HomeA la uneLIMOGEAGE DU MINISTRE DE LA DEFENSE AU BURKINA :  Un lifting gouvernemental pour sauver les meubles?

LIMOGEAGE DU MINISTRE DE LA DEFENSE AU BURKINA :  Un lifting gouvernemental pour sauver les meubles?


Le président de la Transition, Paul-Henri Sandaogo Damiba, a procédé à un lifting gouvernemental le 12 septembre dernier, via deux brefs et laconiques décrets par lesquels il a évincé le Général de brigade Aimé Barthélémy Simporé de la tête du ministère de la Défense et des anciens combattants, et a pris lui-même les rênes de cette institution régalienne au cœur du pouvoir exécutif. Il a nommé à ses côtés le colonel-major Silas Keita comme ministre délégué chargé de la Défense, qui est élevé dans la foulée, au grade de Général de brigade. Le moins qu’on puisse dire, c’est que les Burkinabè ont été littéralement pris de stupéfaction à l’annonce de ce mini-remaniement, d’autant qu’aucune rumeur n’avait circulé sur la destitution brutale de l’officier d’infanterie qui avait été, à la surprise générale, maintenu à son poste de ministre de la Défense au lendemain du pronunciamiento du 24 janvier dernier. On aurait pu faire l’économie des interprétations, parfois fantaisistes qui fusent depuis que le chef de l’Etat a pris cette décision de la plus haute importance par ces temps qui courent, si ‘’le lâchage en plein vol’’ de l’officier Général avait été motivé, et non présenté comme une mesure ordinaire qui relève des prérogatives du président Damiba. Tout ce que l’on sait, c’est que ce limogeage est intervenu quelques jours après le bilan d’étape pour le moins mitigé du chef de l’Exécutif sur les acquis de la Transition en matière de lutte contre le terrorisme, et au lendemain d’une attaque d’envergure contre le détachement militaire de Déou, elle-même précédée par la mort tragique d’une quarantaine de civils, après que leur véhicule a roulé sur une mine placée sur le tronçon sordidement célèbre qui relie Djibo à Bourzanga.

 

 

On ose croire que le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba a fait le bon diagnostic

 

 

Cette série noire y est peut-être pour quelque chose dans le départ du ministre de la Défense, mais il ne faut pas exclure le fait que le président Damiba veuille exploiter opportunément la situation pour ‘’dégager’’ celui que certains Burkinabè accusent à tort ou à raison de traitrise vis-à-vis de son ancien mentor, Roch Kaboré en l’occurrence, en acceptant d’être coopté pour faire partie du gouvernement des putschistes. C’est essentiellement ce péché originel qui explique l’indifférence quasi unanime des Burkinabè par rapport au sort de celui qui est ironiquement qualifié de « redoublant », qui quitte ainsi la « classe » par la plus petite des lucarnes, malgré une carrière militaire prolifique en grades et en médailles. Ils sont d’ailleurs un certain nombre à se poser des questions sur la pertinence de ce remaniement qui pourrait perturber encore une fois la chaine de commandement, tout en comprenant la décision du président qui a actuellement besoin d’un bouc émissaire  pour faire oublier les revers que nous subissons face aux groupes terroristes. Maintenant qu’il a fait sauter le fusible et pris lui-même la tête du ministère en charge de la Défense, le président du Faso et de la Transition aura certainement un problème de plus et un argument de moins quand il s’adressera à la Nation la prochaine fois pour faire le point de la lutte contre le terrorisme, surtout si nos Forces de défense et de sécurité n’arrivent pas à contraindre les terroristes à faire le difficile choix entre la mort et la capitulation. On espère qu’il a bien mesuré le risque, et qu’il ne fermera pas les yeux sur tous ces officiers pantouflards qui se la coulent douce à Ouagadougou alors que le pays brûle dans tous ses quatre point cardinaux. Si ce remaniement a épargné les titulaires des autres portefeuilles ministériels, on ose croire que c’est parce que le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba a fait le bon diagnostic et a amputé uniquement le « membre infecté » du corps, pour rendre ce dernier plus prompt et plus apte à faire face à la principale adversité du moment qui est le délitement de l’Etat au sens large du terme.  On attendra de voir les signaux qui seront donnés dans les prochains jours pour applaudir ou pour maugréer, pour voir si la junte a enfin décidé de prendre le destin de notre pays en main, en commençant par exemple par libérer la ville de Solenzo qui est devenue le symbole de l’humiliation nationale avec l’occupation, semble-t-il, de la résidence du haut-commissaire par les terroristes. Mais si, à Dieu ne plaise, la situation à l’intérieur du pays continue à aller de mal en pis, même une dissolution du gouvernement ne pourra pas calmer une opinion publique dont la sensibilité est déjà à fleur de peau et qui ne saura plus à quel…béret rouge se fier pour sauver le pays. En tout état de cause, ce serait le scénario –catastrophe à éviter à tout prix par le président de la Transition, et ce dernier  semble en avoir pris conscience en prenant le taureau des terroristes par les cornes avec l’acquisition de nouveau matériel de guerre,  et en s’octroyant à lui-même le maroquin de la défense.

 

Hamadou GADIAGA


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