HomeA la uneREPRESSION CONTRE DES MILITANTS DE LA SOCIETE CIVILE EN RDC : Kabila casse le thermomètre mais ne fait pas baisser la fièvre  

REPRESSION CONTRE DES MILITANTS DE LA SOCIETE CIVILE EN RDC : Kabila casse le thermomètre mais ne fait pas baisser la fièvre  


 

Il y a tout juste un an, de jeunes activistes congolais de la société civile avaient été arrêtés en pleine conférence de presse avec leurs homologues des mouvements citoyens sénégalais et burkinabè venus partager leurs expériences. L’on se souvient qu’à l’époque des faits, le ministre de la Communication, Lambert Mendé Omalega, n’avait pas hésité à qualifier cette rencontre de mouvements citoyens, d’« atelier de terroristes dont l’objectif était d’apprendre aux jeunes Congolais à faire des cocktails Molotov et à déstabiliser la RDC». L’on se souvient également que la plupart des personnes arrêtées avaient été libérées dans les heures ou les semaines qui ont suivi. Seuls deux jeunes Congolais, Fred Bauma et Yves Makwanbala, croupissent jusqu’à nos jours dans les geôles de Kabila et ce, malgré la protestation de la communauté internationale et celle de l’opposition congolaise qui avaient jugé leur détention arbitraire et exigé leur libération sans condition.

Kabila a besoin de quiétude pour mieux tordre le cou à la démocratie

Mais il en faut certainement plus pour faire entendre raison à un dictateur de la trempe de Joseph Kabila dont le régime est assis essentiellement sur l’arbitraire et la répression systématique de tout ce qui est de nature à contrarier sa volonté, devenue manifeste, de s’asseoir sur la Constitution congolaise pour s’accrocher à son fauteuil. Et ce n’est pas non plus la grève de la faim illimitée que viennent d’entreprendre les deux jeunes activistes embastillés depuis un an, qui peut attendrir le cœur de Kabila-fils. De ce point de vue et au regard du fait que les deux malheureux sont accusés d’association de malfaiteurs, d’offense au chef de l’Etat, d’incitation à la désobéissance civile et d’atteinte à la sûreté de l’Etat, l’on peut affirmer que ce n’est pas demain la veille que l’on va assister à leur libération. Notre pessimisme quant à leur élargissement est d’autant plus fondé que par ces temps qui courent où Kabila a besoin de quiétude pour mieux tordre le cou à la démocratie, il ne peut pas prendre le risque d’accorder la liberté d’aller et de venir à des personnes qui, à ses yeux, représentent un grand danger pour ses ambitions pouvoiristes. Kabila, de manière crescendo, bandera les muscles contre les mouvements citoyens de son pays jusqu’à ce qu’il ait la certitude de les avoir domptés pour dérouler sans peine son plan de confiscation du pouvoir. Il est aidé en cela par des Raspoutine de talent. Suivez mon regard. Et ce genre de personnes qui ont lié leur destin à celui du dictateur et qui arpentent à longueur de journée les palais présidentiels pour peindre tout en rose à leur maître alors que, dans la réalité, le mercure social est en train de monter, rendent, à l’analyse, de mauvais services au dictateur. Si d’aventure, les choses venaient à se gâter, ils seraient les premiers, toute honte bue, à développer le discours suivant : « l’on a tout fait pour faire fléchir le chef. Seulement, il n’a pas daigné nous écouter ». Kabila a encore le temps pour ne pas se laisser envoûter par les chants des sirènes, s’il ne veut pas subir le même sort que le Maréchal Mobutu.

Des signaux du divorce entre Kabila et son peuple s’observent aujourd’hui en RDC

L’on se rappelle, en effet, que ce président, à l’époque où il était au pouvoir, avait réussi, par la répression et la force de sa fortune, à se forger l’image d’un demi-dieu au point que bien de ses compatriotes avaient fini par croire qu’il était immortel. Mais tout cela n’avait pas suffi pour sauver son régime face à l’avancée de la rébellion conduite par le géniteur de l’actuel président. La suite, on la connaît. Mobutu s’était exilé au Maroc où il a fini ses jours et où il a été enterré dans un cimetière pour personnes anonymes. Kabila doit se remémorer cette fin peu glorieuse de celui qui croyait dur comme fer que sans lui, le fleuve Congo ne coulerait plus. En tout cas, ce n’est pas en cassant le thermomètre qu’il fera baisser la fièvre. Il peut contraindre certains militants de Filimbi et ceux de la LUCHA (Lutte pour le changement)  à l’exil, emprisonner à tour de bras d’autres, mais jamais il ne réussira à venir à bout de la soif de démocratie et de mieux-être du peuple congolais. Bien au contraire, l’histoire nous enseigne dans bien des cas, que c’est dans l’adversité que les peuples qui ont pu se débarrasser de leur dictateur, ont puisé les ressources nécessaires de leur émancipation. Kabila peut donc continuer à se ranger du mauvais côté de l’histoire en traitant tous ceux qui ont fait le pari de la démocratie, comme des ennemis, mais il connaîtra tôt ou tard le sort qui est généralement réservé aux satrapes. Déjà, ils sont nombreux les Congolais qui lui envoient des signaux qui illustrent qu’ils ne plieront jamais l’échine face aux excès de son régime. Au nombre de ces signaux, l’on peut citer les pancartes qui lui sont hostiles et qui ont été brandies à l’occasion du périple triomphal du « Tout puissant Mazembé » pour fêter avec les Congolais, sa victoire en coupe d’Afrique des clubs champions. L’on peut aussi citer la grève de la faim illimitée que viennent d’entamer les deux jeunes des mouvements citoyens, qui croupissent aujourd’hui dans les prisons pour avoir simplement pris part à une rencontre, aux côtés de « Y’en a marre » du Sénégal et du « Balai citoyen » du Burkina, dont le thème à lui seul, a suffi pour susciter l’ire de Kabila et de son clan. Bien des signaux du divorce donc entre Kabila et son peuple s’observent aujourd’hui en RDC. La grande question est de savoir s’il saura les lire comme il faut. L’on pourra partiellement répondre à cette question à l’aune du verdict que la Cour suprême devrait rendre quant à la demande de remise en liberté provisoire de Fred Bauma et Yves Mukwambala, annoncé pour hier mercredi et qui au moment où nous tracions ces lignes, n’était pas encore tombé.

« Le Pays »

 


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