HomeA la uneSOUPCONS DE FRAUDES  A LA PRESIDENTIELLE BISSAU-GUINEENNE

SOUPCONS DE FRAUDES  A LA PRESIDENTIELLE BISSAU-GUINEENNE


Nouvelle année, nouveau président pour les Bissau-guinéens. En effet, c’est, en principe, demain, 1er janvier 2020, que la Commission électorale  dudit pays donne rendez-vous pour la proclamation des résultats du second tour de la présidentielle du 29 décembre dernier, qui opposait le candidat du PAIGC (Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert) au pouvoir, Domingos Simoes Pereira, à celui de l’opposition, Umaro Sissoco Embalo du Madem G15. Arrivés respectivement premier et deuxième à l’issue du premier tour qui a vu l’élimination du président sortant, ces deux ex-Premiers ministres qui se veulent porteurs d’espoirs de changement, sont allés à la pêche aux voix de leurs compatriotes pour succéder à José Mario Vaz dont l’obstination et la volonté affichée de se tailler une élection sur mesure, a failli entraîner le pays dans le chaos.

 

La Guinée-Bissau n’a pas besoin d’une crise postélectorale qui ne pourrait que remettre en cause la paix sociale

 

Mais en pleines opérations de dépouillement et de compilation des résultats, le candidat de l’opposition relayera des allégations de fraudes contre le ministère de l’Intérieur et la Commission électorale accusées de rouler pour son rival dont ils travailleraient à favoriser la victoire. Accusations balayées du revers de la main par « la CNE [qui] profite de cette occasion pour réfuter des informations qui circulent sur les réseaux sociaux relatives à une tentative de fraude électorale ». Par ailleurs, « la Commission appelle la population à rester calme, sereine et vigilante face aux manipulations qui mettent en cause le processus électoral ». Embalo serait-il alors un mauvais perdant qui, sentant sa défaite venir, a décidé de prendre les devants en ruant dans les brancards ? En tout cas, si sa démarche ne participe pas de la préparation des esprits à un échec probable, cela y ressemble fort. Mais en portant des accusations aussi graves dont on se demande où il trouvera les preuves matérielles, Umaro Sissoko Embalo adopte une posture qui ne le grandit pas. Et  ce serait bien dommage que le pays retombe dans un climat de tensions après l’épisode du président sortant dont les velléités et autres tentatives de confiscation de l’organisation du scrutin à son profit, ont failli mettre le feu aux poudres. Cette élection n’a pas connu d’incident majeur et bien des observateurs et pas des moindres s’accordent à en reconnaître le bon déroulement. Mais après tous les tiraillements qui ont précédé la tenue du scrutin, la Guinée-Bissau n’a pas besoin d’une crise postélectorale qui ne pourrait que remettre en cause la paix sociale. En tout cas, à moins de chercher des poux sur un crane rasé,  on peut difficilement trouver à redire sur la transparence de ce scrutin dont le dépouillement, tout comme le vote, s’est souvent déroulé en plein air et en public. C’est pourquoi il faut espérer que les jérémiades  du candidat de l’opposition, pour autant qu’elles soient justifiées, ne déborderont pas du cadre légal et républicain au point de mettre à mal la paix sociale.

Il est temps, pour les Africains, de rompre avec cette tendance à la contestation systématique

 

Et si ces contestations avant l’heure devaient être les signes annonciateurs de la débâcle de leur auteur, la victoire du candidat du PAIGC ne serait pas non plus une surprise. Car, à y regarder de près, l’on se demande comment avec ses 28% au premier tour, Umaro Sissoko Embalo pouvait combler son retard sur son adversaire qui avait déjà récolté plus de 40% des voix, dans un scrutin où le report des voix est loin d’obéir à une logique mathématique. C’est pourquoi, si sa défaite venait à être confirmée, cela ne manquerait pas de logique aux yeux de nombre de ses compatriotes voire au-delà. Et ce serait la preuve que les Bissau-guinéens ont fait le choix de la continuité avec le PAIGC dont l’histoire se confond avec celle du pays depuis son indépendance. Par contre, si Embalo l’emportait au finish, il créerait non seulement une véritable surprise, mais il se mettrait aussi dans l’embarras pour avoir jeté la suspicion sur les résultats. C’est pourquoi l’on peut être aussi porté à croire que ses cris d’orfraie auront peu de chances d’être entendus. En tout état de cause, il est temps, pour les Africains, de rompre avec cette tendance à la contestation systématique lors des élections. Malgré l’enjeu, il faut savoir raison garder et surtout faire preuve de fair-play et de maturité politique, lorsque la situation l’exige. Cela participe aussi du renforcement de la démocratie.

 

 « Le Pays »

 


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