PROCES DES PRO-GBAGBO : On va vers la grâce présidentielle
L’audience de Pascal Affi N’Guessan, président du Front Populaire Ivoirien (FPI), a eu lieu le mardi 17 février 2015, au Palais de justice d’Abidjan, dans le cadre du procès des proches de l’ancien président Laurent Gbagbo. Démarrées fin décembre, les assises continuent pour 82 personnes proches de l’ancien président ivoirien, accusées d’atteinte à la sûreté de l’Etat. Un procès au cours duquel, le président du FPI s’est présenté comme celui qui aura tenté de trouver une solution à la crise ivoirienne, en négociant avec les différents acteurs politiques ainsi qu’avec les diplomates, loin des violences de la rue, commises par les sympathisants de Laurent Gbagbo. Le moins qu’on puisse dire au regard des propos tenus par Affi N’Guessan, c’est que la posture adoptée par le président du FPI et ses camarades qui, jusqu’à une période récente, s’étaient installés dans une logique de défiance vis-à-vis du pouvoir, est conciliante. Elle tranche en tout cas avec les propos jadis belliqueux, propres au président du FPI. Cet engagement d’Affi N’Guessan pour la paix, qui a affirmé au cours de ce procès ne pas avoir de rancœurs et appelé au pardon et à la réconciliation, a fait dire à certains que les loups sont subitement devenus des agneaux. En effet, en appelant au pardon, Affi N’Guessan se donne les chances de bénéficier d’un verdict clément. Surtout qu’il veut désormais incarner l’avenir du parti, en décidant d’être le seul maître à bord du navire battant pavillon refondation, quand bien même il est conscient que dans la grande jungle des apparatchiks et autres thuriféraires de ce parti à ossature ethno–tribale bété, il lui faudra être ce véritable lion à même de faire oublier Laurent Gbagbo. Qu’à cela ne tienne, il faut se féliciter de ce langage différent de celui auquel on était coutumier de la part de certains cadres de l’ex-régime, y compris Affi N’Guessan.
Les dirigeants du FPI doivent reconnaître leur part de responsabilité dans la survenue de la crise
Cela pourrait décrisper un tant soit peu l’atmosphère. Mais la véritable équation qui se pose est l’attitude de Mme Simone Gbagbo. Il ne faut pas s’étonner qu’elle n’emprunte pas la même voie que Affi qu’elle accuse, du reste, de complicité avec le pouvoir actuel. En effet, depuis l’annonce de la candidature de Affi N’Guessan à la présidentielle prochaine, il lui est reproché d’être devenu un allié du régime. Affi est en effet soupçonné par l’aile dure du parti, incarnée par Simone Gbagbo, d’être en mission commandée pour le compte du pouvoir en place, afin de déstabiliser le FPI. Ils en veulent pour preuve les propos que ce dernier tient dans la presse et qui ne cadrent pas toujours avec leur vision. ADO qui doit sans doute se frotter les mains face à la crise que traverse ce parti, attend peut-être l’issue du procès et la condamnation des inculpés, pour user de son pouvoir discrétionnaire afin d’obtenir, par une loi d’amnistie, leur libération au nom de la réconciliation nationale. Cela est d’autant plus probable que la Justice a décidé de ne mettre l’accent que sur les faits d’atteinte à la sûreté de l’Etat, dans le cadre de ce procès. Mais ADO devra savoir que quand viendra l’heure d’ouvrir la page des crimes de sang, il devra coûte que coûte piocher dans son propre camp. Mais ce jour viendra-t-il ? En attendant, les dirigeants du FPI doivent comprendre qu’il est dans leur intérêt de reconnaître que leur part de responsabilité est grande dans la survenue de la crise en Côte D’Ivoire et de faire acte de repentance. C’est à ce prix qu’on pourra véritablement parler de réconciliation dans ce pays.
Seydou TRAORE