique, de façon générale, où il n’est pas rare de voir des gens arriver au pouvoir à moto et en repartir dans des véhicules de luxe, le pouvoir est loin d’être un sacerdoce. Le pire est que l’on en est arrivé à un niveau où le manque d’éthique en politique a été tellement banalisé par les principaux acteurs que cela est en train de gagner les populations à la base. Pour en revenir à la situation en RDC, la question que l’on se pose est de savoir si cette reconfiguration de la scène politique en défaveur du Raïs, sonne comme le chant du cygne pour Joseph Kabila. On attend de voir.

« Le Pays »


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