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18E ANNIVERSAIRE DE L’ASSASSINAT DE NORBERT ZONGO : Le peuple réclame justice


13 décembre 1998, 13 décembre 2016. Cela fait 18 ans que le journaliste Norbert Zongo et ses camarades ont été assassinés.  Un triste anniversaire, le 18e, commémoré  à l’initiative de la Coalition nationale de lutte contre la vie chère, la corruption, la fraude et pour les libertés (CCVC) et le Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques (CODMPP). Dépôt de gerbes de fleurs sur les tombes de Norbert Zongo et de ses camarades d’infortune, une marche suivie d’un meeting et un sit-in devant le palais de Justice de Ouagadougou ont été les temps forts de cette journée du 13 décembre 2016, une « journée nationale de mobilisation citoyenne contre l’impunité, la vie chère, pour les droits économiques et sociaux et pour l’indépendance et la souveraineté nationale ».

 

 

« Norbert Zongo, 18 ans d’injustice. Quelle honte ! » . C’est l’un des slogans forts de la commémoration de l’assassinat du journaliste Norbert Zongo et de ses camarades d’infortune, tombés le 13 décembre 1998. Pour clamer leur indignation et exiger que justice lui soit rendue, à ses camarades et à toutes les autres victimes de crimes de sang et crimes économiques, les « Ouagalais » se sont retrouvés à la place de la Révolution le 13 décembre dernier pour une marche. Cela, après avoir déposé des gerbes de fleurs sur les tombes des regrettés au cimetière de Gounghin. Sur ladite place, un podium avait été dressé pour l’occasion. Pour maintenir en haleine le public en attendant le début de la marche, des artistes chanteurs se relayaient sur le plateau. C’est aux environs de 9h38 que les premiers responsables de la Coalition nationale de lutte contre la vie chère, la corruption, la fraude et pour les libertés (CCVC) et du Collectif des organisations démocratiques de masse et de partis politiques (CODMPP) sont arrivés au lieu de rassemblement. Le temps d’organiser la foule, sortie nombreuse pour l’occasion, et la marche à travers les artères de la ville de Ouagadougou pouvait débuter. Le convoi s’est alors ébranlé en direction du rond-point des Nations Unies en scandant des slogans pour réclamer justice. De retour à la place de la Révolution peu avant 11h, la foule attendait impatiemment le message des initiateurs. Après l’hymne du collectif, Chrysogone Zougmoré, 1er vice-président de la CCVC, a rappelé le contexte particulier de la commémoration de ce 18e anniversaire du drame de Sapouy.

 

« L’impunité a la peau dure et les anciens nouveaux dirigeants semblent la consacrer » 

 

Un contexte marqué notamment, selon lui, par  le maintien presqu’en l’état de certains dossiers judiciaires dont on pensait qu’ils connaîtraient à ce jour un règlement définitif ou une avancée notable ; ce après l’insurrection d’octobre 2014 et la dissolution du Régiment de sécurité présidentielle. « Mais hélas, l’impunité a la peau dure et les anciens nouveaux dirigeant semblent la consacrer », a déploré  Chrysogone Zougmoré. Et d’ajouter que dans le dossier Norbert Zongo, c’est le silence radio depuis l’inculpation de 3 militaires le 10 décembre 2015. « Un silence macabre, indigne d’institutions se proclamant républicaines mais qui se nourrissent d’impunité et s’illustrent par leur incapacité congénitale à résoudre les problèmes auxquels se trouvent confrontées les populations », a lancé Chrysogone Zougmoré.

Pour lui, il est plus qu’évident que le traitement des dossiers de crimes de sang et de crimes économiques connaît les mêmes misères que sous le règne du CDP de Blaise Compaoré ; comme si les nouveaux anciens acteurs de premier plan de la scène politique avaient des choses à se reprocher et donc à cacher.

Refusant toute idée de résignation face à cet état de fait, il a souhaité que la lutte pour le jugement des dossiers pendants dont celui de Norbert Zongo se poursuive avec plus d’abnégation. « Nous devons poursuivre la lutte, au regard de la volonté manifeste du pouvoir en place de ne pas vouloir traiter sérieusement les problèmes d’impunité des crimes économiques et de sang », a dit Chrysogone Zougmoré.

Parlant de la vie chère, Chrysogone Zougmoré a relevé la nécessité de se battre afin de s’affranchir de ses effets et d’être à l’abri de toute pression ou domination étrangère. « Pour cela, exigeons le démantèlement des bases militaires étrangères établies au pays des hommes intègres », a dit Chrysogone Zougmoré. Soulignant que la lutte contre l’impunité doit s’intégrer dans celle pour la liberté , la souveraineté et le progrès social véritable, il a fait savoir que le CODMPP et la CCVC exigent la satisfaction des populations, relatives à l’impunité des crimes économiques et de sang, à la vie chère, aux droits économiques et sociaux.

