HomeA la uneSOMMET EXTRAORDINAIRE DE LA CEDEAO SUITE AU COUP D’ETAT CONTRE ROCH KABORE: Les Burkinabè retiennent leur souffle

SOMMET EXTRAORDINAIRE DE LA CEDEAO SUITE AU COUP D’ETAT CONTRE ROCH KABORE: Les Burkinabè retiennent leur souffle


Suite au coup d’Etat du 24 janvier dernier qui a renversé le président Roch Marc Christian Kaboré à Ouagadougou, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) tient, ce 28 janvier 2022, un sommet virtuel pour se pencher sur le cas du Burkina Faso. Un troisième dossier chaud qui échoit sur la table de l’institution sous-régionale qui, de Bamako à Conakry, est déjà en croisade contre les coups d’Etat. Qu’en sera-t-il pour le pays des Hommes intègres ? On attend de voir. Et les Burkinabè, peut-on dire, retiennent leur souffle. D’autant plus que ce coup de force de la soldatesque intervient au lendemain des lourdes sanctions infligées par la CEDEAO aux putschistes de Bamako. Sanctions censées non seulement faire plier Assimi Goïta et ses camarades à ses exigences de rétablissement, dans les meilleurs délais, de l’ordre constitutionnel sur les rives du fleuve Djoliba, mais aussi être potentiellement dissuasives pour d’éventuels autres putschistes dans son espace géographique. Mais cela n’a visiblement pas encore produit les effets escomptés.

Attention à ne pas tirer sur l’ambulance !

Ni à Bamako où les lignes d’une éventuelle sortie de bras de fer avec l’institution sous-régionale tardent encore à se dessiner clairement, ni à Ouagadougou où ces sanctions n’ont visiblement pas réussi à réfréner les ardeurs des tombeurs de Roch Marc Christian Kaboré  dans leur volonté « patriotique » de « sauvegarde » et de « restauration », suite à la grave crise sécuritaire et ses conséquences désastreuses sur les populations.

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en se penchant sur le cas du Burkina, la CEDEAO ne vient pas en terrain inconnu. A la différence que le coup de force du 24 janvier dernier n’a pas connu une vague de protestation populaire comme cela a été le cas en 2015, lorsque le Général Gilbert Diendéré avait porté un coup d’arrêt à la Transition. Une attitude qui, si elle n’est pas forcément synonyme, pour de nombreux Burkinabè, de soutien indéfectible à  la junte, ne traduit pas moins leurs fortes attentes de cette prise du pouvoir par les militaires, dans un contexte marqué par une forte pression sécuritaire sous la poussée de l’hydre terroriste qui n’en finit pas d’étendre ses tentacules. C’est dire si au nom de ses principes, l’on peut s’attendre à des sanctions de l’institution d’Abuja contre le pays des Hommes intègres. Mais attention à ne pas tirer sur l’ambulance ! Car, au-delà du coup d’Etat qui, de l’avis de presque tous les Burkinabè, tire ses sources de la mal gouvernance du pays, le Burkina Faso est malade aussi d’une double crise sécuritaire et sanitaire qui n’est pas loin de le mettre à genoux.  Autant dire que la CEDEAO  gagnerait à tenir compte du contexte du pays déjà meurtri dans sa chair par la remise en cause de son intégrité territoriale et la sécurité de populations qui ne savent plus véritablement à quelle… armée se vouer.

Il faudra savoir raison garder

C’est pourquoi l’on attend de voir ce qui sortira de ce premier sommet consacré au pays des Hommes intègres. Notamment de voir si la CEDEAO fera preuve de compréhension et de mansuétude à l’égard du Burkina, en attendant de juger sur pièce la junte qui a promis le rétablissement de l’ordre constitutionnel dans des « délais raisonnables ». En tout état de cause, de l’institution sous-régionale et de la junte burkinabè, il n’est dans l’intérêt d’aucune partie d’aller à un éventuel bras de fer qui conduirait à un isolement économique et diplomatique du pays. Quant à la CEDEAO, elle ne gagnerait rien à jeter de l’huile sur le feu au Burkina au risque de continuer à creuser le fossé de la méfiance entre elle et des populations qui ont déjà suffisamment de griefs contre elle pour ses prises de position parfois jugées inconséquentes. Pour les nouveaux hommes forts du Burkina,  au-delà du fait de prendre garde de ne pas tomber dans le populisme qui ne sert généralement pas les intérêts du pays, ils devraient travailler à ne pas prendre de risque pour un pays dont l’approvisionnement dépend  fortement des ports de ses voisins. Surtout si ces derniers devaient être amenés, pour une raison ou pour une autre, à mettre à exécution d’éventuelles sanctions de l’institution sous-régionale allant dans le sens d’un embargo. C’est dire si d’un côté comme de l’autre, il faudra savoir raison garder. D’autant que le Burkina n’est pas à sa première expérience de transition, après celle de 2014-2015, suite à la chute de l’ex-président Blaise Compaoré. Et il est permis de croire que le pays pourrait s’en sortir à bons comptes avec une transition qui pourrait, pourquoi pas, être citée plus tard en exemple, si elle choisit de capitaliser cette expérience en tirant les leçons du passé pour mieux orienter l’avenir. Il y va de l’intérêt de tous. A commencer par la junte militaire pour qui le défi sécuritaire qui a servi de principal motif au renversement de l’enfant de Tuiré, reste la priorité des priorités aux yeux de nombreux Burkinabè. C’est dire si la balle est dans le camp du lieutenant-colonel Damiba et ses camarades qui doivent donner des gages de leur bonne foi au peuple burkinabè d’abord, à la communauté internationale ensuite, et tenir leurs engagements en ayant à cœur de sortir de cette transition par la grande porte.

                                                                              « Le Pays »

 


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