HomeA la uneNOUVEAU QUINQUENNAT DU PRESIDENT DU FASO

NOUVEAU QUINQUENNAT DU PRESIDENT DU FASO


Dans moins de vingt-quatre heures, l’an 2020 poussera son dernier râle et s’endormira à jamais. A l’instar de ses devanciers qui auront connu le même sort, il sera conduit dans le caveau du Temps pour le repos éternel. 2020 passera alors le flambeau à 2021 sous les hourras et acclamations de foules humaines en goguette, heureuses d’avoir franchi le cap du nouvel An porteur d’espérances nouvelles.  Cela dit, l’an 2020 qui vient de s’évanouir dans les épaisses brumes du néant, aura été exceptionnel à plus d’un titre. La Covid-19, maladie virale aux origines jusque-là inconnues, qui s’est répandue à une vitesse supersonique à l’ensemble de la planète, aura littéralement « foudroyé » et fortement handicapé l’an 2020. En ralentissant sérieusement la marche du monde, le redoutable virus à couronne aura bouleversé les habitudes humaines à tous les niveaux. La comptabilité macabre longue comme le bras, liée à cette maladie, fait froid dans le dos : plus d’un million et demi de décès à travers le globe, parmi lesquels de grandes figures des mondes politique et culturel d’Afrique et d’ailleurs. Le dernier cas africain en date étant le chef de file de l’opposition malienne, Soumaïla Cissé. 2021 sonnera-t-elle le glas de la pandémie ? On croise les doigts. L’espoir est permis. Le bout du tunnel semble à portée de vue avec l’arrivée des premiers vaccins anti-Covid-19, aussitôt suivie d’une vaste campagne de vaccination, même si, pour l’instant, ce n’est encore qu’une affaire de pays riches. En demandeuse invétérée et consommatrice éternelle, l’Afrique, une fois de plus, hélas, se résoudra à attendre son tour. C’est bien dommage ! Quelle est la part du continent noir en matière de recherche dans le secteur-clé de la santé ? Pas grand-chose. Il est à parier que si le paludisme faisait des ravages en Occident, cette pathologie serait aujourd’hui un lointain souvenir.  Pour en venir au Burkina Faso, l’année 2020 aura été marquée par la commémoration, en mode confiné (pandémie de la Covid-19 oblige), des soixante ans d’accession du pays à la souveraineté nationale et internationale. Où en est-elle, cette ancienne colonie française, six décennies après avoir officiellement rompu les amarres avec l’ex-puissance tutélaire ? Le bilan doit-il donner matière à satisfaction ?

La concorde nationale ne saurait être sacrifiée sur l’autel de petits arrangements entre acteurs politiques burkinabè

En tout cas, en cette aube de nouvelle année, les défis demeurent nombreux et les attentes des populations, énormes. Figure parmi ces challenges, la lutte engagée depuis quelque cinq ans, contre les forces du Mal. Les lignes ont-elles bougé sur le front ? L’Etat peut-il, dans son combat contre l’extrémisme violent, se targuer aujourd’hui d’avoir repris la main ? La peur a-t-elle gagné les rangs de la vermine ? Ou faut-il penser que les HANI (Hommes armés non identifiés) ont juste fait relâche et que c’est le calme qui précède la tempête ? Une chose est sûre : la fripouille doit être définitivement mise hors d’état de nuire et c’est seulement à ce prix que notre chère patrie renouera avec sa légendaire réputation de havre de paix.  Evoquée encore récemment par le Chef de l’Etat, la réconciliation nationale devrait figurer sur son agenda de 2021 suite à sa promesse d’engager de larges consultations nationales à ce propos. Que sortira-t-il de ces assises annoncées ? Et la question qui pourrait le plus intéresser bien des Burkinabè est celle de savoir le sort qui sera réservé à l’ancien chef d’Etat, Blaise Compaoré, qui ressent sans doute atrocement le mal du pays depuis son exil ivoirien entamé à partir de cet après-midi mémorable du 31 octobre 2014. L’avenir nous le dira. En tout état de cause, la réconciliation nationale ne saurait se résumer à la seule personne de Blaise Compaoré. Et plus globalement, la concorde nationale ne saurait être sacrifiée sur l’autel de petits arrangements entre acteurs politiques burkinabè au détriment d’une opinion nationale plutôt largement favorable au principe de vérité et de justice comme préalable à toute catharsis nationale. Aux défis de la sécurité et de la réconciliation nationale, s’ajoute celui de la démocratie. En la matière, le Burkina Faso semble résolument engagé sur la bonne voie. Comme en 2015, il aura su négocier en douceur et sans casse, le virage tant redouté des élections, donnant, au passage, une fois encore, des leçons de démocratie à bien des nations d’Afrique et d’ailleurs. Tout le mérite revient à la classe politique burkinabè en particulier et au peuple burkinabè en général qui aura fait preuve de grandeur d’esprit et de responsabilité. Bien sûr, l’ensemble du processus électoral n’aura pas été sans griefs, si l’on s’en tient notamment aux critiques à l’encontre de la Commission électorale nationale indépendance (CENI) qui gagnerait, de l’avis d’une certaine opinion nationale, à être réformée. Ces observations qui ne sont pas sans fondements, devraient être examinées avec la plus grande attention dans la mesure où elles peuvent apporter une plus-value à la démocratie toujours en construction dans notre pays. En attendant, l’ancien cadre de banque qui vient de prêter serment devant un parterre de chefs d’Etat et de gouvernement, à Ouagadougou, savoure avec bonheur, sa nouvelle victoire.

