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SOMMET D’ACCRA SUR LES TRANSITIONS AU MALI, EN GUINEE ET AU BURKINA : Les putschistes pourront-ils éviter le bâton de la CEDEAO ?


A la veille du sommet de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) du 3 juillet prochain à Accra, c’est le branle-bas politique à Bamako, Conakry et Ouagadougou pour répondre au cahier des charges de l’institution sous-régionale qui devra se prononcer sur le sort des transitions en cours dans ces pays. Ce, à la suite des coups d’Etat des colonels Assimi Goïta, Mamady Doumbouya et Paul Henri Sandaogo Damiba venus mettre fin à des régimes démocratiquement élus. Le sujet qui fâche le plus est celui de la durée de ces transitions que la CEDEAO veut la plus courte possible, assortie d’un calendrier électoral devant conduire au retour à l’ordre constitutionnel normal. Si le Mali mise sur une durée de 24 mois après le rendez-vous manqué des 18 premiers mois, qui a suscité le courroux de la CEDEAO qui n’est pas allée de main morte dans ses sanctions, au Burkina Faso et en Guinée, les autorités intérimaires se proposent de tenir le pari de trois ans pour la mise en place de pouvoirs civils à l’issue d’élections pluralistes.

 

De Conakry à Ouagadougou en passant par Bamako, les autorités intérimaires sont sur la brèche

 

Par rapport au calendrier électoral qui est l’autre grande exigence de la CEDEAO, le gouvernement de la transition malienne, après la promulgation de la nouvelle loi électorale, le 24 juin dernier, a réuni, quatre jours plus tard, les partis politiques pour leur présenter son chronogramme qui fixe la présidentielle à février 2024. Bien avant, il prévoit l’organisation d’un référendum en mars 2023, suivi des élections territoriales en juin 2023, puis des législatives en octobre et novembre de la même année. Au Burkina Faso, le gouvernement du Premier ministre Albert Ouédraogo a pratiquement sacrifié au même exercice avec la classe politique, le 29 juin dernier, pour dévoiler son chronogramme qui prévoit la présidentielle à l’horizon février 2025, et qu’il compte soumettre au facilitateur de la CEDEAO, l’ex-président nigérien, Mahamoudou Issoufou, en visite de travail ce 1er juillet au pays des Hommes intègres. Pendant ce temps, le gouvernement guinéen lançait, le 27 juin dernier, un dialogue avec la classe politique et la société civile en vue d’aplanir les divergences sur le chronogramme de la transition. C’est dire si de Conakry à Ouagadougou en passant par Bamako, les autorités intérimaires sont sur la brèche, avant la tenue de ce sommet crucial d’Accra.  La question qui se pose est de savoir si les putschistes au pouvoir dans les trois pays, pourront éviter le bâton de la CEDEAO. La question est d’autant plus fondée que l’institution sous-régionale en demandait davantage à ses trois pays membres momentanément suspendus, en termes de réduction de la durée de leurs transitions respectives pour l’installation de pouvoir civils. Une situation qui a le don de mettre sous pression les trois officiers putschistes qui se demandent à quel… garba ils seront mangés le 3 juillet prochain, avec cette épée de Damoclès de la CEDEAO qui continue de planer sur la tête de leurs pays respectifs. 

 

Au-delà de l’institution sous-régionale, il appartient aussi  aux peuples de rester vigilants

 

Mais pour que ces gouvernements se donnent autant de mal, dans une course contre la montre qui ne dit pas son nom,  pour s’éviter les foudres de la CEDEAO, il faut bien croire que les sanctions de cette dernière sont véritablement redoutées. Et cela peut bien se comprendre. Principalement pour le Burkina Faso qui peut pâtir de son état d’enclavement et le Mali qui est déjà au bord de l’asphyxie économique après cinq mois d’embargo. Mais s’il est bien d’agir de sorte à donner des assurances à la CEDEAO, il est encore mieux de travailler véritablement à des transitions inclusives et les plus courtes possibles pour fermer le plus rapidement la parenthèse de l’Etat d’exception.  Toute chose qui pose la question de la sincérité des dirigeants de ces transitions qui ont besoin de convaincre, au-delà de la CEDEAO, qu’ils ne sont pas dans une logique de confiscation du pouvoir.  Et c’est là tout le nœud du problème. Car, même si, par extraordinaire, la CEDEAO venait à décider de prendre ces gouvernements de transition à leur propre chronogramme, qu’est-ce qui garantit qu’au bout du processus, certains ne trouveront pas le moyen de faire basculer les choses ou ne chercheront pas à légitimer leur pouvoir par les urnes, par ces tours de passe-passe dont seuls les putschistes du continent ont le secret ? C’est dire si au-delà de toute considération, Assimi Goïta, Mamady Doumbouya et Paul Henri Sandaogo Damiba ont besoin de faire la preuve qu’on peut croire en leur parole d’officiers. La seule façon crédible de le faire est de jouer franc jeu sur toute la ligne, sans calcul politicien. Toute chose qui contribuerait à renforcer la confiance de leurs peuples respectifs ainsi que celle de la communauté internationale. Ce qui n’est pas gagné d’avance. Surtout si ces chefs de juntes au pouvoir ne font rien pour ne pas laisser voir en certaines de leurs décisions, les prémices d’un agenda caché. Le Mali vient d’ouvrir la brèche avec la révision de sa loi électorale qui a vu le verrou de l’inéligibilité du colonel Assimi Goïta et ses frères d’armes membres des instances de la transition, subtilement sauté. Et rien ne dit que le cas échéant, la même opportunité ne sera pas saisie par ses homologues burkinabè et guinéen. Une situation qui vient en rajouter à la difficulté de l’équation de la CEDEAO. C’est dire si au-delà de l’institution sous-régionale, il appartient aussi  aux peuples de rester vigilants.

 

« Le Pays »


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