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PRESIDENTIELLE TOGOLAISE


C’est, en principe, aujourd’hui, que sera donné le top départ de la campagne pour la présidentielle du 22 février prochain au Togo. Dans les starting-blocks, l’on retrouve sans surprise le président Faure Gnassingbé, candidat pour la quatrième fois à sa propre succession, et 6 autres challengers, tous issus de l’opposition. Il s’agit d’Agbyomé Kodjo du Mouvement patriotique pour la démocratie et le développement (MPDD), Jean-Pierre Fabre de l’Alliance nationale pour le changement (ANC), Aimé Tchabouré Gogué de l’Alliance des démocrates pour le développement intégral (ADDI), Mohamed Tchassona Traoré du Mouvement citoyen pour la démocratie et le développement (MCD), Komi Wolou du Parti socialiste pour le renouveau (PSR) et Georges William Assiongbon Kuessan du Parti santé du peuple. Pour de nombreux observateurs, cette compétition électorale semble déjà pliée du fait de la simple présence sur la ligne de départ, du président sortant ; toute chose qui rend insipide cette campagne qui se fera sans véritable suspense.

C’est en roue libre que Faure Gnassingbé avance vers un quatrième mandat

Dans ces conditions, l’on peut même se poser des questions sur l’utilité de cette campagne et au-delà, du scrutin lui-même.  En effet, face à une opposition qui a échoué à se coaliser et à fédérer ses énergies autour d’une candidature unique, Faure Gnassingbé, lui, dispose de nombreux leviers à actionner pour remporter haut la main cette présidentielle. D’abord, après avoir exercé le pouvoir d’Etat pendant 3 mandats successifs, il peut se prévaloir d’un bilan qu’il est à même de présenter et de défendre face à des candidats qui, pour l’essentiel, n’ont que, dans la bouche, de simples promesses. Ensuite, le candidat du pouvoir dispose de tout l’appareil d’Etat qui, en Afrique, constitue, très souvent, une puissante machine électorale. A ces deux avantages, l’on ne peut manquer d’ajouter l’effet de la circulation des mallettes d’argent dans un pays où les populations vivent souvent dans une indigence extrême. C’est donc en roue libre que Faure Gnassingbé avance vers un quatrième mandat. Mais au-delà de ces avantages bien connus, l’on peut ajouter l’effet des conditions matérielles et techniques de l’organisation du scrutin qui cristallisent, à juste raison, toutes les appréhensions de l’opposition. Les challengers de Faure Gnassingbé redoutent, en effet, des fraudes massives à base du fichier électoral qui n’a pas été toiletté. Cette crainte est d’ailleurs renforcée par l’exclusion du processus électoral, de la mission d’observation de l’Eglise catholique. Cette mise à l’écart d’une structure bien implantée dans tout le pays et dont la rigueur au travail est bien connue, pourrait laisser croire que le pouvoir travaille à fabriquer des résultats dans des officines sécrètes en attendant le jour- J pour les sortir. Ce ne serait d’ailleurs pas une première sous l’ère Gnassingbé fils. L’on garde encore en mémoire les images caustiques de bidasses transportant, il y a de cela quelques années, des urnes dans les rues de Lomé. C’est pourquoi tout laisse croire que les quelques réformes du processus électoral comme le scrutin à deux tours ou le vote des Togolais de la diaspora auxquelles le régime a accédé, ne sont que des mesures cosmétiques.

Il faut souhaiter qu’au sortir de cette campagne, les Togolais surprennent agréablement les démocrates africains

Face à ce chaos électoral que l’on sent à plus de deux semaines du scrutin, s’il faut flageller le pouvoir qui en est le principal instigateur et bénéficiaire, l’on ne peut cependant exempter l’opposition. Car, en plus de s’être laissée avoir à l’usure dans la lutte qu’elle avait engagée pour barrer la route à la modification constitutionnelle ouvrant le chemin d’un quatrième mandat à Faure Gnassingbé en manquant cruellement d’imagination pour maintenir la flamme de la mobilisation, il faut déplorer son incapacité à se rallier derrière une seule tête d’affiche qui puisse tenir la dragée haute au candidat du pouvoir. Même si la politique de la chaise vide est rarement payante en Afrique, l’on peut aussi se demander pourquoi l’opposition a accepté d’aller à cette compétition électorale alors qu’elle n’a pas pu arracher un minimum de garanties pour l’équité et la transparence du scrutin. Mais à sa décharge , l’on peut évoquer la férocité du pouvoir et surtout le manque d’accompagnement réel de la communauté ouest-africaine dont la médiation a été biaisée par Alpha Condé de la Guinée Conakry qui nourrissait les mêmes desseins funestes que Faure Gnassingbé, de rester au pouvoir. Cela dit, l’on ne peut que souhaiter, malgré tout, que la campagne qui s’ouvre au Togo soit civilisée, c’est-à-dire exempte de violences qui viendraient accélérer la désintégration d’un tissu social déjà suffisamment fragile. Il faut surtout souhaiter qu’au sortir de cette campagne, les Togolais surprennent agréablement les démocrates africains comme il a été donné de le constater, il y a quelques années déjà, en Gambie avec la déculottée de Yahya Jammeh.

« Le Pays »


Comments
  • Dans certains pays d’Afrique noire il y a ce paradoxe incompréhensible pour beaucoup d’observateurs de la vie politique des pays comme la RDC (sous les Kabila); le Gabon, le Togo et la Guinée Equatoriale (où une monarchie est en place mais la succession du patriarque est imminente). Peut-on parler d’élections, de compétition électorale, quand tout est sous le contrôle d’un groupe familial? Non, c’est se moquer de la population. Dans ces pays, le pouvoir personnel et l’opposition – quand elle est tolérée, parce qu’elle ne dérange pas le système personnel, ne jouent pas la même compétition. Le premier est dans une optique de l’externisation au pouvoir par tous les moyens, légaux et frauduleux, tandis que la deuxième vit dans un espoir éternel d’arriver un jour au pouvoir. Dans un tel contexte, l’électorat n’est pas un acteur de la politique nationale, sinon un spectateur. Il ne peut même pas juger le bilan du clan détenteur éternel du pouvoir, puisqu’il ne présente pas un bilan, mais des vagues propositions, qui servent plus à sa clique que le peuple. Même si l’opposition arrive à s’unir autour d’un.e candidat.e, elle n’a pas la capacité, ni les moyens d’accéder des informations ou de participer au travail de l’administration de l’Etat sur le processus électoral, avant, pendant et après la publication des résultats. Sa participation est un moyen pour donner une animation temporaire à un régime corrompu et qui répond aux techniques assez subtiles de la corruption tant internet et surtout externe. C’est un régime qui fonctionne à la corruption du principal partenaire étranger : la France. N’oublions pas que la France gaulienne a installé ce régime personnel et soutenu par les présidents successifs jusqu’à celui, qui n’est pas né l’époque. Mais il s’est entouré des membres des réseaux mafieux de l’élite politico-éonomique : Emmanuel Macron.

    10 février 2020

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