Dans la soirée, les activités commémoratives se sont poursuivies par un sit-in silencieux. Une foule, en majorité habillée en noir, assise à même le sol, ou à genoux dans un silence assourdissant durant 13 minutes, 13 longues minutes de recueillement, soit de 15h00 à 15h13mn,  13 minutes symbolisant la date de l’assassinat perpétré à quelques encablures de  Sapouy et qui a occasionné la mort du journaliste d’investigation Norbert Zongo et ses compagnons. Vu l’attitude de la foule, on se croirait dans un cimetière ou dans un contexte de deuil. Mais détrompez-vous, nous sommes devant le palais de justice de Ouagadougou. Un palais de justice vide, avec des portes et des fenêtres closes pour cause de jour férié au Burkina Faso. Férié non pas en l’honneur de Norbert Zongo, mais férié parce que le 18e anniversaire du drame de Sapouy a coïncidé avec le 13 décembre 2016, jour chômé et payé au Burkina Faso, à cause du Maouloud, une fête musulmane.

Le 13  décembre 1998, les journalistes et les activistes s’en souviennent encore. Pour commémorer ce triste anniversaire,  le Centre de presse Norbert Zongo, Semfilms Burkina, l’Union nationale de l’audiovisuel libre du Faso (UNALFA), l’Union burkinabè des éditeurs de services de télévisions (UBESTV), le Réseau d’initiatives de journalistes (RIJ) et le Balai citoyen ont initié un sit-in silencieux devant le palais de justice pour exprimer leur profonde douleur, leur indignation, relativement au traitement judiciaire réservé au dossier Norbert Zongo, 18 ans après les faits. A l’occasion, un mémorandum d’indignation et de protestation contre la lenteur judiciaire dans le dossier Norbert Zongo, co-signé par les initiateurs du sit-in a été remis au procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Ouagadougou, Maïza Sérémé, à l’issue des 13 minutes de silence.  Et c’est sous haute sécurité, et sur le pas du portail qu’elle a reçu le message des mains de Claude Méda, président du Comité de pilotage du Centre national de presse Norbert Zongo. Après avoir reçu le message, elle a déclaré que : « Depuis la réouverture du dossier, depuis la saisine du juge d’instruction, aucun effort n’est ménagé pour interpeller et déposer les présumés coupables de ce crime odieux. Il y a eu des interpellations, d’autres ont été déposés à la maison d’arrêt et de correction. Il y a eu des auditions et des expertises  qui ont été demandées. Cela veut dire que le dossier évolue positivement ». Et pour aboutir à quoi ? « Notre souci est qu’une audience soit tenue à la fin de l’instruction de ce dossier et que justice soit rendue à Norbert Zongo. Que les auteurs, les coupables répondent de leurs faits », a laissé entendre le procureur près le Tribunal de grande instance de Ouagadougou.  Mais cela ne l’a pas empêchée de relever la complexité du dossier : « Le juge s’y active mais le dossier n’est pas facile. Il connaît des hauts et des bas, mais nous sommes dans la dynamique de la recherche de la vérité. Nous croyons que nous y arriverons avec l’aide de tous et que justice sera rendue ». Mais la préoccupation première du procureur est « que le dossier soit bien ficelé afin qu’à l’audience, il n’y ait pas de quiproquo et que les auteurs répondent de leurs faits ».

Tout compte fait, le procureur Maiza Sérémé a remercié les auteurs du mémorandum pour leur démarche. « Nous en prenons acte et nous allons exploiter le mémorandum tout en vous assurant de notre disponibilité et de notre conviction à ce qu’un jour, justice soit rendue à Norbert Zongo et à ses compagnons ». C’est sur ces mots que Claude Méda et ses compagnons ont pris congé du procureur pour retrouver la foule  restée au pas de la porte, afin de lui lire le contenu du mémorandum transmis. A la question de savoir quel est le sens de l’acte posé, Claude Meda a affirmé que : « nous avons tenu à signifier au représentant de la Justice  que le peuple attend le procès en bonne et due forme de ceux qui ont perpétré l’assassinat de Norbert Zongo et de ses compagnons le 13 décembre 1998 à Sapouy ».

Après la lecture du mémorandum, la foule, debout, a entonné en chœur le Ditanyè, mettant ainsi fin au sit-in silencieux.

