HomeA la une36E SOMMET DE L’UNION AFRICAINE : Et si on sortait enfin des sentiers battus ?

36E SOMMET DE L’UNION AFRICAINE : Et si on sortait enfin des sentiers battus ?


Une quarantaine de chefs d’Etat et de gouvernement africains se sont réunis les 18 et 19 février derniers pour le sommet annuel de l’Union africaine (UA) au siège de l’organisation continentale, à Addis-Abeba en Ethiopie. 36e  du genre, ce sommet ordinaire placé sous le thème « Accélération de la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF)», s’est aussi penché sur les crises multiformes qui minent le continent, notamment sur les plans sanitaire, économique, alimentaire, environnemental et sécuritaire. Ces nombreux défis seront sans doute au menu des prochaines rencontres au sommet de la première instance intergouvernementale africaine, dont la direction a échu au président comorien, le très controversé Azali Assoumani. Il succède à ce poste pour un an,  conformément au mécanisme de la présidence tournante, au Sénégalais Macky Sall dont le mandat  a été marqué  par une série de coups d’État au Sahel, et une défiance grandissante des populations envers les instances sous- régionales en Afrique centrale et de l’Ouest notamment.

 

Ce n’est pas sous la présidence de Azali Assoumani que l’UA arrivera à lever tous les obstacles liés notamment au problème de convertibilité des monnaies

 

Le nouveau président devra mettre un point d’honneur à sortir enfin l’UA des sentiers battus, en commençant par opérationnaliser la Zone de libre-échange continentale africaine, qui est un projet à multiples facettes qui peine à entrer en vigueur depuis son lancement en 2012, en raison de la réticence de certains gouvernements particulièrement attachés à la protection de leurs intérêts nationaux qui pourraient être compromis par l’effet « bol de spaghetti » du projet, c’est-à-dire le chevauchement et la complexification des actions de coordination dans la mise en place de ce marché unique. Mais depuis 2018, des pays comme le Nigeria, le Burundi, l’Erythrée, la Namibie, la Sierra Leone, la Tunisie et le Lesotho, entre autres, qui avaient émis des réserves, ont fini par signer et même ratifier l’accord, laissant l’Erythrée seule en marge de ce projet pourtant louable et même salutaire  dont la mise en œuvre permettra, en principe, aux biens et aux personnes, de circuler sans restrictions ni entraves dans tout le continent. Tout cela est bien beau, mais soyons réalistes : même si la mise en place de ce marché unique, sans doute le plus grand du monde, donnera un coup de pouce à la croissance économique avec l’ouverture de nouveaux débouchés pour les entreprises et multipliera les opportunités d’emploi, ce n’est pas sous la présidence, du reste éphémère, de Azali Assoumani, que l’UA arrivera à lever tous les obstacles liés notamment au problème de convertibilité des monnaies des pays membres et de leadership entre les dirigeants, sans oublier le risque de voir des multinationales rafler la mise parce que plus compétitives que les entreprises nationales.

 

Espérons que l’instance continentale aura plus d’empathie à l’égard des populations éprouvées des différentes zones sinistrées

 

C’est conscients de ces difficultés que les chefs d’Etat africains s’étaient donné quinze longues années, lors de l’entrée en vigueur officielle de la ZLECAF le 1er janvier 2021, pour supprimer 90% des taxes douanières dans le cadre du commerce intra-africain afin de stimuler les échanges économiques entre les pays du continent, qui sont actuellement infimes par rapport à ceux entre l’Afrique, l’Europe et l’Asie, essentiellement à cause du caractère rédhibitoire de ses droits de douane. En attendant l’effectivité de ce marché intégré et ouvert, les chefs d’Etat africains devront gérer, pour ainsi dire, des dossiers brûlants, comme les crises sécuritaire et humanitaire en République démocratique du Congo qui a maille à partir avec son voisin rwandais accusé d’ingérence  avec son soutien avéré ou supposé aux rebelles congolais du M23, ainsi qu’au Mali, au Burkina et à la Guinée qui ont été suspendus de l’organisation après les coups d’Etat qui y ont été perpétrés et qui ont demandé la levée des sanctions prises à leur encontre. Sur toutes ces questions, l’UA est restée campée sur ses principes et ses positions fermes, et a même égratigné, par la voix du président de la Commission, le Tchadien Moussa Faki Mahamat, tous les chefs d’Etat qui s’adonnent à la manipulation de leur Constitution pour rester au pouvoir au-delà du temps initialement prévu. Moussa Faki Mahamat a profité de l’occasion pour demander encore une fois aux Nations unies représentées à ce sommet par son Secrétaire général, d’accepter enfin un pays africain comme membre permanent du Conseil de sécurité. Une décision importante de financer des opérations de maintien de la paix, a été également prise alors que des pays du Sahel, de l’Afrique centrale et de l’Est, de la Corne de l’Afrique, sans oublier la Libye, sont en ébullition depuis plusieurs années. Espérons qu’il ne s’agit pas d’une simple profession de foi, et que l’instance continentale aura plus d’empathie, dans les mois à venir, à l’égard des populations éprouvées de ces différentes zones sinistrées par le terrorisme ou la rébellion armée. On verra bien si d’ici à la fin de son mandat, le tout nouveau président de l’UA pourra imprimer sa marque et battre en brèche les préjugés défavorables qui lui collent à la peau depuis qu’il a falsifié la loi fondamentale pour s’éterniser au pouvoir, en veillant à ce que les conclusions de ce 36e  sommet soient suivis d’effet, notamment dans la résolution des conflits en cours et dans le respect des règles du jeu démocratique dans tous les pays du continent, à commencer par le sien propre.

 

« Le Pays »

 


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