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TENUE DE LA PRESIDENTIELLE TOGOLAISE LE 5 MARS : Il y a anguille sous roche


Au Togo, la Cour constitutionnelle vient de fixer la date de l’élection présidentielle  au 5 mars 2015. C’est une annonce qui prend de court toute l’opposition togolaise et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle ne manquera pas de déchaîner de nouvelles passions,  voire de provoquer  le retour de la violence à travers des marches et contre- marches de partisans des deux camps.

En général, la fixation de la date des élections se fait en concertation avec toutes les parties prenantes (parti au pouvoir, Opposition politique, Organisations de la société civile, etc). Quelle mouche a donc piqué la Cour constitutionnelle pour qu’elle fixe  unilatéralement  cette fois-ci cette date ? Il y a bien anguille sous roche, et l’Opposition politique togolaise met au défi les autorités de la Cour constitutionnelle de prouver que Faure Eyadema  est étranger  à ce qu’elle qualifie déjà de manœuvres visant à favoriser le parti au pouvoir. Une thèse d’autant plus vraisemblable que l’annonce faite par la Cour constitutionnelle survient au lendemain de la sortie de Agbéyomé Kodjo, ancien Premier ministre et ancien président de l’Assemblée nationale sous le régime de Gnassingbé-père, appelant tous les partis de l’Opposition à constituer un front commun  contre le candidat de la majorité qui n’est autre que Gnassingbé-fils.  On peut dire, en effet, qu’en appelant à la constitution d’un front unique de l’Opposition, cet ancien gourou du régime du général Gnassingbé Eyadema a trouvé la meilleure formule pour éjecter du pouvoir, le rejeton du feu général-président Gnassingbé  Eyadéma. Et l’empressement du pouvoir à soutenir cette décision de la Cour constitutionnelle et même à mettre à la disposition de cette Cour tous les moyens matériels  et financiers pour qu’elle puisse respecter ce délai,   laisse croire d’abord que le régime de Faure n’est pas surpris par cette décision. Et ensuite, que c’est même lui qui a suggéré cette date, afin de couper l’herbe sous les pieds de l’Opposition, en ne lui laissant pas le temps matériel de s’organiser, d’aplanir les difficultés et de mettre en pratique l’appel de Agbéyomé Kodjo.

Cette décision   place  l’Opposition politique face à un dilemme

La deuxième observation que soulève cette décision pour le moins suspecte, c’est que le choix de cette date ne tient nullement compte des pourparlers antérieurs qui avaient ressorti la nécessité d’une révision préalable du fichier électoral en cours, ainsi que de nombreuses autres réformes  à engager, dans l’optique d’obtenir une   présidentielle transparente et des résultats incontestés. Or, l’Opposition avait conditionné sa participation à l’élection présidentielle, au règlement préalable de toutes ces difficultés.

Cette décision de la Cour constitutionnelle place donc l’Opposition politique face à un dilemme des plus cruels. Si elle va aux élections sans avoir obtenu la moindre prise en compte de ses revendications, elle ne pourra s’en prendre qu’à elle-même en cas de mauvais  résultats liés à d’éventuelles manipulations du fichier électoral par le régime de Faure. Mais si elle opte pour la politique de la chaise vide, elle ouvre un grand boulevard à l’actuel occupant du palais présidentiel, pour un nouveau bail et peut-être même pour un règne à vie, comme le fit son père avant lui. En attendant, l’Opposition togolaise dit rester sereine, considérant cette annonce comme un « non-évènement». Pour Dodzi Apévon, président du  Comité d’action pour le renouveau (CAR), cette annonce n’est qu’une fuite en avant du régime de Faure Gnassingbé.

 Mais le plus grave, c’est que cette décision de fixer la date de l’élection présidentielle au 5 mars, sans concertation préalable avec l’opposition, risque fort de diviser l’opposition togolaise et ce faisant, de l’affaiblir davantage, face à un adversaire qui est loin d’être un enfant de chœur et qui a, avec lui, tout l’appareil de l’Etat. Mais, peut-être est-ce l’objectif recherché par le pouvoir togolais à travers le choix du 5 mars.

Cela dit,  le plus grand danger que cette annonce de la Cour constitutionnelle fait courir au Togo, c’est surtout le risque  d’une résurgence de la violence avec son corollaire de victimes.

Dieudonné MAKIENI


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