RECONQUETE DE LA VILLE DE CHIBOK AU NIGERIA :L’armée doit mieux faire

Selon le porte-parole de l’armée nigériane, les soldats sont parvenus à prendre le contrôle de la ville de Chibok, dans le nord-est du Nigeria, après plusieurs heures de violents combats qui les ont opposés à Boko Haram. Cela, avec le concours de miliciens locaux, les Civilian JTF, qui ont plus d’une fois croisé le fer avec la secte islamiste, notamment quelques jours auparavant pour reprendre la ville de Mubi, dans l’Etat d’Adamawa.  S’il s’avère que l’Etat nigérian a effectivement  pu reprendre le contrôle de la ville de Chibok, cela constitue un véritable bol d’air pour le président Goodluck Jonathan. D’autant plus que ce dernier s’est déclaré candidat à sa propre succession, à la présidentielle prochaine. Il est d’ailleurs très critiqué pour sa gestion de la question de la secte islamiste, notamment pour son incapacité à enrayer les violences dans le nord du pays et à retrouver les deux cents jeunes lycéennes kidnappées dont on est jusqu’à ce jour, sans nouvelles. La bataille de Chibok a-t-elle été remportée par l’armée nigériane ? Si oui, chapeau bas à elle ! D’autant qu’on se rappelle les vagues de désertions de soldats nigérians qui n’avaient pas hésité, face à l’avancée de Boko Haram, à prendre la poudre d’escampette pour se réfugier au Cameroun voisin. Bien que disposant de moyens matériels et financiers importants et en tant que première puissance militaire d’Afrique occidentale, le Nigeria était réduit à regarder, impuissant, les populations innocentes de sa partie Nord continuer de subir la furie meurtrière de Boko Haram.

Constatant que leur armée a capitulé face à la nébuleuse, les populations de cette zone du Nigeria ont constitué des groupes d’autodéfense. Et n’’eût-été d’ailleurs le concours de ces miliciens, l’armée nigériane aurait certainement eu du mal à reconquérir Chibok, si tant est que ladite ville soit véritablement sous contrôle total de Boko Haram.

En tout état de cause, l’entrée en scène de ces milices venues prêter main forte à l’armée du Nigeria, est  la preuve si besoin en est, d’une incapacité notoire doublée d’une incompétence caractérisée de celle-ci.

Goodluck Jonathan aurait tort de se délecter de cette victoire d’étape si c’en est une

Au demeurant, elle ne doit pas se réjouir trop vite de la collaboration de ces miliciens. Car, ce serait oublier les risques qu’elle court en s’acoquinant avec ces gens qui pourraient, tôt ou tard, exiger une contrepartie pas toujours saine pour service rendu au Nigeria.  Sans compter qu’il faudra après, trouver un statut à ces milices.  Ce qui n’est pas toujours une mince affaire.

Du reste, Goodluck Jonathan aurait tort de se délecter de cette victoire d’étape si c’en est une. Car, une chose est  de reprendre le contrôle de la tristement célèbre ville de Chibok. Une autre est de retrouver les 276 jeunes filles  toujours entre les mains des illuminés de Boko Haram, malgré la mobilisation de la communauté internationale autour de la campagne « Bring back our girls ».  Comme on le voit, le vrai combat de l’armée est de travailler à ramener les filles de Chibok à leurs parents, mais aussi de ramener la sécurité dans le Nord du pays.  C’est dire si l’Armée nigériane doit mieux faire.

Les attentats-suicides sont légion dans cette partie du Nigeria, le dernier en date étant l’assassinat d’une cinquantaine d’adolescents dans leur  lycée.

Goodluck Jonathan aura donc peut-être gagné une bataille à Chibok,  mais pas la guerre. Sa réélection à la magistrature suprême du Nigeria dépendra certainement des résultats de sa croisade contre Boko Haram. Il a donc intérêt, en attendant la présidentielle de 2015, de redoubler d’ardeur s’il veut mettre la secte islamiste hors d’état de nuire.

Thierry Sami SOU