RMCK a l’occasion de redresser la barre, de secouer vigoureusement le cocotier pour en faire tomber les fruits pourris

Selon la Constitution révisée, modifiant l’article 37 qui limite le nombre de mandats présidentiels à deux et le verrouille en son article 165 : « Aucun projet ou proposition de révision de la Constitution n’est recevable lorsqu’il remet en cause (…) la clause limitative du nombre de mandat présidentiel » et « la durée du mandat présidentiel », Roch Marc Christian Kaboré (RMCK) sera interdit de course à la présidence du Faso en 2025. Mais en politique et surtout sous nos tropiques, il ne faut jamais jurer de rien. Toutefois, l’on a la faiblesse de croire qu’il ne viendra pas à l’idée de RMCK d’user de subterfuges pour emboîter le pas à son homologue ivoirien, Alassane Dramane Ouattara ou à son pair guinéen, Alpha Condé qui ne s’est nullement gêné pour refaire le portrait à la Loi fondamentale de son pays aux fins de s’agripper à son fauteuil. L’actuel locataire du Palais de Kosyam n’a pas intérêt à s’engager dans cette voie périlleuse. Cela porterait non seulement un grand coup à son image, mais aussi à celle de son pays qui s’affiche de plus en plus comme un modèle de démocratie sur le continent.  En tout état de cause, RMCK a obligation de réussite. Et en cela, il dispose d’un atout majeur : celui d’être dans l’incapacité morale et constitutionnelle de se porter à nouveau candidat à la présidence. Dans l’exercice de son dernier mandat, il ne sera plus, en effet, dans la même disposition d’esprit ni dans le même schéma qu’un dirigeant qui, préoccupé par sa réélection, ferme les yeux sur de viles pratiques de la gouvernance, pour des visées électoralistes.  C’est dire si RMCK doit pouvoir agir davantage dans l’intérêt de l’Etat et du peuple d’autant qu’il n’a plus rien à perdre mais plutôt à gagner ! Il a l’occasion de redresser la barre, de secouer vigoureusement le cocotier pour en faire tomber les fruits pourris de la gouvernance qui auront caractérisé son quinquennat écoulé. Et ces fruits infects ont pour étiquettes : délitement de l’autorité de l’Etat, corruption systémique, détournements frénétiques et crapuleux des deniers publics, impunité, etc. Mais, tout dépendra évidemment de l’image que l’Enfant de Tuiré aux éclats de rires tonitruants, voudra que la postérité garde de lui au terme de son passage au sommet de l’Olympe burkinabè. En tout cas, tout le mal qu’on puisse souhaiter à l’ancien-nouveau président élu, c’est de mettre le turbo s’il veut sortir par le haut quand viendra l’heure, pour lui, de céder les clés de Kosyam à son successeur.  En attendant, en cette veille de nouvel an, les Editions « Le Pays » souhaite à ses nombreux lecteurs du Burkina et d’ailleurs et à l’ensemble des Burkinabè, ses vœux ardents d’excellente année 2021.

Cheick Beldh’or SIGUE
Directeur général, Directeur de publication des Editions « Le Pays »

(Chevalier de l’Ordre national)


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