SITUATION HUMANITAIRE DANS LA BANDE SAHELO-SAHARIENNE : Près de 12 000 000 de personnes dans la détresse
Le Directeur régional adjoint du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) des opérations pour l’Afrique, Patrick Youssef, a animé une conférence de presse sur la situation humanitaire dans la bande sahélo-saharienne et dans le Lac Tchad, le 20 avril dernier dans les locaux du CICR à Ouaga. Au cours de cette conférence, M. Youssef a décrit une situation humanitaire alarmante et dévoilé les actions entreprises par son organisation pour assister les populations vulnérables des pays touchés par les affres du terrorisme, notamment le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
La situation humanitaire dans le Soum n’est guère reluisante. La Croix-Rouge burkinabè et ses partenaires y ont assisté plus de 18 000 personnes déplacées depuis novembre 2017. Le nombre des personnes qui ont besoin d’assistance humanitaire dans la bande sahélo-saharienne est près de 12 000 000, selon les responsables de l’organisation humanitaire. Et si des solutions ne sont pas apportées aux crises qui secouent le Mali et le Lac Tchad, la situation humanitaire pourrait s’aggraver davantage, foi du Directeur régional adjoint du CICR des opérations pour l’Afrique, Patrick Youssef. C’est pourquoi, ce dernier qui vient de sillonner cette zone, a décidé de tirer la sonnette d’alarme afin que les autorités prennent des décisions courageuses pour endiguer la crise que traverse le Sahel. Pour lui, la situation humanitaire est alarmante dans la région du Sahel dont fait partie le Burkina. Les deux facteurs majeurs de cette situation, a-t-il dit, sont les crises armées dont les épicentres sont le Mali et le Lac Tchad et les aléas climatiques qui rendent les conditions de vie des populations de cette zone très difficiles. Etant donné que les organisations humanitaires ne peuvent apporter que des solutions humanitaires, il a donc demandé aux autorités d’œuvrer à atténuer les effets de la guerre, créer des espaces de dialogue, surtout humanitaires pour que les humanitaires puissent intervenir et leur faciliter l’accès aux personnes vulnérables, etc. A en croire Patrick Youssef, que ce soit au Burkina, au Mali, au Niger, au Tchad et en Mauritanie, cet ensemble géographique requiert une attention particulière, notamment après l’annonce de la création de la force du G5 Sahel qui, a-t-il indiqué, devrait avoir un volet humanitaire, un volet politique et un volet militaire. Mais son souhait est que le volet militaire ne prenne pas le dessus sur les autres aspects, car cela occulterait une crise alimentaire assez alarmante que des communautés vivent au quotidien.
Quelques actions menées par le CICR
Enumérant quelques actions menées par le CICR pour soulager les populations vulnérables, Patrick Youssef dira que son organisation apporte du matériel médical aux hôpitaux lorsque des attaques terroristes font des blessés, communique avec tous les groupes, gouvernementaux et non gouvernementaux, apporte des ressources financières à des femmes surtout veuves afin qu’elles puissent créer des activités génératrices de revenus, etc. Parlant de résilience, il dira que c’est un élément extrêmement important car, c’est la capacité de ceux qui ont souffert un choc de se redresser par eux-mêmes avec l’appui des humanitaires. Elle peut être construite à travers un appui financier à des veuves afin qu’elles créent des activités économiques telles que la couture ou la vente de condiments. Elle peut également, a-t-il confié, avoir une forme communautaire. C’est ainsi qu’une campagne de vaccination de 100 000 têtes de bétail a été organisée par le CICR au profit de la communauté des éleveurs du sud-est de la Mauritanie regroupant des habitants dudit pays et des réfugiés maliens qui ont été contraints par la guerre à franchir la frontière de leur pays.
Aider des communautés à survivre
En somme, il s’agit d’aider des communautés à survivre, a-t-il signifié. Mais quels sont les défis qui se présentent au CICR? A cette question, Patrick Youssef fera savoir qu’ils sont nombreux. Il y a par exemple l’insécurité, le difficile accès à certaines personnes vulnérables, l’imprévisibilité et la mobilité des conflits, la complémentarité avec les autres acteurs, un défi que l’organisation doit, a-t-il précisé, relever en dialoguant avec tous les acteurs humanitaires pour trouver des espaces et pouvoir se répartir les tâches de manière beaucoup plus intelligente et le dialogue avec les porteurs d’armes étatiques et non étatiques pour leur expliquer l’importance de respecter les droits des civils et ceux qui ne font plus la guerre volontairement ou involontairement : cas des détenus. Le Directeur régional adjoint du CICR des opérations en Afrique, a réitéré son admiration pour la qualité du dialogue avec les Etats du G5 Sahel et le commandement de la force conjointe qui les écoutent et qui ont envie de collaborer avec sa structure. La présence du Directeur régional du CICR des opérations en Afrique au Burkina est-elle le signe que la situation va-t-elle empirer ? La réponse est oui, soutiendra Christian Gardon de Lichtbuer, chef de la délégation régionale du CICR d’Abidjan. Mais sur la même question, le président de la Croix-Rouge burkinabè, Dénis Bakyono, qui a cité quelques actions menées au Soum au profit des populations déplacées, s’est voulu moins alarmiste en affirmant qu’elle pourrait l’être si la guerre se poursuit.
Dabadi ZOUMBARA