4.72% A ROCH
La gestion globale du Burkina Faso par Roch Marc Christian Kaboré et son régime au cours des six derniers mois, a été sanctionnée par une note de 4.72/10, attribuée par la plateforme de veille citoyenne dénommée « Présimètre » qui passe semestriellement au crible les engagements pris par le chef de l’Etat lors de son accession au pouvoir, en 2015. Cette dernière évaluation sur les performances de nos gouvernants, a été réalisée, tout comme les précédentes, sur la base des avis de citoyens burkinabè relativement au respect des promesses faites par le président du Faso, secteur par secteur, et à la façon dont le pays est globalement géré. C’est une note peu flatteuse pour Roch Kaboré qui se sait surveillé comme de l’huile sur le feu par une opinion publique particulièrement critique, à seulement quelques mois de la reddition des comptes électoraux constitutionnellement prévue pour le dernier trimestre de 2020. C’est vrai que ce n’est pas encore le rouge écarlate pour sa gestion du pouvoir, mais c’est un jaune vif, pour ainsi dire, pour le président du Faso qui dégringole pour la deuxième fois consécutive dans ces sondages d’opinion à la Burkinabè, en seulement douze mois. Les récriminations les plus sévères portent sur la dégradation de la situation sécuritaire, la paupérisation de nos compatriotes et les différentes injustices sociales, sans oublier la corruption qui continue de gangréner notre Administration publique. 66% des 3024 Burkinabè interrogés pendant la première décade de juin 2019, affirment, sans sourciller, qu’ils ne sont pas satisfaits de l’action du chef de l’Etat, et 47% trouvent que nous allons dans le mauvais sens, pour ne pas dire droit dans le mur. Plus de 50% de nos concitoyens disent n’avoir confiance ni en la justice, ni au parlement encore moins au gouvernement, et 88.2% estiment que le régime actuel ne fait pas assez par rapport à la lutte contre la corruption.
On a bien envie de dire à Roch d’ouvrir l’œil et le bon
Tous ces chiffres qui sont un signe de désaffection des populations enquêtées, sont en légère hausse par rapport au sondage réalisé au cours du dernier semestre de l’année écoulée, et c’est surtout en milieu rural que, de façon inhabituelle, le président du Faso a du mal à convaincre, au regard de la note de 4.67/10 qui lui a été flanquée. A vrai dire, il n’y a rien de surprenant à cela d’autant que les griefs soulevés et les insuffisances constatées dans la gestion actuelle de l’Etat, sont beaucoup plus ressenties dans nos campagnes, notamment sur le plan sécuritaire où les populations, se sentant menacées et abandonnées à leur propre sort, rejoignent en colonnes couvrées et souvent dans le dénuement total, les centres urbains. A qui la faute ? Au président Kaboré bien sûr, mais aussi à ses collaborateurs, qu’ils soient politiques ou technocrates, toujours incapables de trouver la bonne formule pour soulager le désarroi moral et la détresse de plus en plus grande de la majorité de nos compatriotes. On dit qu’un homme d’Etat doit avoir des sentiments pour diriger certes, mais il ne faudrait pas que ce soit ses sentiments qui dirigent. C’est pourtant et malheureusement, ce dernier cas qui semble être celui de notre Président, jugé trop débonnaire pour redresser les torts et montrer la voie à suivre dans ce Burkina Faso post-insurrection, où les libertés individuelles et collectives sont en train de virer à l’incivisme pour ne pas dire à l’anarchie. Cette récurrente défiance de l’autorité de l’Etat par les citoyens n’est pas étrangère à la mollesse et à la bonhomie naturelles du chef ; mais elle trouve aussi et surtout son explication dans son incurie et sa duplicité face à des scandales économiques et/ou financiers avérés. Comment peut-on, en effet, comprendre que sous le magistère de celui qui a été placé à Kosyam pour trouver la solution à nos problèmes, des détournements de l’ordre de 16 milliards de F CFA, rien qu’en 2016, ne puissent pas être, à ce jour, élucidés et leurs auteurs punis à la hauteur de leur indélicatesse ? Le comble, c’est que tout cela ne serait que la partie visible de l’iceberg, l’enrichissement illicite étant passé de vice à vertu depuis que certains se sont crus intouchables du fait de leur proximité avec les puissants du moment. Quoi donc de plus normal que plus de 60% du public, objet de la dernière enquête, trouvent qu’en matière de lutte contre la fraude et la corruption dans l’Administration, ou de promotion d’une gouvernance vertueuse dans la gestion des deniers publics, c’est une note très salée qui doit être pointée sur l’ardoise de nos gouvernants ? Au regard de la déception exprimée par les uns et les autres par rapport à l’exécution du programme du candidat Roch devenu président, l’on a bien envie de lui dire d’ouvrir l’œil et le bon, s’il veut vraiment être à l’abri d’une mauvaise surprise en 2020. Cela dit, ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain, puisque le régime a tout de même et malgré un contexte sécuritaire sous-régional des plus difficiles, des réalisations à son actif, comme la gratuité des soins de santé pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes, la construction d’infrastructures, la valorisation des produits locaux comme le Faso dan fani… Si on ajoute à tout cela, de nombreux chantiers toujours en cours de réalisation, les deux évaluations prévues avant les futures élections pourraient avoir de meilleurs résultats, même si cela n’empêchera pas évidemment le bilan du président d’être attaquable, notamment sur la lutte contre la corruption et les crimes économiques, la gestion de la fronde sociale et sur le délitement de l’Etat dans certaines régions du pays.
Hamadou GADIAGA