 

Françoise DEMBELE et Thierry Sami SOU

 

 

 

Mémorandum

 

D’indignation et de protestation contre la lenteur judiciaire dans le dossier Norbert Zongo et ses compagnons

 

18 ans d’attentes déçues

 

13 décembre 1998 – 13 décembre 2016. Cela fait 18 ans déjà que le journaliste d’investigation Norbert ZONGO et trois de ses compagnons d’infortune, Ernest Zongo, Blaise IIboudo, Abdoulaye Nikiema tombaient sous les balles assassines de leurs bourreaux, à quelques encablures de Sapouy. Le journaliste émérite et ses compagnons de route avaient été lâchement assassinés par des criminels encore en liberté.

18 ans après cet odieux assassinat, le crime reste impuni. Cette injustice intrigue et indigne la famille de feu Norbert Zongo, celles de ses compagnons, la grande famille des journalistes, des défenseurs de la liberté de presse et de la Démocratie ainsi que tous les défenseurs du Droit à la Vie.

Cela fait donc 18 ans d’attentes déçues par la justice. Ce dossier et bien d’autres dossiers de crimes continuent de pourrir le climat social et politique.

Le peuple burkinabè, dans sa grande majorité, réclame justice pour Norbert ZONGO et ses compagnons depuis 18 ans.

A l’avènement de la Transition en 2014 avec la réouverture du dossier judiciaire et après l’élection d’un nouveau pouvoir en 2015, tous les combattants de la justice et de la Démocratie ont nourri l’espoir légitime de voir s’exercer une célérité et une impartialité dans le traitement du dossier Norbert et ses compagnons ainsi que les nombreux dossiers de crimes économiques et de sang. Mais hélas, nous attendons toujours !

Malgré le verdict rendu par la Cour africaine des droits de l’Homme condamnant le Gouvernement du Burkina Faso pour obstruction à la manifestation de la justice dans l’affaire Norbert Zongo, force est de constater que si pendant la Transition, le dossier a été rouvert, la lumière n’a toujours pas jailli. Combien de temps faut-il attendre pour que la justice soit faite pour ces cas emblématiques de crimes économiques et de sang du régime déchu ? Pourquoi n’y a-t-il toujours pas le moindre début de procès dans ce dossier ?

Indignés donc par cette lenteur, voire cette léthargie que rencontre le dossier judiciaire, nous avons décidé d’exprimer une fois de plus notre colère, à l’occasion du 18e anniversaire de l’odieux crime de Sapouy.

Nous entendons faire comprendre aux autorités judiciaires et politiques que cette longue attente nous

fait honte.

18 ans à commémorer le triste anniversaire de l’assassinat de Norbert Zongo et ses compagnons sans la moindre lumière et sans la moindre justice, nous révolte.

Nous refusons de cautionner cette forfaiture et restons déterminés à poursuivre le combat pour la justice dans ce dossier.

18 ans après, notre justice nous fait honte.

Aujourd’hui, plus rien ne devrait justifier l’inertie des juges.

Plus rien ne devrait faire obstacle à une célérité et une impartialité dans l’affaire Norbert Zongo et ses compagnons.

 

Pas de vraie réconciliation sans vérité et justice

 

La justice sur les différents crimes commis au Burkina Faso devrait être le vrai ciment de la réconciliation tant recherchée.

Conscients de cela, nous, organisations de défense de la liberté de la presse, journalistes, défenseurs de la liberté d’expression et de la Démocratie, organisations de la société civile défenseures du Droit à la Vie, transmettons ce soir, le présent Mémorandum en guise de protestation contre la lenteur enregistrée dans le traitement du dossier Norbert Zongo et ses compagnons.

Cette journée du 13 décembre 2016 est marquée par une série d’actions appelée « Silence Média ». A la suite de ces actions citoyennes, nous, signataires de ce Mémorandum :

affirmons que cette injustice fait honte ;

disons Non à l’impunité et à ce déni de justice;

refusons toute obstruction, pression ou influence quelconque qui viserait à bloquer l’avancée du dossier ;

exigeons le traitement diligent et la tenue, dans des délais raisonnables, d’un procès dans l’affaire Norbert ZONGO et ses compagnons;

réaffirmons notre détermination à poursuivre la lutte jusqu’à ce que justice soit faite !

 

Ouagadougou le 13 décembre 2016

 

Ont signé :

Pour le Centre National de Presse Norbert Zongo, Jean Claude MÉDA, président du comité de Pilotage

 

Pour Semfilms Burkina, Luc DAMIBA, Président

 

Pour l’Union Nationale de l’Audiovisuel Libre du Faso (UNALFA), Charlemagne ABISSI, Président

 

Pour l’Union Burkinabè des Editeurs de Services de Télévisions (UBESTV), Issoufou SARÉ, Président

 

Pour le Réseau d’Initiatives de Journalistes (RIJ), Boureima LANKOANDÉ, Coordonnateur

 

Pour le Balai Citoyen, Serge BAMBARA (Smockey), Porte-Parole

 

 

 


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