HomeA la uneRECOMMANDATIONS POUR PLUS DE TRANSPARENCE ELECTORALE AU GABON : L’opposition ne rêve-t-elle pas debout ?  

RECOMMANDATIONS POUR PLUS DE TRANSPARENCE ELECTORALE AU GABON : L’opposition ne rêve-t-elle pas debout ?  


Une commission de réflexion sur la révision du Code électoral a été mise en place à l’initiative de cinq partis de l’opposition. L’objectif poursuivi, est d’organiser des élections transparentes, exemptes de fraudes et de contestations. Les  conclussions de cette réflexion ont été présentées le 27 avril dernier. Cette autopsie du système électoral gabonais a permis de relever des insuffisances. Il s’agit essentiellement de la faible représentation de l’opposition au sein des commissions électorales et de l’opacité dans le transport et l’affichage des procès-verbaux après le scrutin. L’opposition a, en outre, proposé des recommandations. L’on peut retenir, entre autres, le retrait du ministère de l’Intérieur dans l’organisation des élections, la définition du rôle de l’armée dans le processus électoral et le plafonnement des dépenses électorales. Toutes ces propositions et recommandations seront consignées dans un rapport qui sera adressé au gouvernement et à la Cour constitutionnelle. Tous les manquements du système électoral gabonais répertoriés par les 5 partis de l’opposition ne relèvent aucunement d’une vue de l’esprit. Car, ils constituent des plaies dont le traitement avait été réclamé par tous ceux qui sont véritablement épris de démocratie au Gabon. De ce point de vue, l’on peut relever et saluer la pertinence de l’initiative de ces opposants. L’on peut également saluer le caractère républicain de leur démarche. En effet, au lieu d’ériger des barricades ou de brûler des pneus pour faire passer leurs propositions, ils ont fait le choix de soumettre leurs préoccupations à qui de droit, c’est-à-dire au gouvernement et à la Cour constitutionnelle. Mais, la grande question est de savoir maintenant, si ces deux institutions que sont le gouvernement et la Cour constitutionnelle, vont accéder aux requêtes de ces partis politiques. Rien n’est moins sûr.

 

La présidence du Gabon est l’affaire exclusive des Bongo

 

Car, il ne faut pas oublier que nous sommes au Gabon. Dans ce pays, en effet, le pouvoir, pour plagier un peu Mao Zedong, ne se trouve pas au bout… des urnes, mais au bout des manipulations, pratiquement à ciel ouvert, des résultats électoraux. Bongo père y a fait systématiquement et abondamment recours à chaque scrutin depuis 1990, année où après plus de vingt ans de régime de parti unique, il a instauré le multipartisme sous la pression des manifestations populaires. Cette démocratisation à marche forcée, n’a jamais été du goût de l’homme. En lieu et place d’une vraie démocratie, il a mis en place une sorte de démocratie à la sauce bantoue où les élections étaient perçues comme une simple formalité, uniquement destinée à faire plaisir aux Blancs, pour parler comme Balla Keita, ancien ministre de Félix Houphouët-Boigny. De son vivant, en tout cas, Bongo père n’a pas fait mystère de sa vision bantoue de la démocratie : « On n’organise pas des élections pour les perdre ». Cette bombe, il l’a lâchée sans la moindre gène. Après sa mort, son fils Ali lui succéda de manière presque monarchique à la tête du Gabon. Il hérita ainsi, en plus du trône de son père, des méthodes de conquête et de conservation du pouvoir, c’est-à-dire la fraude, les achats de consciences et l’instrumentalisation, à son profit, des institutions en charge de l’organisation des élections, de la proclamation des résultats et de leur validation. Le Haut-Ogooué, fief inexpugnable des Bongo, a toujours servi de variable de réajustement des résultats des scrutins au profit de la dynastie. L’opposant Jean Ping le sait mieux que quiconque ; lui dont tout le monde s’accorde à dire que sa victoire lui a été volée à la dernière présidentielle. La présidence du Gabon est donc l’affaire exclusive des Bongo. Et ce n’est pas par les urnes que l’on peut remettre en cause cette tradition. Le père s’y est accroché jusqu’à ce que la mort l’en sépare. Le fils, même dans un fauteuil roulant, n’a jamais renoncé au pouvoir. Peut-on attendre d’un tel homme, qu’il prenne le risque de perdre le pouvoir en organisant dans son pays des élections transparentes, telles que le souhaitent ces 5 partis de l’opposition, alors qu’aujourd’hui, son état de santé lui permet de danser ? De ce point de vue, l’on peut se poser la question de savoir si l’opposition, en formulant au gouvernement gabonais des recommandations allant dans le sens de la transparence du système électoral, ne rêve pas debout. A la limite, ces requêtes auraient eu plus de chances d’être entendues par le pouvoir, si elles émanaient de partis politiques plus représentatifs. Dans le cas d’espèce, on peut prendre le risque de dire que ce n’est pas le cas. A un an donc de la présidentielle, et dans un contexte où des militants de bien des partis politiques de l’opposition sont en train de migrer vers le parti présidentiel, l’on peut affirmer que la messe de l’alternance démocratique au Gabon est déjà dite. Car, à défaut d’Ali Bongo, ce sera son fils Nourredin.

 

Pousdem Pickou           


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