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GREVE ET VILLES MORTES AU SOUDAN


Depuis le 25 octobre 2021, date à laquelle le Général Al Burhan a mis fin  à la transition politique en opérant un putsch, le peuple soudanais n’a eu de cesse d’exiger le rétablissement du gouvernement civil renversé. Pour atteindre son but, il a sonné la mobilisation et les manifestations contre la junte. En tout cas, le bureau du Premier ministre déposé, Abdallah Hamdok, a été suffisamment clair sur le sujet quand il dit ceci : « Nous appelons le peuple soudanais à manifester en utilisant tous les moyens pacifiques possibles pour reprendre sa révolution aux voleurs ». Les premières manifestations pacifiques, comme on pouvait s’y attendre, ont été réprimées dans le sang par les «  voleurs de la révolution du peuple », entendez par là, les putschistes. Au total, on enregistre quatorze (14) manifestants tués et 300 autres blessés depuis le 25 octobre dernier. Ce recours systématique à la violence armée par la junte, face à des manifestants pacifiques, est  la preuve, si l’on en avait encore besoin, qu’il est impossible à des militaires qui ont été à l’école du dictateur Omar el Béchir, pendant plus de deux décennies, de se muer en démocrates. Ce point de vue a été conforté hier dimanche 7 novembre 2021. En effet,  la junte  a encore déployé des moyens militaires et policiers impressionnants, notamment à Khartoum, pour empêcher les militants pro-démocratie d’opérationnaliser leur appel à la grève et à la ville morte. Mais, c’était mal connaître la détermination du peuple soudanais à défendre sa révolution.

 

Les Soudanais doivent  éviter de jeter exclusivement leur dévolu sur la communauté internationale

 

La grève a, en effet, été suivie et l’on pouvait lire sur le visage des croquants, leur engagement à ne pas se laisser intimider par les baïonnettes. L’on peut donc estimer que l’appel de l’Association des professionnels soudanais a été entendu. Mieux, cette structure qui avait été le fer de lance de la révolte qui avait conduit à la chute du dictateur Omar el-Béchir, a pris la résolution suivante : « Pas de dialogue, pas de négociation, pas de partenariat avec les putschistes ». Si ce cap est maintenu, l’on peut répondre par l’affirmative à la question suivante : la rue aura-t-elle raison du général  Burhan ? En effet, aucun dictateur, aussi puissant soit-il, ne peut vaincre un peuple décidé à rompre ses chaînes. L’antidote infaillible des dictateurs est donc les peuples. Un autre moyen qui pourra sérieusement les ébranler, à en croire Mo Ibrahim, est de les taper au portefeuille, puisque ce sont des gens qui ne croient qu’au dieu de l’argent. Il appelle à geler leurs avoirs à l’étranger. Dans l’absolu, on ne peut pas dire que Mo Ibrahim a tort. Mais dans le cas du Soudan, l’on peut émettre des réserves quant à l’efficacité d’une telle idée. Et les raisons sont les suivantes. D’abord,  l’on peut affirmer sans grand risque de se tromper, que les dictateurs qui se sont succédé à la tête du Soudan ne sont pas niais au point de placer leurs avoirs dans des pays où règne la démocratie. Le bon sens veut qu’ils les sécurisent dans des pays de dictature. Et ce n’est pas ce qui manque dans le monde en général et dans les pays arabes en particulier. Ensuite, les régimes dictatoriaux soudanais qui se sont succédé à la tête du pays, ont toujours été arrosés de pétrodollars par les monarchies arabes. Et tout le monde sait que ces dernières n’ont aucune considération pour la démocratie. C’est pourquoi d’ailleurs, l’on peut suggérer au peuple soudanais de ne pas se laisser endormir par la médiation de la Ligue arabe. Et ce d’autant plus que les pays qui tiennent la corde dans cette structure, tiennent la démocratie en suspicion. De manière générale, les Soudanais doivent  éviter de jeter exclusivement leur dévolu sur la communauté internationale pour installer la démocratie dans leur pays. Il revient donc au peuple soudanais de déclarer la guerre au général Burhan. Il a déjà gagné celle qu’il a livrée contre celui qui a initié Burhan à la dictature, c’est-à-dire El Béchir. S’il a donc déjà vaincu le maître, en principe, ce n’est pas l’élève qui pourrait lui résister.

 

Pousdem PICKOU 

 


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